70 Humeurs & opinions - décembre 2008 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mercredi 31 décembre 2008

Réveillonnez avec la police !


35 000 policiers se déploient ce soir, dont 7 000 à Paris, pour s'assurer que le Réveillon se passera bien dans la loi et l'ordre. La ministre de l'intérieur, Michèle Alliot-Marie, espère préserver ainsi "l'esprit festif" qu'elle pense absent des préoccupations des garçons sauvages. Elle se trompe lourdement, tout comme le directeur de la police urbaine de proximité (un titre comme ça cela ne s'invente pas, des fois qu'on la sente trop lointaine), Alain Gardère, qui parle d'un dispositif "montant en crescendo au long de la journée" (le terme est beau comme un feu d'artifices), car il craint les "traditionnels débordements de groupes de jeunes alcoolisés et sous l'emprise du cannabis". Alors là on se pisse dessus, pas qu'on ait trop ingurgité de mousse ni pour éteindre le feu, mais amalgamer alcool et pétards, il faut le faire ! Voilà un demi-siècle que chacun sait que la marijuana aurait plutôt tendance à abrutir qu'à exciter... Il est vrai que la cocaïne est une drogue de riches et il serait dommage que ceux qui s'en ficheront plein le pif dans le quartier des Champs Élysées soient dérangés par des bandes de voyous... Voilà comment le gouvernement justifiera donc le déploiement de policiers "en nombre et mobiles", des fois que la température glaciale tuant chaque jour des SDF ou que le cynisme patronal produisant du chômage comme s'il en pleuvait ne suffisent pas à attiser le feu de la crise ! Bonnes gens, réveillonnez tranquilles, soyez, vos avoirs sont sous bonne garde, la police veille.

lundi 29 décembre 2008

Démence


Lorsque j'entends Dieudonné accueillir le négationniste Faurisson, je repense à ce passage de Shock Corridor où Samuel Fuller montre Trent, le premier étudiant noir admis dans une Université blanche en Alabama, devenu fou à cause de l'accueil qui lui a été fait, se prendre pour un Blanc, fondateur du Ku Klux Klan... What else? Même sans sous-titres, vous pouvez comprendre l'analogie, particulièrement vers la sixième minute de la séquence ! Il y a partout des associations malheureuses, des raccourcis criminels, des transpositions erronées, des justifications monstrueuses, des glissements de démence... L'inconscient joue bien des tours. C'est terrible.
P.S.: l'extrait retrouvé sur Allo Ciné

samedi 27 décembre 2008

Des barreaux aux fenêtres


Depuis trois ans nous avons regardé se construire les lofts en face de chez nous et nos nouveaux voisins s'installer les uns après les autres. Des liens d'amitié se sont créés avec certains. Nous attendons le moment opportun pour faire la connaissance de ceux avec qui nous avons de nombreux amis communs. Les rapports de voisinage sont toujours des questions épineuses. Je me souviens de cette adage sarajevien du temps du Siège : "Dieu te demandera ce qu'il en était de ton voisin et de ton chien." Une de mes voisines ne m'adresse plus la parole depuis huit ans, nous partageons le strict minimum avec ceux qui entretiennent un repli communautaire, la glace se dégèle avec d'autres, mon chat va bien et j'évite soigneusement tout contact avec le prétendu Grand Horloger, la pire crapule de bande dessinée que les humains aient inventée...
Tous les appartements d'en face ne sont pas encore habités. Regardant les ouvriers poser des barreaux à toutes les fenêtres du rez-de-chaussée du lot qui fait l'angle, je suis tombé dans un abîme de perplexité tant l'impression de voir s'ériger une prison m'agresse chaque fois que je mets le nez à la fenêtre. La paranoïa se justifie-t-elle ou est-ce un délire sécuritaire ? Qu'est-ce qui peut bien pousser une famille à vivre derrière des barreaux ? Craignent-ils pour leurs avoirs ? Bijoux, tableaux, signes extérieurs de richesse visibles depuis la rue ? Aiment-ils seulement vivre toutes fenêtres ouvertes, hiver comme été ? Si la plupart de leurs voisins ont opacifié la partie à hauteur d'homme en collant un film sur les vitres, l'un d'entre eux ne s'en est même pas donné le mal, estimant que le passage dans la rue était si rare, surtout la nuit, que rien ne justifiait d'empêcher la lumière de filtrer. Alors ? Le 93 a-t-il si mauvaise presse qu'il nécessite de se mettre en cage ? Les grandes fenêtres sont pourtant conçues contre les effractions, sinon je comprendrais. Des volets exigent qu'on les ouvre et qu'on les ferme, train-train quotidien qui pourrait mettre la puce à l'oreille des voleurs. Je louai, dans l'ancien temps, une maison dont l'une des fenêtres était grillagées. La pièce était sinistre, impression claustrophobe de vivre dans un commissariat. Françoise dit que ce n'est pas sympa pour les autres qui risquent de se faire cambrioler plus facilement, les voyous préférant s'attaquer au plus facile, tout devant être "bouclé" en moins de quelques minutes. A contrario, n'est-ce pas indiquer là où l'enjeu en vaut la chandelle ? Leur assurance exige-t-elle ces dispositions, mais alors quid des quatre autres rez-de-chaussée ? Il est vrai que l'aération n'a peut-être pas été réfléchie. N'y avait-il d'autre solution ? Quoi qu'il en soit la vue de ces barreaux me rend triste chaque fois que je me penche... J'y vois les dents serrées, un filtre inamovible, une muselière qu'il faudra penser électrifier quand les garçons sauvages s'approcheront de la capitale...

