70 Humeurs & opinions - juillet 2014 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

mercredi 30 juillet 2014

Rap News "Israel-Palestine"


Écrite et réalisée par Giordano Nanni et Hugo Farrant dans la banlieue de Melbourne en Australie, la webserie Juice Rap News aborde des sujets d'actualité avec humour et mordant. Les vingt épisodes mensuels de la première saison ont été diffusés entre 2009 et 2013. Israel vs Palestine - feat. DAM & Norman Finkelstein est le 4ème épisode de la saison 2 qui en comporte déjà six. Pour les sous-titres français appuyez sur l'icône CC ou les deux petites lignes à gauche de la roue crantée :


L'équipe de JuiceMedia est un organe de résistance contre le contrôle d'Internet et les manipulations médiatiques par le biais de la satire rythmée par le rap. Julian Assange, Noam Chomsky, Kristinn Hrafnsson, Sage Francis, Abby Martin, Norman Finkelstein y ont fait des apparitions remarquées et évidemment controversées ! Au delà de l'humour corrosif déployé ces news proposent une vision alternative de l'actualité qui fait fondamentalement défaut aux médias traditionnels. Ça y est, je suis accro, j'ai envie de regarder tous les autres épisodes. Le dernier en ligne sur YouTube concernait la coupe du monde de football, formidable !

