Mon désir de soleil et de nature est bridé par l'environnement social que constituent les voisins et les amis. Notre quartier de la Dhuys à Bagnolet est devenu une pépinière. J'ai fondamentalement besoin de ces échanges et visites qui enrichissent nos journées. Un nouveau réseau social, Nextdoor, est consacré à cette promiscuité locale. En attendant que se cristallise une nécessaire solidarité nationale, voire internationale, le travail de proximité est une démarche politique indispensable. Ce partage intelligent peut s'exprimer sur le terrain des idées comme dans les vicissitudes pratiques du quotidien. Je crains qu'aller m'exiler à La Ciotat, en haute montagne ou en Thaïlande ne satisfassent pas mon goût pour les échanges intellectuels ou simplement le plaisir de la fête. Entendez par là qu'elle soit permanente et en comité restreint, mais renouvelé !
Le renouvellement s'impose en croisant sans cesse les expériences et les points de vue. Chaque année je perds un ami et j'en gagne un, ou une. Rien de prémédité, juste une constatation, mais le nombre des proches reste à peu près constant. Les désillusions sont terriblement douloureuses lorsqu'il m'arrive d'être trahi par des menteurs ou des lâches, du moins qui se révèlent à la lumière des actes. Il m'est aussi arrivé de rompre, usé par l'absence de réciprocité. Il faut se méfier de trop donner à des personnes ne sachant pas renvoyer l'ascenseur, ils vous le reprocheront un jour ! Les chemins se séparent parfois. La distance est souvent fatale. Nous ne sommes pas d'un bloc, en butte aux transformations que génèrent les nouvelles rencontres ou des évènements qui nous chamboulent. De mon côté, je suis fidèle à toutes mes amours et l'amitié n'échappe pas à ce sentiment, même envers celles et ceux avec qui je suis définitivement brouillé. L'avenir ne remet pas en question le passé, il l'éclaire, c'est tout. Heureusement il y a aussi l'éclair d'une rencontre, l'instant magique où l'on sait que l'on vient de se faire un nouvel ami, pour longtemps. Il faut savoir dire qu'on les aime.
Je n'évoque pas la famille, parce que j'ai déjà raconté que c'est autant celle que l'on se crée que celle dont on hérite qui nous construit. Mais dans tous les cas je me vois mal prendre mon baluchon en abandonnant toutes celles et ceux que j'aime. J'adorerais pourtant refaire le tour du monde, sans le survoler, mais en creusant les rapports qui nous unissent et nous séparent. Les compagnons de voyage peuvent convenir, car le tourisme y est peu propice, ou, sinon, il faut pouvoir y travailler, meilleure manière d'aborder d'autres cultures. Le travail peut se contenter d'une réflexion, mais il implique là encore la rencontre et le partage...