jeudi 25 décembre 2008

Une utopie contre le profit, le crime et le gâchis ?

Si le film n'apparaît pas sous FireFox, essayez avec un autre navigateur comme Safari, Navigator, Camino, Opera ou allez directement sur sa page.

Si mes billets semblent parfois longs à certains de mes lecteurs, que dire alors d'un film de deux heures à regarder sur son petit écran ? Je répondrai que c'est le jour parfait pour prendre son temps et même le gagner en apprenant comment marche le monde, d'autant qu'il existe d'autres solutions.
La première partie aborde l'argent-dette qui permettra d'avancer en terrain connu pour ceux qui ont regardé le film de Paul Grignon. Le ton est plus calme, le débit plus posé. Vous vous accrocherez peut-être aux sous-titres pour comprendre comment fonctionne le système, aux mains des banques qui inventent de l'argent qui n'existe pas et créent de façon régulière l'inflation... La seconde partie vous révèlera l'existence des trois carnassiers en charge de "convaincre" les pays récalcitrants : le tueur financier, un corrupteur, les "chacals", assassins anonymes, et l'armée lorsque les deux précédents ont échoué ! Tout le début du film est particulièrement passionnant, la suite est à la fois plus confuse et simplificatrice.
La troisième partie revient sur la privatisation, la dévaluation, l'invention du "terroriste" (à ne pas confondre avec le fictif Al Quaida, qui est en réalité une base de données informatiques des Moudjahdin financés par la CIA dans les années 80) qui va permettre par exemple aux USA de contrôler 90% de l'héroïne mondiale, etc. La cupidité n'est qu'un symptôme. Le mécanisme sous-jacent de tout système économique est constitué de l'argent, du travail et de la compétition. Dans un système monétaire, la rareté accentue le profit. Le Projet Venus, que l'on comprend alors sous-tendre l'ensemble du film, prend en considération les ressources planétaires et les avancées technologiques pour imaginer une alternative au gâchis, au crime et au profit d'un petit groupe sur l'ensemble. On en arrive donc aux énergies alternatives, aux transports de l'avenir et, surtout, à penser la vie planétaire autrement.
La dernière partie est essentiellement dirigée vers un public américain : Dieu y est présent partout, à l'école, dans les institutions, dans les lois, à tous les niveaux de la société... Vous pourrez penser que la démonstration est parfois un peu naïve, mais on imagine mal les États-Unis aussi arriérés intellectuellement (le film est américain, ça rassure sur la Résistance). Attention, ils représentent le modèle ! Penser, réfléchir, rêver. Sommes-nous capables de nous révolter et de changer nos habitudes dictées par le profit ?

