Le Festival Électrolyses organisé aux Lilas par La Firme aura proposé une version adulte de la mouvance électro. Après une intro ratée à l'Espace Khiasma, le public de Lilas en Scène jubile devant le spectacle de l'écrivain Jacques Rebotier accompagné avec intelligence et doigtés par Paul Brousseau. Rebotier, en grande forme, improvise une performance sans fard où la lecture d'extraits de ses livres, ses pirouettes musicales humoristiques et ses commentaires en a parte alimentent un remarquable sens de l'instant. Il danse. Brousseau transforme la voix du poète en temps réel, il synthétise, analyse, électrolyse en jouant le clown blanc de ce duo plein d'esprit. L'échelle dans le champ me rappelle Discorama, l'historique émission de Denise Glaser filmée par Raoul Sangla, lorsque l'art croisait tendrement le réel à la télévision dans la plus grande franchise. Cela fait tant de bien d'en voir s'amuser sur scène, il n'y a pas de secret, c'est communicatif !


La soirée s'achève magiquement au Triton avec Pierre Bastien et Steve Argüelles. L'ancien contrebassiste devenu maître es Meccano et pocket-trompettiste a apporté de Rotterdam sa table musicale, une machine protéiforme rassemblant engrenages, souffleries, tourne-disques, clapets d'harmonium, cordes, etc. Le batteur, toujours aussi fin, s'engouffre dans ces ritournelles mécaniques aussitôt qu'il entrevoie une porte entrouverte. Avec ses fûts, ses cymbales et les boucles qu'il en tire et filtre, toujours en temps réel, il amplifie astucieusement l'orchestre de bric et de broc de Bastien qui soliloque à la trompette avec la même fragilité que son instrumentarium, tel l'enfant qui a grandi mais refuse de faire l'impasse sur ses rêves.


Je n'aurais jamais dû baisser ma garde. On me demandait comment j'allais, je répondais que samedi je serais peut-être en vacances. Me levant tôt, j'ai préparé ma déclaration d'impôts, rempli les feuillets de congés spectacles, et je suis tombé malade. Les douleurs m'assaillant de toutes parts, je me traînais comme si j'avais une grosse grippe, fatigue de chaque membre, le moindre mouvement difficile et l'impossibilité du sommeil comme si je ne me réveillerais plus jamais. Après le déjeuner, j'ai fait l'effort d'aller assister à la création chorégraphique de Magalie Albespy à Lilas en Scène. David Buff a truffé le corps de la danseuse de capteurs qui déclenchent les mots clefs du Jeet Kune Do tandis que Paul Brousseau l'accompagne, à la batterie cette fois, en trafiquant les voix de Bruce Lee et de son élève Dan Inosanto. La leçon est amusante, la performance épuisante, pour la combattante qui se bat contre des moulins à vent numériques. C'est le jeu.
Vingt minutes plus tard, je retrouve Jacques Rebotier, au soleil, pour évoquer les règles, ou mieux leur absence, de la véritable improvisation. En face d'un esprit vif doit répondre sa mise en pratique instantanée. L'enjeu est de réduire le temps qui sépare la conception de la réalisation. Sans une importante préparation les instruments électroniques ne sont pas les mieux adaptés à ce genre de sport artistique. A suivre.
Pour clore ce mini-festival, j'avais prévu d'aller écouter le quartet formé de Senso (Olivier Sens), Léna (Mathias Delplanque), Black Sifichi et Steve Argüelles, mais la fièvre me cloue au lit.