On dirait un petit four à la violette avec cœur en pâte d'amande et corolle en paillettes de chocolat amer sur pétales de mangue. La fleur de pavot fait délirer si l'on en abuse. Il suffit de s'approcher des choses ou de s'en éloigner pour qu'elles prennent un autre sens. Certains tentent de théoriser l'unification de l'infiniment petit et de l'infiniment grand. Plus ou moins l'infini (±∞) me fascinait déjà au lycée, et plus tôt je retournais mes jouets pour les transformer en quelque chose que je ne possédais pas, mais qui me faisait rêver. Adolescent, je restais des heures le nez en l'air avec les pieds sur le bureau de ma chambre. Le monde défilait comme dans l'Atlas Mondial dont les pages palissaient à force d'en scruter les détails. Une abeille s'est approchée, elle s'est mise à table. Tandis que je la contemplais elle m'a susurré une autre histoire, un récit de voyage qui renvoyait Googlemaps à sa poésie de comptable. Ça sent les vacances, les nuits étoilées où aucun lampadaire ne vient gâcher l'écran d'épingles en 3D temps réel. Sur son chemin l'hyménoptère voit des milliers de détails qui m'échappent. J'imagine le pollen, des odeurs qui flottent, des phéromones dont on pourrait assimiler les ondes à des couleurs ou à des sons. Je quitte mon apnée pour m'ouvrir au monde qui s'offre à ceux et celles qui y veillent. Il était temps que la chaleur me fasse sortir de mon trou, que je me redresse et quitte le corset qui me permettait de tenir debout. Nous avançons, prêts à nous battre s'il le faut pour conquérir ce qu'on nous vole, mais c'est la douceur que nous visons, le festin partagé, le monde dont nous ne sommes chacun et chacune qu'un atome. Que c'est beau une fleur !