J'ignore précisément ce que représente le Zeitgeist Movement, mais je remercie Marie-Jésus pour le lien vers ce film de Peter Joseph qui pourra initier de nombreux débats.

mardi 23 décembre 2008

Le bouquet de misère


La période des fêtes de fin d'année est propice aux règlements de compte familiaux, ou, du moins, elle délie les langues et expose en plein jour les contrariétés ravalées. Non, ce n'est pas toujours une trêve ! À Noël se retrouver ensemble ou s'en exclure exacerbe les sensibilités. Les souhaits s'expriment, et pourtant on ne se fait pas de cadeau. Le jour de la nativité pour les Chrétiens, le spectre de la mort rôde. Les Orthodoxes fêtent Noël le 6 janvier, on est dans les dates. Les Juifs, ayant pour coutume de se plaindre toute l'année et d'aborder de front les questions névrotiques, ne pourront échapper à la tentation ! J'ignore comment cela se passe pour les autres, mais tout rassemblement familial peut être une occasion inespérée de laver son linge sale en famille.
La famille ! Mon père m'expliqua très tôt qu'on ne lui devait rien si l'on ne partageait pas les mêmes valeurs morales avec les personnes concernées. Ascendants, descendants, collatéraux ne pouvaient prétendre à aucun traitement de faveur. La famille dont on hérite et à laquelle on donne naissance est le creuset de toutes nos névroses. Celle que l'on se choisit est autrement plus motrice, elle porte "notre" avenir plus sûrement que les lois du sang. Les deux ont évidemment souvent des éléments communs.
Mais jusqu'où s'étend le cercle de la famille ? Les pièces rapportées, conjoints et conjointes, en font-elles partie ? Lorsque des problèmes surviennent au sein du noyau familial, il est à craindre que leur rôle assigné soit celui du fauteur de troubles et qu'il ou elle devienne de fait le bouc-émissaire, le bouquet de misère comme l'appelait Marianne lorsqu'elle était enfant. Quelle que soit la parenté, les uns et les autres préfèrent souvent éluder la question en reportant leurs reproches sur un tiers plutôt que d'assumer les secrets enfouis, les rancœurs inexprimées, les mensonges idiots qui pourrissent leur vie et continueront à le faire tant que les responsabilités de chacun n'auront pas été assumées, et le pire, c'est que cela se transmet ! Ça se passe comme souvent dans les feuilletons français à la télé : c'est le provincial ou l'étranger qui fiche le souk dans le groupe ! À défaut de pouvoir incarner le mal, il sera le révélateur diabolique des dissensions internes. Devant la peur d'affronter la vérité, fut-elle multiple, par lâcheté ou par bonté d'âme, la fuite ne laisse aucune autre échappatoire que de désigner un coupable qui permette de se rabibocher plus tard entre soi.
Brus, gendres, belles-sœurs, beaux-frères, belles-mères, etc., n'en prenez pas ombrage. Les rôles s'inversent aisément dès lors qu'il y a union, légale ou factuelle qu'importe, c'est le pouvoir des uns sur les autres qui est en jeu. La résistance accule l'autorité à la prise d'otages. La seule échappatoire réside dans l'émission claire de ses vœux. L'expression assumée du désir libère la libido et permet de savoir ce à quoi l'on tient, ceux et celles avec qui nous souhaitons grandir. La famille est un frein dès lors qu'elle nous enferme dans des coutumes dont les usages ne sont plus discutés. On mettra ainsi toute sa vie à savoir qui l'on est, ce qui nous appartient en propre et ce dont nous avons hérité sans le vouloir.

