70 Perso - juillet 2015 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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vendredi 31 juillet 2015

Fermer les volets


Mois d'août oblige, je fais une pause sur le blog, histoire de changer de rythme. J'ignore encore si nous restons à Paris ou si nous allons voir ailleurs si j'y suis, mais un peu de répit me permettra peut-être de développer d'autres écritures. C'est aussi une manière de m'imposer de limiter la perfusion Internet qui me tient en laisse. Trente ans d'informatique (Atari, puis le premier PowerBook en 1991), vingt ans depuis mon engagement sérieux sur le réseau (marqué par le CD-Rom Au cirque avec Seurat), douze à bloguer quotidiennement, cela forge des habitudes que je ne contrôle pas malgré les apparences. D'un autre côté, quarante-cinq ans de musique, quarante depuis mon premier film, autant d'intermittence du spectacle remplacée par le régime de la retraite (incroyable mais vrai), et une grande fille, m'incitent à penser autrement. J'espère forcer la main de ma prochaine révolution, mais je ne sais pas encore par où attraper cette poêle brûlante. De toute évidence, même si les propositions de travail continuent de se bousculer, j'ai fondamentalement besoin de voir du pays et de faire de nouvelles rencontres. Lorsque je sais je gère, lorsque je ne sais pas je crée. Cette alternative trace le fil sur lequel j'avance depuis toujours, dépensant d'une main ce que je gagne de l'autre, mais toujours avec la nécessité de me rendre utile. Vacances ou pas, cela n'y change rien (la photo représente une tête de bergère, féminin de Birgé - partis garder nos moutons en montagne ou chasser ceux cachés sous les meubles, il s'agit toujours de faire le ménage). Vas-y JJ, respire, l'apnée n'est pas une qualité. Bon mois d'août à toutes et tous !

vendredi 24 juillet 2015

Déviation


Les services de presse m'ont transformé malgré moi en journaliste. Recevant quantité de disques, de DVD et Blu-Ray, de livres aussi, je me sens obligé de tout écouter, tout regarder, tout lire. Si j'ajoute les visites d'expositions et les concerts, le blog se transforme en chroniques, même si je tente de toujours glisser du personnel dans l'universel. Écrire moins de billets hors-sujet, poèmes, chansons, vagabondages, intimité, etc. a rendu la réciproque plus rare. Par facilité probablement, je me formate tout seul, me fondant dans le moule que les circonstances ont façonné. Pourtant je continue à privilégier les sujets peu abordés par les professionnels, choisissant d'évoquer des artistes ou des œuvres négligés par la presse. Le blog est devenu une activité militante au détriment de la création. Peut-être est-ce un équilibre nécessaire face au reste de mon travail qui, lui, est resté fondamentalement artistique, même dans ses aspects appliqués comme le design sonore ? Ici je cherche à adopter un angle inédit pour réfléchir notre monde, ailleurs j'en fabrique de nouveaux. L'écriture dactylographique occupe néanmoins un temps considérable par rapport à ma pratique instrumentale et j'ai l'impression de réfléchir en face de mon écran plus souvent que devant le spectacle du monde. C'est heureusement une illusion critique, car je continue de rêver dans le vide comme lorsque j'étais enfant. De plus, je n'ai jamais autant de plaisir qu'en réagissant à brûle-pourpoint aux questions qui se pressent au portillon. Dans une conversation, voire un monologue tendu où défilent mes pensées jusqu'à vider complètement la bobine, les idées fusent à une vitesse inégalée comme lors d'une improvisation musicale. Le brainstorming à plusieurs est un des exercices les plus excitants que je connaisse. Partager ses réflexions donne naissance à des idées que je n'aurais jamais eues sans cette émulation bienveillante. Écrire quotidiennement sur cette page y ressemble, les mots se substituant au jeu. Je cherche à m'adresser personnellement à chaque lecteur et lectrice anonymes comme lors de mes conférences, dans un vague état second, mais sans perdre le fil. C'est le propre de l'improvisation, mélange de vertige et de contrôle, où les accidents de parcours construisent le propos au delà de la maîtrise. Lorsque les phrases s'enchaînent et s'emballent sans moi, je sens qu'enfin j'y suis.