Sur le site Audiofanzine, dont j'aime beaucoup les éditos de Los Teignos qui ne sont pas exclusivement musicaux lorsqu'ils suggèrent quelques points de vue citoyens, Eric Synthwalker fait une excellente analyse du synthétiseur analogique ARP 2600 M, réplique miniature récemment commercialisée par Korg. Il me donne même envie de remplacer le clavier microKey (offert avec) par un Keystep37 qui ajoutera ainsi séquenceur et arpégiateur à la bête.


Les commentaires allant bon train, j'ai cru bon d'y apporter ma propre expérience :
"J'ai joué et enregistré sur mon ARP 2600 dès 1974. Je l'ai bêtement revendu en 1995. Je l'ai retrouvé avec le petit Korg et tous mes patchs que j'avais conservés fonctionnent à l'exception de ceux qui utilisaient la prise multiple, car il n'y a que 3 prises au lieu de 4, seule différence notée et non signalée par le test. Sa miniaturisation et son ouverture USB Midi le rendent même plus maniable. Je n'ai pas réussi à le contrôler avec le clavier Komplete, mais il faut peut-être que je m'y replonge. En tout cas, c'est bien mon son. Depuis, je suis passé à des machines aux sonorités plus électroacoustiques (c'est déjà ce que je cherchais alors, et les échantillonneurs ont été une bénédiction) sans compter les mémoires qui m'ont fait passer ensuite au PPG, puis au DX7 pour la norme Midi (mais là j'avais perdu la maniabilité). Je pense que l'usage de l'ARP 2600 m'ont appris à jouer (voir de penser) de manière temporellement schizophrénique, à savoir qu'il fallait improviser dans l'instant tout en prévoyant ce qui allait se produire cinq minutes plus tard, et sans cesse évoluer pour être sur le coup. Il m'a surtout enseigné à écouter le monde et à tenter de le reproduire (vainement). J'ignore encore comment je vais me servir du petit nouveau, mes dernières acquisitions électroniques lorgnant vers les machines russes de chez SOMA qui obéissent à des logiques radicalement différentes de tous les synthés que je connaissais jusqu'ici. Le côté intuitif de ces machines sans mémoires offre un jeu physique que ratent les pousseurs de boutons sur laptop !"
Le nouveau manuel ne le dit pas, mais l'ancien soulignait qu'aucun branchement ne pouvait être fatal. Ainsi on pouvait connecter des entrées avec des entrées, des sorties avec des sorties, et écouter le résultat de ces expérimentations en tension. J'espère que c'est toujours le cas, puisque j'ai l'habitude de pervertir les machines pour me les approprier !


À ce propos, mon camarade Sacha Gattino qui utilise essentiellement ses propres sons avec énormément de talent, me demanda il y a quelques années si cela ne m'ennuyait pas d'utiliser des banques de sons du commerce dont tout le monde se sert. Je lui répondrais aujourd'hui de la même manière. Ma façon de les jouer, de les intégrer à mes compositions, doit être bien tordue, car je ne les reconnais jamais ailleurs. J'imagine qu'en les sortant du contexte pour lequel ils ont été conçus, en les associant avec d'autres et avec des instruments d'origines très différentes, tant acoustiques qu'électroniques, je les fais miens. On pourrait se poser la même question à composer pour les pupitres habituels de l'orchestre. J'avoue pourtant jouer essentiellement de certains dont personne ou peu se servent, ne risquant pas ainsi la moindre comparaison ! Mais cela, c'est une autre histoire. La question des citations ne me préoccupe pas non plus, sachant qu'il n'existe pas de création spontanée, mais que tout n'est qu'histoire d'articulations, de situations, et surtout de propos. C'est donc avec ravissement et joie perverse que j'emprunte, en connaissance de cause ou pas, sachant pertinemment que ces clins d'œil restent invisibles à la plupart. Il n'en demeure pas moins que cette perspective du passé légitime à mes oreilles la construction de l'avenir.