samedi 20 décembre 2008

DTC646, le compte de Madoff chez Clearstream


Pour quelle raison la presse ne parle-t-elle pas de ce qui est advenu de l'argent volé par Madoff alors qu'elle a entre les mains les documents explosifs qui lui ont été envoyés ? Ou bien devrait-on dire : quels intérêts défend la presse pour ne pas évoquer le lien entre Madoff et Clearstream ? Lorsque l'on sait qui en sont les propriétaires, il n'y a pas de quoi s'en étonner. Même le Canard Enchaîné est compromis, on l'a maintenant compris. Seul organe à le révéler, Rue89 dévoile que Madoff a ouvert un compte depuis New York chez Clearstream le 2 novembre 1999. En fouinant un peu sur le Net, on trouverait même le numéro de ce compte qui est aussi entre les mains des policiers et des juges français et qui figure évidemment sur le vrai listing que détenait Denis Robert, Denis Robert qui va continuer à être harcelé par une armée d'huissiers et d'avocats ! Jean de Maillard précise que toutes les banques plantées par Madoff sont répertoriées dans les livres de Clearstream, mais qu'évidemment le secret bancaire en vigueur au Luxembourg empêche de savoir à quel nom est le compte de Madoff, en particulier si c'est la société qui se cacherait au 17e étage de ses bureaux...
Quoi qu'il en soit, le système s'affole, Madoff n'a pas été démasqué puisqu'il s'est livré lui-même par l'intermédiaire de ses fils avec qui il travaillait, manière de les mettre à l'abri, et il est fort à parier que d'autres débordements du système bancaire capitaliste seront révélés dans les semaines qui viennent. Les banques préfèreront-elles continuer à se protéger derrière le secret, profitant toujours des paradis fiscaux avec l'assentiment des états, au détriment de leurs gros clients floués ou bien ceux-ci seront-ils suffisamment influents pour faire éclater un système délirant, révélant au grand jour l'énorme arnaque sur laquelle est fondée tout le système capitaliste ? Quand on pense que certains parlent de manipulation quand les lycéens descendent dans la rue ou qu'éclatent les émeutes à Athènes ou Malmö, c'est d'un comique achevé...

mercredi 17 décembre 2008

Le plus grand escroc du siècle ne serait qu'un amateur


Françoise me fait remarquer qu'il est étrange de reprocher à Bernard Madoff d'être le plus grand escroc du siècle sous prétexte que laissant espérer des profits juteux à ses pigeons il était incapable de rembourser tous ses "actionnaires" alors que tout le système bancaire fonctionne sur la même arnaque. Il avait l'habitude de rembourser cash ceux qui l'exigeaient, mais n'avait pas prévu que la crise génèrerait une demande telle qu'elle dévoilerait le pot aux roses. Si demain, nous nous pointions tous à notre succursale bancaire et que nous exigions de retirer tous nos avoirs, la banque serait bien incapable de faire face à la demande. La différence ressemble à l'écart qui divise les sectes et les religions établies : il n'y en a pas ! Ce n'est qu'une question de proportion, celle de l'escroc est bien moindre que celle de son modèle, l'ensemble du système bancaire. Tous pratiquent en réalité un exercice de haute voltige, de monte-en-l'air, qui ressemble bigrement à la Chaîne de Ponzi.
Ici et là j'entends que cela pourrait d'ailleurs consister en un acte révolutionnaire qui ferait s'écrouler le système capitaliste du jour au lendemain : si nous retirions tous nos avoirs en liquide, les banques, ne pouvant faire face, feraient illico banqueroute. La proposition peut sembler alléchante, mais elle favoriserait évidemment les plus rapides devenus les nouveaux maîtres du monde, à moins que le Capital ne se ressaisisse en inventant je ne sais quelle dévaluation. Des émeutes suivraient immanquablement la fermeture des guichets. Qu'adviendrait-il ensuite ? Reprise en mains par la violence ? Mais de quelle nature ? Je ne suis pas assez calé en économie ni en histoire pour y répondre, mais la question mérite d'être posée...
Car il n'est pas question de moraliser un système immoral. Toutes les affaires récentes révèlent brutalement que le système inique s'essouffle et laisse entrevoir les signes de sa chute. Rien de certain encore, mais scénario parfaitement envisageable.

Photogramme de It's A Wonderful Life de Frank Capra.

lundi 15 décembre 2008

Pour une véritable démocratie ?


