Quand j'étais petit, mon grand-père m'emmenait chaque année assister à la Parade de la Garde Républicaine. Mon passage préféré était l'escadron motocycliste roulant au ralenti et tricotant d'étonnants enchevêtrements en équilibre sur leurs engins. L'ensemble ressemblait à un défilé militaire à travers les âges. Je crois que Grand-Papa aurait aimé continuer l'armée plutôt que faire le représentant en toile de tente. C'est comme cela que je m'en souviens. Il répétait imperturbablement l'histoire de sa jument qui s'appelait Arlette (comme son aînée !) ou nous donnait des cours théoriques de tir au mortier, surtout si mon cousin Alexandre l'y exhortait avant de prendre le large, nous plantant là. Pour mes exposés sur la Guerre de 14, l'officier de réserve, c'est ainsi qu'il aimait se représenter, me prêtait son casque de poilu, sa citation de blessé à Verdun et ses décorations. Il militait à la Protection Civile. Mon père le provoquait politiquement parce qu'il était resté gaulliste après 1945, il l'appelait Papa, lui dont la mère était morte de la tiphoïde lorsqu'il avait trois ans et dont le père était parti en fumée à Buchenwald. Je l'aimais bien, même si les échanges étaient limités. Je me suis fait réformé ! J'entretenais par contre une vraie complicité avec ma grand-mère que nous appelions Grand-Maman. Il se prénommait Roland et elle Madeleine. Ma mère n'aurait jamais supporté que ses petites-filles l'appellent autrement que Geneviève. Le film transmis par Henri Texier m'a rappelé ses nuits de mon enfance que je partageais seul avec mon grand-père. Ah, la précision suisse, le chocolat, la neige, le paradis fiscal, ça grise !

P.S.: le film ayant été retiré de YouTube, j'en ai trouvé un plus récent...