Ce jour-là, La Machine à rêves de Leonardo da Vinci était réapparue après une éclipse de trois jours de l'Apple Store suite à un bug du plus obscur.
Si Jacques Perconte appuya sur le déclencheur de son appareil il rata ma disparition soudaine entre le podium et l'écran. Pourtant prévenu de ne pas dépasser la ligne blanche continue, je n'avais pas prévu d'appuyer ma démonstration en allant toucher les images projetées sur le mur. Exclamation de stupeur dans la salle du CFA lorsque je m'enfonçai dans le trou noir, me rattrapant de justesse et glissant en souplesse dans les cinquante centimètres béants. Rien de cassé, lunettes écrasées, bientôt réparées par l'opticien de la Porte des Lilas. Un peu contrarié je continuai ma conférence sur le design sonore et la création musicale dans leur relation aux images sans montrer mon émoi. Et moi, et moi, et moi, chantait Dutronc. Mon intervention autour de ma vie, mon œuvre s'appuyait cette fois sur la projection d'Alphabet, Leonardo et FluxTune. Je citai Cocteau, Renoir, Ophüls, pour justifier de la nécessité des arrières pensées, de la technique pour pouvoir l'oublier, des hors-champs géographiques ou temporels...
Il y a plus de trente ans j'étais tombé de la scène de Villeneuve d'Ascq tandis que je pratiquais la respiration continue. Roulé boulé avec la flûte en bouche, je faillis bien me tuer. Les pieds en l'air la tête en bas, pour rassurer mes deux camarades restés en haut je repris la musique à l'endroit où j'en étais resté avant de dégringoler.
Rescapé, j'ai pris l'habitude de prendre des repères et d'assurer mes arrières. C'est sans compter l'enthousiasme qui vous fait oublier jusqu'à votre propre corps !