vendredi 25 juillet 2014

Sur la question palestinienne


Sur la question juive est un texte de Karl Marx publié en 1844 et considéré comme l'une des premières tentatives pour Marx d'examiner ce qui sera décrit plus tard comme le matérialisme historique. Les réflexions qui suivent, certes quelque peu désordonnées, font suite à des conversations douloureuses ou solidaires avec des camarades dont la sensibilité exacerbée empêchait parfois de prendre le recul nécessaire pour comprendre les points de vue de l'autre.
Nos origines familiales nous rendent particulièrement sensibles aux phénomènes sociaux-politiques qui nous touchent. Par exemple, les Juifs se sentent terriblement concernés par l'agression dont sont victimes les habitants de Gaza. Les moins politisés y lisent un conflit entre deux communautés. Les humanistes et les marxistes condamnent la colonisation israélienne au nom de la morale qui les a sauvés pendant des siècles. Ceux qui s'identifient à leur communauté croient voir une recrudescence de l'antisémitisme en France. Les uns manifestent au nom de principes universels, les autres mettent en avant les cousins qui vivent au Moyen Orient... Dans chaque camp on pourra vous répondre que si vous aviez là-bas quelqu'un de votre famille tué par l'ennemi vous ne pardonneriez jamais et ne penseriez qu'à vous venger. Les faits et leur analyse sont évidemment plus complexes et il est impossible de réduire les opinions aux phrases précédentes.
Reprenons. Nous sommes évidemment plus sensibles à ce qui touche nos origines familiales. Ces derniers temps les Ukrainiens qui vivent à l'étranger étaient plus touchés par ce qui se passe à Kiev qu'aux évènements syriens ou irakiens. Dans les villes du monde où elle est implantée une partie de la diaspora juive est descendue dans les rues pour manifester son désaccord avec la politique d'extrême-droite du gouvernement israélien. Ils ne l'ont pas fait pour le Mali quand les Maliens défilaient. Cela ne signifie pas leur désintérêt pour les autres conflits qui ensanglantent ou affament la planète.
L'antisémitisme existe depuis des siècles. Les Juifs ont souvent été le bouc-émissaire de la misère. L'interdiction d'exercer quantité de métiers dans le passé les ont dirigés vers la gestion de l'argent, le vil métal, et ils riment souvent aujourd'hui avec les banques alors que c'est évidemment une infime partie d'entre eux. L'argent étant devenu le veau d'or de la pauvreté grandissante on peut toujours craindre un amalgame nauséabond ne tenant pas compte des réalités du Capital. C'est un racisme comme celui qui touche les plus démunis, et en France aujourd'hui les Arabes et les Noirs subissent une ségrégation autrement plus forte. La référence à l'extermination programmée par les Nazis produit une paranoïa qui éloigne de toute analyse politique et historique. L'esclavage devrait de même générer de tels ravages chez les Africains et que dire des Indiens d'Amériques ? On oublie facilement les guerres de religion qui ont ensanglanté l'Europe, et celles que seule l'économie suscitait. Les crimes de masse n'ont jamais été générés que par des intérêts économiques. Le racisme n'existe que dans la tête de ceux qui croient à l'existence des races. Être juif n'est pas une race, mais une religion, une religion dont le Christianisme est directement issu. Être chrétien n'est pas une race, pas plus que musulman. Le monothéisme a toujours fait des ravages car il exclut les autres dieux.
Il y a toujours eu des débiles, entendre des individus tenus à l'écart de l'enseignement, pour proférer des insultes ou commettre des actes qu'ils pensent racistes. Dans les cités nombreux jeunes gens confondent l'appartenance à la communauté juive et la politique du gouvernement israélien. L'occupation criminelle dont sont victimes les Palestiniens radicalisent une partie d'entre eux comme ils poussent les désespérés dans les bras du Hamas. Ce n'est pas plus tolérable que les fanatiques du Betar. La responsabilité nous incombe de montrer que les amalgames sont impossibles, d'où par exemple la détermination d'une partie des Juifs à exprimer leur désaveu de la politique guerrière suicidaire que mène l'état d'Israël. En marchant ensemble nous montrons que les Juifs ne sont pas les bourreaux à la solde du gouvernement israélien. De même qu'en Israël nos frères se mobilisent dans tous les camps. La confusion de l'église et de l'état aboutit toujours à des horreurs dont Israël et les pays musulmans aussi bien que les États Unis devront se débarrasser pour ne pas sombrer dans des délires mortifères. Dans nombreux pays d'Europe la religion a encore une place inadmissible dans l'enseignement public. La séparation de l'église et de l'état est une des grandes réussites de la loi de 1905.
Laïc d'origine juive je crains moins l'antisémitisme en France que si je vivais en Israël. Or cet état fut créé par les sionistes qui prétendaient vouloir enfin vivre en paix. Depuis ils n'ont connu que le terrorisme, le pratiquant d'abord pour chasser les Anglais, le subissant ensuite des Palestiniens, le pratiquant encore et toujours pour leur régler leur compte. On me répond qu'il fallait bien que les Juifs aillent vivre quelque part. Mais qu'en est-il aujourd'hui des Palestiniens ? Les pays arabes les méprisent sous les mêmes prétextes fallacieux que subirent les Juifs, leurs frères sémites. Où voulez-vous qu'ils aillent ? Où créer un état palestinien où ils puissent enfin vivre en paix après plus de 60 ans d'occupation humiliante et destructrice ?
À la fin de la seconde guerre mondiale les alliés ont créé un monstre pour se déculpabiliser. Ce monstre n'est qu'un être souffrant dont la paranoïa s'appuie sur ce qu'il a subi. Une névrose d'État s'est emparée de ses ressortissants. Aujourd'hui l'analyse permet à nombreux de s'en sortir. Les autres ont franchi la frontière du passage à l'acte. Il n'y a d'autre solution que de s'allonger sur le divan ou de s'assoir autour d'une table pour régler pacifiquement la question. L'antisémitisme ne disparaîtra qu'en montrant l'exemple de l'intelligence et celle-ci ne passera jamais par les armes.

lundi 21 juillet 2014

Devoir de mémoire


Il y a quatre ans sur mon statut FaceBook j'écrivais "La paranoïa est un suicide programmé". On me demanda de m'expliquer. Depuis 2006, j'avais écrit 4 articles :
Autodestruction
En Israël le communautarisme a enseveli la réflexion politique
Où fait-il bon vivre ?
Neige Nuit Sable Sang
Depuis j'en ai publié d'autres et 3 en particulier :
Ils diront qu'ils ne savaient pas (sur le film Jaffa, la mécanique de l'orange de Eyal Sivan)
Comment j'ai cessé d'être juif (sur le livre de Shlomo Sand)
Apartheid en Israël (sur le film de Emad Burnat, 5 caméras brisées).
J'aurais pu ajouter ceux de Simone Bitton que j'admire pour son engagement et la qualité de son œuvre.

