70 Perso - novembre 2015 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mercredi 25 novembre 2015

Une journée comme les autres ne ressemble à rien d'autre


Je rentre tard, longue journée, envie d'aller me coucher, mais je dois encore écrire le billet de mercredi, gymnastique intellectuelle que mes deux index copient comme des automates, mais avant, avant consulter les 298 mails que les filtres ont laissé passer, mettre des petits drapeaux à ceux auxquels je répondrai, mais demain, demain je ne sais pas, alors je passe en revue cette journée presque banale... Donner à manger à Ouist en l'absence d'Elsa, et ses médicaments, pas facile de lui faire avaler ses pilules, je le coince entre mes jambes, dos à moi, je relève sa tête en lui ouvrant les mâchoires, j'enfonce le gros cachet au fond de sa gorge et je tiens sa bouche fermée, souvent il recrache, je recommence, parfois j'agite la boîte de croquettes pour le faire déglutir, il arrive qu'il me griffe d'impatience, mais c'est rare... Séance de kiné Mézières à Saint-Michel, tous les Vélib sont en panne au Châtelet, la traversée des ponts est glaciale, j'apprends à respirer, à me poser sur mes jambes plutôt que sur mon dos... Les horaires du RER donnés par Internet n'ont rien à voir avec le réel, ceux des panneaux d'affichage non plus, les prévus sont retardés, j'en prends un qui n'était pas annoncé, était-il en avance, il arrive en retard, juste le temps pour ma correspondance à Juvisy, je marche sous la pluie givrante dans Evry... Après le déjeuner je joue avec les installations lumineuses de Flavien Théry et Fred Murie en résidence à la Fabrique de Culture de Siana. Les étudiants de Télécom École de Management doivent plancher sur le thème "Détourner la ville d’aujourd’hui pour créer la ville de demain", je coache trois groupes de dix élèves, chacun une heure, en essayant d'ajouter un peu de fantaisie à leurs projets et je développe mon sempiternel discours de la méthode pour leur donner les moyens de leurs rêves, tout en les y amenant doucement en se libérant des contingences techniques et budgétaires, l'après-midi rassemble ainsi une douzaine d'autres artistes chargés de "faire émerger les idées"... Retour par le RER que j'emprunte en touriste et j'arrive donc avec une heure de retard à la remise des Pépites d'or liées au Salon du Livre de Jeunesse. Le lauréat est publié par un énorme éditeur américain qui ne s'est évidemment pas déplacé alors que plusieurs petits éditeurs français mériteraient d'être sérieusement soutenus, toute considération artistique mise à part. Cela me rappelle notre nomination aux Victoires de la Musique où nous étions en compétition avec Henri Dès et Walt Disney. Disney avait remporté la Victoire. Malgré des budgets sans commune mesure les autres projets me semblaient tout aussi intéressants. Nous passons pour autant une excellente soirée en bonne compagnie, mais je dois repasser voir Ouist pour lui redonner ses médicaments et j'aimerais bien aller me coucher, d'autant que je suis captivé par un polar de Ian Manook que je croyais mongole tant ses détails sonnent authentiques, j'y reviendrai, mais il me reste encore à trouver une idée pour mon blog avant d'éteindre...

mercredi 11 novembre 2015

Swing de la viande bleue


Le couteau à pain sur miche de campagne est un classique de glissade matinale. Pas très malin à la veille d'un concert où tous mes doigts sont requis sur les noires et les blanches. La coupure est légère, mais la chair gonfle comme la pâte au four. Au pire ou au mieux, les notes sous l'index formeront légère syncope. Le swing de la viande bleue, demain soir jeudi 20h au Triton !

