Il était plus que temps. Asphyxie de la ville. Besoin de nature. Prendre l'air... Après le premier confinement, l'horizon offert par l'océan avait été un sévère réconfort. Ou l'art d'être grand-père. Les réserves m'avaient mis la puce à l'oreille. Y avait-il encore des puces de sable sur le rivage ? Je sautais à pieds joints sur l'occasion. Après le second confinement, mon tour de France avait précédé le premier séjour de ma vie en hôpital. Autant prendre tout ce qui m'arrive comme expérimental. J'avais rencontré des ami/e/s perdu/e/s de vue depuis si longtemps. Et puis tu m'attendais à la sortie alors que je n'étais pas très brillant. Mais les jours heureux avaient été annoncés par pigeon voyageur. À tire-d'aile. Lin contre lune. Manquait le soleil. De délaisser l'avion, je regretterai celui de l'autre hémisphère qui découpait l'hiver. C'est ainsi. Il faut bien faire des choix en accord avec les idées. C'est ainsi qu'apparut Fontainebleau. Une fontaine comme un tableau. Mieux, une forêt. Les trois pignons, puisque la Chapelle Sainte-Blaise des Simples, la maison de Cocteau et le Cyclop sont fermés pour la saison...


Le tourisme a poli les rochers. Je me suis étalé en gravissant les plus hautes bosses. Rien de cassé. Juste le rappel que nous ne sommes pas invincibles. Tu vois une marque rouge, toi ? Oui, la voilà ! L'absence de feuilles libère le paysage. Les pins s'en moquent. Silence. L'absence d'eau n'attire pas les oiseaux. Les vipères hibernent. Les autres se cachent. Quel plaisir de n'entendre rien que le vent qui se lève et se couche ! Et voir loin... Parce que construire c'est remplir, quand il faudrait vider. L'horizon m'est aussi vital que la voûte étoilée que les lumières de la ville obscurcissent minablement. Comment composer avec le confort de la ville et mon désir du désert ? D'avoir pris des photos m'offre de penser passé l'excitation de l'action. Parce qu'il fallu escalader, sauter, marcher, sans trop réfléchir. Faire le vide. Méditer, pendant ou après ?


Je devrais plus souvent m'extirper du cocon, mais je crains les trajets qui précèdent et suivent le plaisir. À Barbizon il n'y a qu'à arpenter la Grande Rue et s'arrêter à la Maison des peintres. Ils se sont parfois défoulés sur les murs de l'auberge. Je dois bouger. Ma reprise de gymnastique m'aura permis de tenir le coup. Je n'étais pas essoufflé. Mais j'avais chaud. Dehors, où nous étions enfin, c'était l'hiver.