Je me suis mobilisé pour le peuple palestinien il y a 47 ans lorsque j'ai compris que c'était la fin de tout ce que m'avaient appris mes parents, la fin de ma culture, mais pas de ma morale.
Mon père avait sauté du train qui l'emmenait vers la mort et mon grand-père avait été envoyé à Drancy et Auschwitz, gazé à Büchenwald. La politique du gouvernement israélien mettait un terme à des siècles où les juifs avaient su résister sans jamais manier le bâton. Aujourd'hui je me sens moins seul tant les voix d'hommes et de femmes d'origine juive ou pas s'élèvent pour dénoncer l'horreur de la colonisation, la politique d'extrême-droite du gouvernement israélien, le soutien belliqueux et intéressé des USA, la complicité criminelle de notre président paillasson (les ministres qui ne démissionneront pas cette semaine sont bannis à jamais), la couardise de l'ONU, et cette paranoïa du "tuons-les tous avant qu'ils nous tuent !"...


Aujourd'hui, oui, l'espoir renaît en lisant les commentaires de tous les justes qui veulent pouvoir continuer à se regarder dans la glace sans avoir honte. Mais il reste encore du chemin pour libérer les Palestiniens du joug de l'occupant et qu'enfin la paix règne sur cette partie du monde.

mercredi 9 juillet 2014

Intermittents d'Arles


Ils le traquèrent avec des gobelets ils le traquèrent avec soin
Ils le poursuivirent avec des fourches et de l'espoir
Ils menacèrent sa vie avec une action de chemin de fer
Ils le charmèrent avec des sourires et du savon
(Lewis Carroll, La chasse au Snark)

Charles a dessiné le tampon des intermittents il y a déjà quelques années lorsqu'il se battait à Marseille. Les techniciens d'Arles l'ont adopté cette année tandis que la révolte gronde contre le gouvernement qui n'a évidemment pas tenu ses promesses, signant un protocole honteux avec le Medef, et qu'il n'est pas prêt du tout à reconsidérer à la rentrée, ne nous laissons pas abuser. En ne bloquant pas le festival qu'ils soutiennent par leur travail et leur passion, les intermittents savent qu'ils amenuisent leur force dans les négociations à venir, mais la grève n'est pas la seule arme dont ils disposent. Tout reste à inventer. Dans un premier temps, chaîne humaine, vidage de la fontaine Place de la République avec des gobelets, textes projetés en ouverture des Soirées et d'autres interventions ont été préférés ici plutôt que le blocage qui divise les travailleurs et rend impopulaire le mouvement de protestation. Nous avons fondamentalement besoin d'expliquer notre lutte. D'autant que débrayer une journée par ci par là ne touche pas le porte-feuilles des commerçants qui pourraient faire levier sur le gouvernement et le patronat si leurs réactions n'étaient pas si poujadistes et s'ils comprenaient qu'ils seront les prochains touchés. La solidarité interprofessionnelle est plus que jamais indispensable. Nous faisons donc la queue aux ateliers pour faire customiser nos T-Shirts des Rencontres de la Photographie, dont les images officielles ont été dessinées comme chaque année par Michel Bouvet, cette fois un élan violet à bois roses, mais avec en plus la tête de mort à nez rouge imprimée à l'acrylique sur son dos noir. La lutte continue, elle sera longue et difficile, mais la vie d'un artiste ou d'un technicien du spectacle est la lutte de toute une vie, comme celle des photographes dont le statut, hormis quelques rares stars privilégiées, est aussi précaire, sans soutien de nulle part. Les intermittents se battent aussi pour eux.


