70 Voyage - septembre 2010 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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lundi 6 septembre 2010

Du Gouffre d'Esparros à la Petite Amazonie


Il fait trop chaud pour écrire. Pourtant la journée a commencé à la fraîche. Le gouffre d'Esparros présente d'originales concrétions d'aragonite karstique, cristal de roche aggloméré qui fleurit le long des parois ou des stalagtites. J'ai évidemment un faible pour celles que l'on nomme excentriques. Si je me serais passé de la flûte andine dans l'accompagnement audio automatique, je trouve sympathique les percussions enregistrées à partir des stalagmites ou tites qui ont la qualité d'être toujours évidés en leur centre et donc de sonner remarquablement. Sur une île de la Baie d'Halong j'avais eu la chance de pouvoir essayer ces sublimes lithophones.
L'étape suivante fut aussi humide, puisque nous sommes allés nous promener à la Gourgue d'Asque, dite La Petite Amazonie, micro-climat où la végétation est composée de mousses, fougères et essences rares pour une forêt pyrénéenne. Le long de l'Arros, bien maigre en cette saison, volaient quantité de papillons. Sonia cueillit maintes noisettes fraîches et nous picorâmes quelques mûres avant d'aller nous éclater la panse dans une auberge près de l'Abbaye où nos lapins travaillaient sagement devant un public ébahi.
Le spectacle est maintenant terminé et nous devons les renvoyer à leur clapier parisien avant leur prochaine escale à Bruxelles à la fin du mois où ils se produiront dans le somptueux théâtre des Galeries Royales St Hubert.

dimanche 5 septembre 2010

Des distances


La montagne nous fait perdre nos repères d'échelle. Nous ne savons plus qui des promeneurs ou des paysages sont petits. Dans le chapitre Des distances Jean Cocteau suggère qu'il n'y ni grand ni petit, mais seulement du proche et du loin. Je crois qu'il s'agit du Journal d'un inconnu. Nous prenons les rochers pour des vaches et les chevaux pour des moutons. Au lointain nous croyons apercevoir Toulouse. Sur l'autre versant du Pic du Midi, les oiseaux emportent des demi-baguettes entières dans leurs becs. Comme le ciel est dégagé j'en profite pour photographier quelques cartes postales.


Le musée scientifique de l'Observatoire est comme la plupart du temps, un peu ringard et rébarbatif, mais les contributions d'étudiants en arts plastiques y apportent un peu de fantaisie comme Les mites au logis, photographies de culture de mites alimentaires. Le sonoscope en céramique de Hye-soon Seo est un concept amusant même si l'on entend essentiellement les commentaires des touristes qui sont à quinze mètres de nous, sans que ce soit pour autant dans la direction pointée ! Sonia et moi essayons en vain de reconnaître certaines des langues qui se croisent là-haut, à 2870 mètres d'altitude. En fin d'après-midi nous retournons à l'Abbaye de l'Escaladieu où France 3 m'interviewe devant la meute lagomorphe (diffusion ce dimanche midi et soir sur FR3 Midi-Pyrénées)... Sur la route éclairée par les phares la question des distances se pose à nouveau. Les routes en lacet me semblent plus rapides que l'autoroute. Je ne sais pas si nous sommes tout petits, mais je suis certain que nous sommes très loin.

samedi 4 septembre 2010

Jusqu'au cirque de Gavarnie


Après que Sonia ait appuyé sur la touche A de l'ordinateur qui contrôle nos 100 lapins en wi-fi, j'ai encore pris quelques photos de l'installation de Nabaz'mob à l'Abbaye cistercienne de l'Escaladieu à Bonnemazon pour le site dédié à notre opéra. Comme chaque lieu impose une disposition appropriée, j'ai pris l'habitude de publier quelques clichés de ses variations scéniques.
Sur ce, nous avons pris la route du cirque de Gavarnie par le col du Tourmalet. Le temps splendide offre une visibilité exceptionnelle sur les Pyrénées à tel point que nous pensons monter ce matin au Pic du Midi comme on nous le suggère...


Nous ignorions que nous allions marcher puis crapahuter pendant quatre heures, mais l'enjeu en valait la chandelle. Les embruns de la cascade de Gavarnie dégringolant de ses 423 mètres de hauteur furent rafraîchissants après l'escalade des cailloux qui se dérobaient sous nos pas. En redescendant, passé le névé, nous avons repéré que le chemin était bordé de centaines de framboisiers, un délice ! Nous sommes rentrés exténués à l'auberge où l'obscurité offrait un panorama sur les étoiles que nous avons trop souvent tendance à oublier à force de vivre en ville. Ces espaces grandioses nous dépaysent tant que nous avons l'impression d'être partis depuis une éternité.

mercredi 1 septembre 2010

Août au Père Lachaise


Je ne peux pas imaginer faire une promenade au Père Lachaise sans aller saluer le buste de Georges Méliès, le créateur du spectacle cinématographique qui finit ses jours comme marchand de jouets et de bonbons à la gare Montparnasse. Depuis ma dernière visite en avril 2007 le cimetière héberge pas mal de nouveaux pensionnaires ou certains que je n'avais pas encore croisés sur mon chemin buissonnier. Pierre Bourdieu, Alain Bashung, Marie Trintignant, Mano Solo, Henri Salvador, Ticky Holgado ont rejoint la cohorte des immortels qui peuplent ce havre de paix. C'est pourquoi Arman se trompe lourdement...


Comme il est agréable de passer le dernier jour du mois d'août à la campagne par un temps pareil ! Je suis pourtant surpris d'entendre très peu d'oiseaux même si je sais qu'ils ne sont pas loin, quelque part au-dessus de nos têtes. Plus angoissant, nous ne rencontrons pas un chat. L'heure du déjeuner peut expliquer les allées désertes, mais l'absence de gente féline est inquiétante. Aurait-on vidé le jardin de ses hôtes câlins ? Une partie du charme s'est évanouie... Ayant proposé à Marie-Laure et Sun Sun de jouer leur guide, je les ai menés sans répit trois heures durant sur les traces de Radiguet, Proust, Hedayat, Apollinaire, Eluard, Balzac, Nerval, Modigliani, Morrison, Piaf, Colette, Desproges, Chopin et tant d'autres. En vieux Père-Lachaisien, j'évite les guides qui se proposent, ayant toujours préféré me perdre dans le labyrinthe des allées qui portent le nom du dragon ou des chèvres. Tout en bas, près de l'entrée principale rue de la Roquette, de grandes photographies de Jean-Claude Garnier montrent des cimetières du monde entier (exposition en plein air jusqu'au 2 novembre). Ils exhalent toujours un étrange parfum de mystère qui n'a rien à voir avec la mort. J'y sens une formidable pulsion de vie, l'énergie créatrice de la nature, la régénérescence à l'état brut. J'espère que ce n'est pas la troisième saison de True Blood qui me tape sur le système...