Dans la sphère culturelle les réductions de budget vident les structures de leur sens. Au delà des frais fixes et incompressibles, immobilier et entretien, salaires des permanents, etc. il ne reste rien ou pas grand chose pour la programmation. Les lieux d'accueil deviennent des coquilles vides. Les artistes se retrouvent donc dans une situation de plus en plus précaire, les intermittents sont pour la plupart incapables de comptabiliser les heures nécessaires pour faire valoir leurs indemnités de chômage, sans parler des autres, condamnés à manger de la vache enragée. Tout le monde s'inquiète, mais la révolte est encore bien sourde face à l'austérité prônée par le gouvernement. Tout cela n'est évidemment qu'une question de choix, et tous les secteurs de l'économie sont touchés par cette politique criminelle et suicidaire. On jette à la rue les pauvres pour faire le lit des riches. Le nombre des nantis est pourtant inversement proportionnel à celui des exclus.
En regardant la cour du Palais Royal depuis la terrasse du Ministère de la Culture j'ai cru y voir une allégorie de ce gâchis. Au premier plan les colonnes de Buren sont entières, mais derrière ce petit rempart toutes les autres sont sciées à la base, asphyxiés par les bâtiments historiques qui les encadrent dans une bienséance de façade. Le personnage qui erre au milieu de cette forêt décimée me rappelle le héros de bande dessinée Léon-La-Terreur ou le photographe Gilbert Garcin dont on pourra admirer une exposition cet été lors des Rencontres d'Arles. Dans des registres différents les deux bonhommes cravatés noir et blanc dynamitent les conventions et nous interrogent sur l'absurdité de notre monde.