Lorsque notre ami Thierry nous a raconté qu'il rentrait d'une réunion de médecins planchant sur un nouveau système d'évaluation, nous sommes immédiatement montés au créneau pour nous insurger contre ces méthodes de nivellement par le bas qui coincent tout dans des cases et excluent les pensées marginales. Mal nous en a pris. L'équipe du GIMROS (Groupe d'Innovations Médicales et de Recherches en Organisations de Santé) réunie autour des phénomènes de santé réfléchit justement à un contre-système qui remet en cause les pratiques usuelles ayant pour caractéristique de ne pas fonctionner correctement puisqu'elles filtrent les remarques iconoclastes qui s'avèrent souvent les issues de ce qui deviendra la nouvelle norme, mais toujours trop tard.
Au lieu de fonctionner à la majorité des voix, ce qui est le propre de toutes les associations et systèmes prétendument démocratiques, leur proposition consiste à prendre en compte les voix minoritaires, ne serait-elle qu'une et isolée, pour aussi fondamentale que celle du plus grand nombre. Il suffit ainsi d'une seule personne rétive ou dubitative pour interroger le groupe. Lorsque tout semble évident, comment se fait-il donc que l'un d'entre nous ne soit pas convaincu ? Le monde de la science, de l'art ou n'importe quelle organisation ont pu vérifier que ce qui semble fonctionner au premier abord sera démenti dans l'avenir ou que l'on perd souvent de nombreuses années pour ne pas avoir écouté une voix isolée, et par là-même étouffée par le nombre. Ils appellent ces résistances et ces doutes "les petits signes". Lorsque ceux-ci émergent, même s'ils semblent absurdes au reste des convives, tout le processus s'arrête pour essayer de comprendre. Il s'agit donc de faire la balance entre les recommandations et les inévitables normes, sans bloquer les processus.
En écoutant l'exposé de notre ami médecin que je rapporte ici tant bien que mal, j'entrevois une alternative au système dit démocratique qui ressemble le plus souvent à la loi du plus grand nombre, système catastrophique qui montre aujourd'hui ses limites. En qualifiant du même pouvoir les voix isolées, le système devient intelligent et pourrait ouvrir une nouvelle voie à ce que l'on a coutume d'appeler abusivement la démocratie. Cette réflexion souligne que chaque individu est différent et ne peut se conformer à un moule unique. On voit bien que dans le domaine de la santé un traitement qui fonctionne pour beaucoup n'est pas forcément efficace pour d'autres. Comment alors inventer un système qui ne soit pas uniforme et exclusif pour intégrer les particularités de chacun ? Chaque individu représentant lui-même un système unique et complexe, celui qui les rassemble ne pourra alors évidemment être réduit au plus petit dénominateur commun, mais se définira enfin dans toute sa complexité, non seulement en n'excluant aucune minorité, mais en s'enrichissant de toutes.

samedi 13 décembre 2008

Le palais des mirages


Faut voir. Les plantes sont vraies. Le palais un faux. Le miroir réfléchit nos illusions. Le lointain est derrière nous. Question de distances. Le passé est immense. L'avenir sans perspectives. Se pencher à la fenêtre est moins dangereux que ne l'indique l'écriteau. C'est une prison. Le demi-tour s'impose. C'est un jardin. L'extraordinaire est sa reproduction. Il y a là quelque chose de morbide. Quelle construction utopique rétablirait l'équilibre ? Aucune. C'est une chute. Il n'y aura bientôt plus d'eau. Il faudrait un arrosoir ou un bon tuyau. Il aura fallu abattre des arbres, extraire du marbre, semer. Reprenons. Sans cesse, c'est ce que nous faisons. Nous ne nous retournons pas, condamnés à répéter les erreurs de l'histoire. Un cas d'espèce. Je ne me vois pas dans la glace. Le cinéma nous a appris ce que cela signifiait. Nous nous entredévorons. Sous son apparence inoffensive l'image est monstrueuse. Un mirage. Une image pieuse. Des pixels sur un écran. La naissance se fait attendre. La réflexion montre un bout de ciel. C'était hier. Pourtant quelqu'un demande : "C'est pour aujourd'hui ou pour demain ?". Les bras m'en tombent. J'ai à peine le temps d'appuyer sur le bouton. C'est déjà fini. Ça vient de recommencer. Faut voir.

jeudi 11 décembre 2008

Le scandale de l'ONU, c'est qu'il n'y en a pas...


J'avais gardé sous le coude cette photo prise du siège des Nations Unies à New York. J'attendais quelque scandale pour en illustrer mon billet, mais le pire scandale est qu'il n'y en eut pas. L'ONU dort sur des lauriers usurpés. Ses objectifs sont censés "faciliter la coopération dans les domaines du droit international, la sécurité internationale, le développement économique, le progrès social et les Droits de l'Homme". On croit rêver, c'est un cauchemar de plus, un canular morbide. Que ce soit en Bosnie, en Tchètchénie, en Irak, en Afrique ou dans n'importe quelle partie du globe où son pouvoir aurait dû ou devrait s'exercer, l'inefficacité n'a de rivale que ses compromissions. Il faut dire que quatre des cinq plus gros exportateurs d'armement sont membres permanents de son Conseil de Sécurité, à savoir les États Unis, la Russie, la France et la Grande Bretagne, le cinquième membre est la Chine qui en est le deuxième importateur, et chacun est affublé d'un droit de veto pour toutes les décisions ! Les criminels ont les clefs du bâtiment. Full Stop.

