Ce matin je pédalais vers l'ouest. Mon ombre en atteste. C'est même le Far West, en l'occurrence les Rocheuses. Comme chaque jour je suis le train d'un coach bavard dont j'ai coupé la chique, tout comme la soupe musicale qui l'accompagne, même si l'application permet de mixer ces deux sources. Les sous-titres, automatiques, donc traduits à l'emporte-pièce, me suffisent, et j'écoute la play-list de Radio Libertaire ou mes disques choisis pour me donner du cœur au ventre. Ce serait plutôt aux jambes, parce qu'il faut y aller. J'éponge la sueur et je m'hydrate toutes les cinq minutes. Comme je ne prends pratiquement plus l'avion pour des contrées lointaines, ces routes et chemins de terre m'offrent de découvrir des paysages que je n'aurais d'ailleurs jamais empruntés autrement. Le Japon ou Hawaï, les Bermudes ou Tahiti, Chicago ou Washington, le Colorado ou l'Utah, Firenze ou la Norvège... Les promenades ne sont pas de tout repos. Au moins je n'entends plus la logorrhée des entraîneurs et entraîneuses américains qui déblatèrent des lieux communs sur le sport, l'effort et, pire, leurs conseils de vie, en particulier la leur. Après six semaines et cinquante fois une trentaine de minutes, mon poids est le même, mais mon ventre de Bouddha a un peu dégonflé. La graisse se transforme en muscle, qui est plus lourd. Il paraît qu'il faut attendre trois ou six mois pour que cela se voit vraiment. On verra dans un an ! J'ai appris à articuler la cheville et ma résistance s'améliore de jour en jour. En rallongeant mes télomères, je vise une santé de "faire", le véritable pouvoir, le pouvoir faire.