vendredi 6 novembre 2015

Le jour d'après


Voilà. C'est passé. Vous m'avez copieusement et gentiment arrosé de vœux par téléphone, SMS, mail, réseaux sociaux.
Internet fait sortir du splendide isolement. Je dis pis que pendre de FaceBook, et avec raison, mais l'appli permet de se sentir moins seul, surtout lorsque l'on développe des idées que l'on pensait partager avec pas grand monde. FaceBook est moche, pas pratique, flicarde, sélective, brimante, mais j'y ai connu nombre de personnes dont les propos sont proches des miens ou qui m'ont ouvert les yeux sur différentes questions, sans parler des très précieuses informations professionnelles que l'on y glane. Depuis que je vous lis je suis un peu moins parano ! Tout dépend du type de réseau que l'on s'est constitué. Sur mon "mur" j'indique essentiellement les liens vers mon blog et n'accepte que les "amis" que je connais. Sinon j'envoie en message privé : "Qui êtes-vous ? Bonjour, avant d'accepter une demande d'amis, je pose cette question à tous ceux et à toutes celles que je ne connais pas, quand ma mémoire fait défaut ou que les informations de FaceBook ne me permettent pas de l'apprendre." C'est montré du tact, n'est-ce pas ?
Sur Google+ un nombre invraisemblable de jeunes femmes inconnues revendiquent chaque jour de suivre mes activités, me laissant extrêmement perplexe quant à leurs intentions qui m'apparaissent obscures ! Sur Twitter dont la brièveté des messages est peu adaptée à mon "style" je ne colle également qu'un lien accompagné de deux ou trois hashtags. Au vu du temps que me prennent les liens à ajouter dans mes articles je me demande si je vais continuer, sauf si véritable nécessité, vous laissant le soin de googliser les noms ou mots que vous ignorez.
Encore merci pour tous vos messages chaleureux qui m'ont touché !

jeudi 5 novembre 2015

Aujourd'hui c'est vous qui m'écrivez


Je suis né le 5 novembre 1952 à Paris. La clinique était impasse Malesherbes qui donne dans la rue des Martyrs. Il m'a fallu des années pour m'échapper de ce concept ! Le neuvième arrondissement est au centre de la capitale, quartiers populaires. Ma mère est née boulevard de Strasbourg, ma grand-mère rue du Faubourg Saint-Denis. Ça c'est Paris !
Mon père était angevin, mais les deux côtés de la famille viennent de l'est de la France, probablement des Gaulois convertis au judaïsme, en tout cas pour le maternel. Ce détail me fait marrer quand je pense aux xénophobes et aux racistes arrivés bien plus tard, pour la très très grande majorité, dans ce pays qui ne s'appelait pas encore la France !
Ma mère, pessimiste comme pas deux, ayant deux sœurs et une vingtaine de cousines, était persuadée que je serais une fille. Ils avaient prévu de m'appeler Claire, mais pas pensé à un prénom de garçon. Jacques leur plaisait, mais il y en avait déjà un en Lorraine, ils me l'ont donc collé avec celui de mon père, et vlan, vlà Jean-Jacques qui se pointe ! Je me le traîne depuis 63 ans et avec le temps je me suis même fait à jj et jjb. Cela m'a longtemps horripilé, mais le jour où Robert Wyatt m'a appelé djay djay bi, je n'ai pas osé le contrarier, d'autant qu'avec sa voix l'allitération sonnait plutôt bien. Depuis, mes mails se terminent même par jjb. À une époque j'ai écrit aussi quantité d'articles et d'œuvres sous pseudonymes, mais le propre des pseudos est qu'ils restent anonymes.
Pour les amateurs d'astrologie je suis scorpion, dragon et, entre autres, marxiste. Bien forcé, j'ai pris le pli et renais régulièrement de mes cendres.
Un joyeux non-anniversaire à toutes et à tous !

P.S.: pour les cadeaux, les embrassades, les vœux in vivo, rendez-vous au Triton dans une semaine, jeudi 12 novembre à 20h, nous donnons un unique concert avec l'accordéoniste Pascal Contet et le saxophoniste-clarinettiste Antonin-Tri Hoang ;-)