mardi 9 décembre 2008

L'amour se nourrit des fêlures


Derrière le masque du succès se cachent nos difficultés et nos souffrances. La réussite produit de l'admiration. L'amour, parfois l'amitié, se nourrissent de nos échecs et de notre fragilité. La sensibilité d'un être pour un autre lui permet de voir son véritable visage, celui qui a évolué à travers les âges. La croûte s'est durcie par dessus les cicatrices. Le public ne voit que la puissance qui fait de l'ombre à la lune, l'effet leurre. Le public, c'est le monde, c'est tout le monde, c'est tout un chacun. Celles et ceux qui ne sont pas dupes de notre entrain, de notre bonheur, forment le petit noyau des amis. Parmi eux, l'un ou l'une y voit encore plus clair et perce à jour l'enfant qui se calfeutre jusqu'à lui transpercer le cœur. L'amour vient se nicher dans ces revers, une faille, des pleurs, quelques rires, un lâcher-prise.

lundi 8 décembre 2008

Rafle 2008

Je ne sais jamais si mes lecteurs écoutent les extraits sonores que je place de temps en temps dans mes articles. Cette fois, ce n'est pas une chanson, ni un morceau de musique, mais une lettre lue à l'antenne par un journaliste de France Inter que j'ai reçue par mail. Cela s'est passé le 17 novembre dans une école du Gers. C'est un prof qui témoigne :

Que vous faut-il de plus ?

vendredi 5 décembre 2008

Maux tus et bouches cousues


C'est une pensée récurrente. Je suis chez moi au chaud. Je regarde le jardin. Mes billets m'apparaissent bien légers face à l'actualité révoltante que nous font partager les médias dominants à coups de flashes d'information volatiles ou les résistants de l'ombre révélant les maux tus et bouches cousues. Rafle dans une école en Isère, descente de police dans des classes de troisième avec fouille au corps dans le Gers, accusation sans preuves d'une hypothétique ultra-gauche à Tarnac, méthodes abusives des gardes à vue, projets de cadenasser les asiles psychiatriques ou d'incarcérer les enfants dès 12 ans, surpopulation des prisons avec suicides à la clef, cynisme du patronat, cadeaux somptueux de l'État offerts aux riches sur le dos des pauvres, SDF morts de froid aux portes de Paris, chômage grandissant et faillites des petites entreprises, arrogance du pouvoir pérorant dans la peopolisation tape-à-l'œil, blanc-seing à la brutalité de ses flics, presse aux ordres de ses propriétaires, télévision à la botte de leur ami président démocratiquement (!) élu... Nous sommes débordés par les manifestations d'un régime paranoïaque qui multiplie les effets d'annonce, les coups fourrés et les coups foireux. Et encore ! Je n'évoque ces exemples que dans le cadre serré de la politique nationale. Partout les populations semblent anesthésiées. Mais qu'en sait-on vraiment ? La presse est sous contrôle. On pille les ressources de la planète, faune et flore, on parque les pauvres, on les exproprie, on les affame et on les assassine puisque le lumpen n'est pas récupérable, on les fait s'entretuer pour s'approprier le minerai ou le cacao... Ma plaquette de chocolat a le goût du sang. Les lois de l'entropie sont à l'œuvre. Tout a une fin. Les révolutions ne se produisent que lorsque la faim devient intolérable et qu'un mouvement politique s'organise. Entre faim et fin il n'y a que la rime qui soit riche. "S'ils n'ont plus de pain qu'ils mangent de la brioche !" Dans ses Antimémoires, Malraux raconte qu'en Chine pendant la Longue Marche il n'y avait plus d'écorce aux arbres sur plusieurs mètres de haut, générant, de plus, des dysenteries terribles. Où se produira le débordement ? Aux États Unis où les armes sont en vente libre, lorsque les noirs et les hispanos comprendront que leur président est un fantoche de plus à la botte du Capital, le dernier coup de génie de la CIA ? En Afrique où des millions d'hommes, de femmes et d'enfants sont sacrifiés sur l'autel de l'inexploitabilité ? En Amérique du Sud, seul continent où souffle actuellement une brise de révolte contre le pillage de ses ressources naturelles par le géant du Nord ? En Russie ou en Chine où la corruption se frotte aux modèles conjugués du libéralisme sauvage et des restes du stalinisme ? J'évite d'évoquer l'Australie au risque de comparer notre cas à celui des kangourous et des aborigènes ! Mais que se passe-t-il donc dans notre vieille Europe anesthésiée ? Est-ce la fatalité, l'embonpoint, la superficialité, la compromission, la paresse, la lâcheté qui nous assagissent ?
Mes billets reflètent souvent une consommation (plutôt culturelle mais qu'est ce que cela change ?) qui fait écran à la difficulté d'être et à la responsabilité civile, citoyenne ou simplement humaine. Nous vivons avec nos contradictions. La culpabilité ne résout rien. Seule notre responsabilité peut changer les choses. Notre sens critique doit s'exercer dans tous les domaines, sur tous les fronts. Il y a heureusement des jours où je me laisse aller à l'euphorie et où j'oublie un instant l'horreur du monde des hommes. Je m'étourdis. Tension, détente, pour avancer nous avons besoin de ces deux termes, consonance et dissonance, le yin et le yang ! Comment trouver l'équilibre ? Certainement pas en jouant les trois singes, à nous boucher les oreilles, fermer les yeux et nous taire. C'est dans la rue que se jouera la prochaine manche... De quel côté de la barricade serons-nous ? Quelles flammes nous ranimeront ? Répétition.

