Il faut parfois du temps pour que les informations nous parviennent. Hier s'amoncellaient dans ma boîte un paquet de mails concernant la visite de policiers à la Librairie Le Thé Troc, rue Jean-Pierre Timbaud dans le 11ème arrondissement de Paris, accusée d'avoir exposé un dessin les représentant arrêtant un type qui a peint sa maison en couleur alors que les autres de la rue sont grises. La chose est inquiétante après l'interdiction du livre de Placid, après la confiscation à la Librairie du Monte-en-l'air d'une affichette de soutien à Lamine Dieng mort dans un fourgon de police, après le scandaleux procès à La Rumeur et autres bavures culturelles qui rappellent les premiers indices d'une époque sinistre que certains croyaient, à tort, définitivement révolue. La moindre critique satirique portant atteinte à l'image de la police transforme ses auteurs en gibier de potence.
Au-delà de la sinistre farce jouée par les pandores, on peut s'interroger sur le fait que l'information en question fut publiée le 6 juillet dernier sur le site d'indymedia et qu'elle est présentée comme si cela s'était produit aujourd'hui. Si les résistants qui relaient ce genre d'annonce ne vérifient pas leurs sources, ils risquent de décrédibiliser l'outil que représente Internet pour lutter contre toute censure. Ce n'est pas la première fois que cela se produit, on se souvient des fausses déclarations de Le Pen qui aurait cité Hitler, par exemple. La presse professionnelle (qui oublie vite les panneaux dans lesquels elle tombe régulièrement) et le pouvoir (qui les a souvent commandités) sont trop heureux de montrer que ce n'est que rumeur pour étouffer la concurrence ou l'opposition sur un terrain qu'ils ne maîtrisent pas. Alors, vérifiez scrupuleusement les informations, faites des recoupements, avant de sonner l'alarme. Rappelez-vous ce que l'on nous répétait enfants : la prochaine fois, on ne te croira pas. C'est plus grave que cela n'en a l'air. Les affaires sont sérieuses. Et moi qui espérais repeindre ma maison en orange sanguine, j'entends déjà se dresser les gibets.