Carlotta publie en Blu-ray et DVD un film culte de Todd Haynes, hymne au glam rock en forme de kitscherie musicale et cinématographique. De Superstar: The Karen Carpenter Story (film interdit sur la vie de Karen Carpenter entièrement interprété par des poupées Barbie et visible de temps en temps sur YouTube) à I'm Not There (où six acteurs différents dont une femme incarnent Bob Dylan) le cinéaste américain s'est toujours passionné pour les récits mettant en scène des musiciens.
Velvet Goldmine est de cette veine hors du commun où les aller et retours entre fiction et réalité produisent une poésie vertigineuse où l'abondance de références plus ou moins cachées finissent par former une toile d'araignée cannibale qui gomme les a-priori et nous avale corps et âme. Par un effet de renversement propre au système d'identification cinématographique cette fellation peut nous chatouiller la luette ou la digestion arachnoïde aller jusqu'à son terme scatologique, mais l'expérience mérite toujours le voyage tant Haynes bouscule les codes en changeant nos repères.
Ainsi, si le glam rock m'a toujours laissé insensible par son attraction pour une décadence propre à la bourgeoisie et la poudre aux yeux des paillettes camouflant la lutte des classes au profit d'une révolte sexuelle, certes nécessaire, mais lourdement versifiée, le film, et plus encore le bonus où témoignent Todd Haynes et sa productrice Christine Vachon, ainsi que ses acteurs Ewan McGregor, Christian Bale, Jonathan Rhys Meyers, Toni Collette, m'ont permis de mieux comprendre cette période de l'histoire du rock dont le côté rétro m'avait agacé. Car la revendication de la bisexualité s'opposant au machisme du rock et à l'hétérosexualité du psychédélisme évitait hélas la question du féminisme en ne mettant toujours en scène que des hommes. Le film n'est d'ailleurs pas exempt de misogynie. De plus, dans la fastuosité des années 70 il existait des courants autrement plus inventifs, tant dans le rock que dans le jazz et la musique contemporaine.


Le scénario abracadabrant que le style exige et l'étude de mœurs quasi ethnographique confèrent néanmoins à Velvet Goldmine (1998) un intérêt indéniable. Si David Bowie, Iggy Pop, Lou Reed ou Marc Bolan ont inspiré les personnages principaux du film, les musiciens qui ont participé aux enregistrements de la musique ont dû bien s'amuser à recréer cette période essentiellement britannique. On reconnaîtra Thom Yorke et Jonny Greenwood (Radiohead), David Gray, Bernard Butler (Suede), Andy Mackay (Roxy Music), Ron Asheton (The Stooges), Thurston Moore et Steve Shelley (Sonic Youth), Placebo, etc. Dans les premières secondes Todd Haynes demande aux spectateurs de pousser le volume à fond. Ces indispensables décibels ne m'empêchent pas de penser que cette libération sexuelle exposée à grand renfort de strass et de drogues brutales affectait plus le paraître que l'être. La révolution amorcée dans ces conditions accoucha d'un pétard mouillé, science-fiction de pacotille pour midinets en révolte contre la famille, mais qui, leur crise adolescente passée, reprendront le flambeau des aînés. Les cadavres sortaient des placards, mais ils avaient toujours leurs costumes du dimanche.