P.S. : Bonus de la matinée, le reportage de Laurence Peuron auquel je participe d'une part en portant la parole des intermittents d'Arles comme je l'avais fait à leur demande lors de l'inauguration, d'autre part en fond sonore de l'interview de Raymond Depardon aux Prêcheurs, sonnerie aux morts et cloche, hautement symboliques déplacées de leur contexte de 14-18 et propulsées dans la lutte sociale de 2014 !


Et comme cela se passe partout et que cela se prolongera au-delà de l'été, ci-dessus une magnifique intervention des acteurs samedi soir, à Avignon, au Palais des Papes, avant la représentation du prince de Hombourg (la veille la 1° avait été annulée)...

vendredi 4 juillet 2014

Arles râle à son tour


À Arles aux Rencontres de la Photographie les intermittents ont voté de ne pas bloquer les expositions ni l'inauguration de lundi, mais de créer des interventions multiples tout au long de cette journée, et probablement pendant toute la semaine. Comme partout cet été ils sont partagés entre tout bloquer ou inventer des actions qui sensibilisent le public, la presse, les pouvoirs publics et tous ceux qui ne comprennent pas ou disent ne pas comprendre leur lutte. Au delà de ce qui semble se jouer là, il devrait s'agir d'étendre ce statut à tous les précaires, voire à tous les chômeurs, et plus encore imaginer un revenu de base pour toutes et tous. Mais en voyant les radicaux d'un côté et les frileux de l'autre, la question de ce qu'est devenue notre société est préoccupante.
D'un côté les plus radicaux ont la nécessité de sentir qu'ils peuvent faire quelque chose, même si c'est purement symbolique, car pour que ce soit efficace il faudrait toucher le capital au porte-feuilles donc tout bloquer, et pas seulement une journée ; de plus cette action sonne négative auprès de bon nombre de la population et de leurs propres camarades qui désespèrent d'enterrer leur passion en rangeant dans un placard leur outil de travail. De l'autre, les frileux sont tout aussi démunis pour trouver une alternative à la grève, méthode de revendication qui a fait long feu, mais l'un des rares recours légaux...
On peut regretter les votes à l'unanimité où la solidarité s'exprimait tous azimuts, et la grève générale qui nous rassemblait, mais les temps ont changé. La grève telle qu'elle se pratique n'est plus appropriée aux luttes actuelles. Les manifs sont devenues des promenades familiales et les grèves des jours non payés. Le pouvoir se moque des hurlements de la rue tant qu'ils ne le mettent pas réellement en difficulté. Rappelez-vous que nous avons voté majoritairement contre la Constitution Européenne pour qu'on nous l'impose tout de même. Belle démonstration de démocratie totalitaire ! De son côté la coordination des intermittents n'a pas chômé, proposant des solutions que ni le Medef ni le gouvernement n'ont daigné étudier et discuter, préférant agréer un système de plus en plus inique avec la bénédiction d'un président et de son premier ministre que l'on aurait pu croire seulement sociaux-démocrates, mais qu'à la réflexion l'on pourrait imaginer "infiltrés" par la droite explicite ! Rien n'est jamais absurde lorsque l'on a affaire à l'absurdité.
Ma crainte la plus terrible est que le pouvoir se moque de toutes nos actions, grève ou pas, et qu'il faille que nous en fassions tellement plus pour donner à tous et toutes le courage de changer, de changer de vie, de changer de vie ensemble. L'urgence est là. Quelles que soient les décisions que nous prendrons il est indispensable que toutes et tous se serrent les coudes et se creusent les méninges pour inventer des moyens efficaces de se faire entendre et d'empêcher la catastrophe programmée.
Au Théâtre antique la scène accueillera probablement les intermittents avant chacune des soirées du 9 au 12 que nous concoctons avec amour... À suivre.

N.B. : pour plus d'infos, lire ici et .