Je suis affecté plus que je ne l'imaginais. Les graveurs, la chaudière, c'est de l'histoire ancienne. Mais la disparition de Beefheart, c'est la fin d'une histoire. Que le dernier de mes initiateurs passe l'arme à gauche ne laisse plus de place que pour l'avenir.
Comme rien n'est jamais tout à fait noir, dimanche matin j'avais tout de même un point à mon actif et pas sur le nez. Levé à 6h30 je compose la musique des maquettes du nouveau projet de Sun Sun Yip, un douze écrans en cercle et un dispositif à quatre plus bizarre. J'enregistre huit versions linéaires de cette composition qui sera interactive s'il gagne le concours international visé et cinq versions du projet de repli. Cette fois je choisis les sons purs de l'orgue de cristal ponctués de petites flaques d'eau aériennes pour l'un et des sons aquatiques de synthèse dans l'esprit de mon Rideau d'eau pour l'autre. Ses images de synthèse en 3D sont incroyables.
Hier 6h30 rebelote, mais cette fois je prépare la séance avec Vincent Segal pour notre concert au Triton du 12 février prochain. Avec lui tout est simple et je me surprends chaque fois à réussir des trucs inimaginables dont je me serais cru incapable. En trois heures nous bouclons le programme calqué sur la forme sonate : allegro, presto, adagio, finale. De mon côté, aucun clavier, mais mon Tenori-on, le Kaossilator et la Mascarade Machine conçue avec Antoine Schmitt sur deux morceaux, le reste en acoustique avec, entre autres, trois instruments à vent construits par Bernard Vitet. Vincent découvre également la contrebasse à tension variable dit le frein qu'il a construite au début des années 70 et son arbalète, un violon alto à frets en laiton et plexiglas fabriqué dix ans plus tard avec l'aide de Raoul de Pesters. Vincent est si enthousiaste qu'il décide de ne pas seulement jouer du violoncelle, ce qui lui arrive rarement, mais aussi de ces deux prototypes que je transforme en direct avec l'Eventide, produisant un effet de quatuor à cordes ou l'illusion d'un espace infini.


En sortant de déjeuner nous passons au Triton voir la salle que Vincent ne connaît pas, parce qu'il souhaite jouer à puissance acoustique. Sur la scène Sclavis répète un projet baroque. Dehors le programme qui ressemble à un panneau d'aéroport affiche "bizarre" pour qualifier notre duo. C'est bien trouvé...
Ces deux matinées me requinquent. Je pourrais peut-être faire la grasse matinée si les idées ne se présentaient d'elles-mêmes au réveil. Je vais partir en vacances en espérant que mes yeux s'ouvriront sur l'espace-temps local et sur rien d'autre si ce n'est ma mie qui en a autant besoin que moi. Nous sommes excités de ne rien savoir de ce qui nous attend, d'abord pendant notre périple asiatique, et puis après, à notre retour.
De l'inconnu naît le désir...