Pour manger, nous avons appris à éviter les restaurants où la nourriture est quelque peu édulcorée pour plaire aux touristes. Nous ne déjeunons et dînons que sur des bancs de fortune, dans la rue, dans des échoppes essentiellement fréquentées par les locaux. Je me souviendrai toujours du petit déjeuner où nous avons élu cette soupe de tripes à la noix de coco relevée à souhait. Pour épicé, on dit mak phèt. J'en abuse avec légèreté. Le second jour à Luang Prabang, nous avons trouvé un hôtel dans un quartier charmant, semi-campagnard. Des petites venelles quadrillent des jardins fleuris. L'ambiance est gaie. Nous nous sommes écartés des endroits rupins, tout près du marché hmong où nous dégustons soupes de nouilles, petits rouleaux de toutes sortes, sucrés et salés, poissons et viandes grillés, herbes parfumées... Le café lao est absolument renversant. On verse dans le fond du verre du lait concentré sucré, puis le café noir, pâte épaisse succulente, l'eau bouillante, et le résultat ressemble à du chocolat épais, sauf que c'est du café, un des meilleurs au monde !
Nous buvons de l'eau minérale ou de l'eau filtrée mise en bouteilles, de la bière locale, la célèbre Beer Lao dont nous apercevrons les brasseries, ou des sodas américains. En Thaïlande comme au Laos, on mange avec une cuillère et une fourchette, sauf chez les Chinois où l'on se sert de baguettes. Jamais un couteau. Parfois les doigts.
La fréquentation des quartiers chinois de Paris nous permet de mieux appréhender la cuisine et les usages rencontrés en Thaïlande et au Laos. Nous retrouvons les phò vietnamiens, la cuisine du sud de la Chine, la noix de coco et les cacahuètes thaïs. Mais ici, ce sont des produits frais. Le lait de soja est pressé devant nous, les rouleaux confectionnés au fur et à mesure, les pâtes dénouées, les noix de coco cueillies et attaquées aussitôt à la machette pour en boire le jus et savourer la chair tendre. Souvent nous regardons ce que les Laotiens ajoutent à leur bol afin de les imiter. Au restaurant, les mets sont rarement chauds, car il est d'usage de les servir tous en même temps et d'attendre qu'ils soient tous sur la table avant d'attaquer le repas. Même chose avec le thé servi d'office, tiède la plupart du temps, ou les verres d'eau que nous ne touchons pas de peur d'attraper quelque maladie intestinale. Nous passerons au travers de la tourista, mais nous nous retrouverons chacun avec un mal de gorge carabiné qui se transformera en toux, un classique du pays, semble-t-il à l'écoute de la bande-son.