mardi 3 novembre 2015

Taper n'est pas jouer


La semaine dernière j'ai passé plus de temps à taper sur mon clavier d'ordinateur, dans le passé on disait à la machine, que sur mes touches noires et blanches. Certains jours, en me levant de bonne heure, je suis monté jusqu'à quatre articles : sur le thème de la refondation pour La Revue du Cube, sur ma collaboration avec Michel Houellebecq pour Les Cahiers de l'Herne, pour le Journal des Allumés du Jazz sur les rapports musique et Internet, dans cette colonne évidemment, pour le vinyle que publiera Le Souffle Continu réunissant des pièces en duo avec Francis Gorgé datant de 1974-1975, pour le site drame.org où j'ai ajouté ici et là de nouvelles pièces inédites retrouvées dans mes archives, etc.
Certains me prennent pour un journaliste, alors que cette activité périphérique est militante. Je me bats pour mes idées, pour défendre mon travail, pour aider les beaux projets des uns et des autres que les plumitifs professionnels négligent. Philippe Ochem a annulé la table ronde qui devait se tenir ce mois-ci à Jazzdor sur la presse et les blogs, dommage ! Mais comme disait Bourvil, "quand on est artiste, il faut faire tous les genres !" Mon rôle de producteur implique que je connaisse tous les postes, de la comptabilité à la direction artistique, de la vaisselle à la scène. Compositeur, je mets les mains dans le cambouis en interprétant mes propres ?uvres.


Je dois ainsi préparer le concert du 12 novembre au Triton où je reprends le spectacle Un coup de dés jamais n'abolira le hasard avec l'accordéoniste Pascal Contet et le saxophoniste-clarinettiste Antonin-Tri Hoang qui n'y ont encore jamais participé. Comme nous faisons tirer au public les thèmes de nos improvisations au hasard, je ne peux que fourbir mes armes en choisissant les instruments que j'emporterai ce soir-là. J'ai "posté" la newsletter pour l'annoncer. J'ai également envoyé au Triton le texte de présentation du concert de janvier prochain où je jouerai avec Bumcello ! Il ne reste que des petits détails à régler pour les projets en cours, au Louvre, à la Maison de l'île de la Réunion, à la Cité des Sciences et de l'Industrie, ainsi que sur tablette et plateau de jeu...
Je remets sans cesse au lendemain le gros projet personnel que j'ai entamé il y a cinq ans et qui devrait me donner beaucoup de travail dans l'année à venir. J'ai numérisé une vingtaine de films dont j'ai composé la musique dans les années 70-90, les supports VHS ayant commencé à se dégrader. Grande surprise de découvrir des partitions sonores que ma mémoire avait totalement effacées. Les premières sont souvent enregistrées au synthétiseur ARP 2600, les dernières avec un échantillonneur, mais j'utilise quantité d'instruments acoustiques si besoin, intégrant parfois des bruitages, m'associant aussi avec d'autres musiciens comme l'accordéoniste Michèle Buirette ou mes deux acolytes d'Un Drame Musical Instantané. Les incroyables Archives de la Planète montées par Jocelyne Leclercq pour la Cinémathèque Albert Kahn y tiennent une place importante, mais il y a aussi les clips de lancement de la Vidéothèque de Paris, celui du Congrès de Marseille de la Sacem, l'habillage qu'Étienne Mineur avait conçu pour Europrix à la télévision autrichienne, des films institutionnels qui imaginent un futur que nous avons dépassé depuis, des films d'entreprise qui en disent long sur la démagogie patronale, un documentaire sulfureux de Michèle Larue, etc.
Lorsque j'exécutais ce genre d'exercice à voix haute, je faisais rire ma regrettée camarade Brigitte Dornès qui disait que je révisais. En laissant ces traces, plus de 3200 articles rien qu'ici, j'édifie un gigantesque aide-mémoire qui vient rejoindre mes quatre-vingt cahiers intimes (pré-blog), mes archives et celles du Drame, mes bibliothèque, discothèque, bandothèque, vidéothèque, etcéthèque. J'ai très tôt compris l'importance que revêtirait de les organiser au delà de leur simple conservation. Les systèmes sophistiqués de recherche informatique m'ont rendu négligent. J'ai laissé tomber mes fiches en carton, mais je ne remplis plus ma base de données, sauf lorsqu'un nouveau projet l'exige. Le temps du partage suit celui de l'acquis. La possibilité que j'enchaîne encore quantité de créations me fait redouter une accumulation qui semble exponentielle malgré la miniaturisation des supports de sauvegarde. Plus la maison est grande plus on l'encombre, or elle arrive à saturation. Les perspectives existentielles que cette pensée engendre me fiche un peu la trouille.

Illustration : Arman, Infinity of Typewriters and Infinity of Monkeys and Infinity of Time = Hamlet (1962)
Extrait : Jerry Lewis, The Typewriter in Who's Minding The Store? (Un chef de rayon explosif), musique de Leroy Anderson (1950), film de Frank Tashlin (1963)