70 Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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lundi 26 août 2019

C'est fini. Il est mort.


Argh ! Une fois de plus la rubrique nécrologique de FB apporte de la tristesse. Grâce au commentaire de Jean Rochard j'apprends hélas la mort de Massimo Mattioli. C'est une de nos pochettes que je préfère. Je m'étais aperçu que la réduction des 30 centimètres du vinyle aux 12 centimètres du CD ratait souvent ses effets. Aussi ai-je cherché à agrandir une petite image. Aucun timbre-poste ne faisait l'affaire. Les images de Squeak The Mouse correspondaient parfaitement à notre spectacle Zappeurs-Pompiers avec la chorégraphe Lulla Card Chourlin et le clown Guy Pannequin. Mattioli nous avait aimablement autorisés à en reproduire plusieurs lorsque nous l'avons enregistré pour le disque.


Jean raconte :
Nos camarades d'Un Drame Musical Instantané avaient eu la bonne idée, pour leur album "Qui Vive ?" (GRRR 1989), de confier la couverture au dessinateur Massimo Mattioli, créateur de M le Magicien, Pinky, Frisk the Frog, Superwest, Joe Galaxy, Awop-Bop-Aloobop et les fameuses aventures de Squeak the Mouse, sorte d'interprétation survoltée (pour dire le moins) de Tom et Jerry avec chat et souris explosivement déjantés. Au dos de "Qui vive", le chat disait : "C'est fini. Il est mort." Mattioli vient de nous quitter.


Hélas, voilà, le petit chat est mort. Et Mattioli l'a suivi.

Ruines d'une époque révolue


Nous avons dû montrer patte blanche avant de pénétrer dans la Section 7. L'usine chimique était incroyablement étendue, les bâtiments dispersés au milieu de la forêt. C'était probablement pour des raisons de sécurité, les accidents se produisant de temps en temps. Il suffisait d'un moment d'inattention, d'une cadence de travail trop soutenue, pour que la nitrocellulose explose et fasse ses victimes. Ci-dessus la tour où se fabriquait l'éther ! Notre guide nous avertit que nous sommes susceptibles de rencontrer un ours, mais nous ne verrons qu'un gros sanglier. Tout est à l'état de ruines. Quel projet pourrait bien investir le lieu ? Un musée ? Un centre artistique ? Avec la désertification des campagnes, on voit mal des promoteurs immobiliers s'y intéresser. En l'état, Viromet fait penser à un parc à thème dont nous serions les seuls visiteurs, aventuriers d'un jeu de rôles où nous serions confrontés à la nature...


Le dépôt ressemble à un temple perdu dans la forêt. Les stèles de ciment font penser à quelque cimetière d'un autre hémisphère. J'enregistre le son des débris de toutes sortes que nous foulons ici et là. Les murs des stockages étaient en briques pour qu'une éventuelle explosion les souffle. La déflagration devait être considérable pour que le plafond soit une dalle flottante capable de s'envoler ! Nous croisons l'ancien directeur venu se recueillir, nostalgique de ce qui est devenu une gigantesque friche.


Nous continuons notre visite en descendant dans le bunker de l'usine. Il y a des masques à gaz dans les musettes accrochées au porte-manteau. Des affiches en couleurs expliquent les dégâts produits par les armes biologiques, chimiques ou nucléaires. On peut y lire la liste des symptômes et celle des antidotes. Ou leur absence ! Je photographie des plans de bombes et j'enregistre le son des lourdes portes.


La chorba quotidienne et les Wiener Schnitzel attendront. Nous filons vers la station d'épuration des eaux en tentant d'éviter les nids de poule, spécialité de la région. Je lis NH3 sur d'immenses containers, c'est de l'ammoniac. Plus loin on fabriquait du méthanol. En empruntant un petit pont nous remarquons un ruisseau orange. De bassin en cuve, nous suivons tout le processus de filtrage de l'eau. Là aussi j'enregistre. J'ai besoin de bruits du réel que je mélangerai à mes machines ou à des instruments acoustiques. Parfois je partirai de ces références essentielles, parfois je me contenterai de fictionnaliser mon évocation d'un événement ponctuel. D'autres fois je serai contraint de réinventer le passé, ne pouvant capter une belle explosion. Une réinterprétation en studio fait ainsi germer la poésie du réel.