Illustration de l'exposition Kiefer au Grand Palais, à deux pas de celui de l'Elysée.

mercredi 3 décembre 2008

sortirdelacrise.tv



Décidément, Pierre-Oscar me gâte. Il m'envoie régulièrement les épisodes du feuilleton réalisé pour la campagne du P.U.M., le Parti Unique de la Majorité. Cinq ont déjà été mis en ligne sur les neuf annoncés. Le premier date du jeudi 20 novembre et s'intitule Envie d'être propriétaire ?


Le début de chaque film est drôle et vise juste. Dommage que la seconde partie fasse retomber le soufflé par son côté plan-plan, avec un ton de voix qui se veut revenir au sérieux. À quoi bon ? Le second clip a été publié le lundi 24 sous le titre Devenez livreur de pizza !


Chaque clip est accompagné d'un petit texte que l'on pourra lire en cliquant sur son titre, cette fois Salaires, ne perdez pas espoir ! du mercredi 26 novembre.


Le PCF se lance dans une campagne par l'absurde. On n'en attendait pas moins d'un organisme dont la ligne tient en effet de l'absurde depuis des décennies, du traîté de non-agression à son alignement sur la politique soviétique, de son adhésion suicidaire au Programme Commun à l'abandon de ses exigences idéologiques au profit de campagnes électoralistes. On peut aujourd'hui juger du gâchis. Il est à craindre que cette amusante campagne ne changera rien à l'affaire. Dommage ! Les idées dites communistes ou gauchistes sont pourtant les seules à faire obstacle au libéralisme sauvage et à l'internationale cynique du Capital. L'épisode du vendredi 28 novembre est Votre santé, c'est important !


Trop individualiste diront les uns, petit bourgeois clameront les autres, je n'ai jamais adhéré à un parti quel qu'il soit. Compagnon de route du PC au temps où c'était un parti de masse et où je sonorisais et musiquais ses manifestations, j'oscillais entre un trotskysme indépendant et un anarcho-syndicalisme salutaire. N'empêche que pendant de nombreuses années, les municipalités où l'on rencontrait de vrais interlocuteurs de la culture étaient toutes dirigées par des cocos et je suis heureux de toujours habiter une ville qui y est historiquement rattachée.
Lundi dernier, c'était Travaillez donc le dimanche !


Aujourd'hui le P.U.M. met un sixième épisode en ligne. Je vous laisse le découvrir en allant sur sortirdelacrise.blogspot.com. Les suivants seront disponibles les vendredi 5, lundi 8 et jeudi 11 décembre...