Si le trio Das Kapital a choisi la France comme thématique de son nouvel album, c'est celle de "Mignonne allons voir si la rose..." et non celle de la Révolution de 1789 ou des Gilets Jaunes ! Cette délicatesse ronsardienne tient probablement aux origines des trois musiciens et à la perception qu'ont de notre pays leurs concitoyens. Le saxophoniste Daniel Erdmann est allemand, le guitariste Hasse Poulsen est danois et le batteur Edward Perraud vit à Tours qui n'est pas si loin de Vendôme ! Vive le France a un parfum de baloche du samedi soir, un délicieux accent populaire que n'effacent pas leurs interprétations très libres de Ravel, Satie, Lully, Bizet et que confirment celles de Claude François, Barbara, Brassens ou Trenet. Ils étaient évidement plus revendicatifs lorsqu'ils jouaient Eisler, parfois augmentés d'un orchestre d'harmonie, mais cette douceur angevine se mâtine d'une nostalgie productive lorsqu'ils s'aventurent sur Ma plus belle histoire d'amour, Ne me quitte pas ou La mer. Le ténor respire toujours aussi droit et franc, la guitare égrène sobrement ses notes cristallines et la percussion se fait lourde et grave, prenant son temps en s'affranchissant des jongleries virtuoses, du moins en apparence.


Si la musique est une déclaration d'amour, la photo du trio par Denis Rouvre comme le photomontage de la pochette dû à Christian Kirk Jensen, auxquels ils sont toujours fidèles, se moquent savoureusement de la fierté du coq français. De Gaulle, Louis XIV et Napoléon veillent ainsi sur le répertoire hexagonal en soulignant notre indépendance face au jazz américain, au demeurant excellent. Pas question de signer le TAFTA en musique, cocorico !

→ Das Kapital, Vive la France, cd Label Bleu, dist. L'autre distribution, 12,99€, sortie le 25 janvier 2019