Par Jean-Jacques Birgé,
vendredi 26 décembre 2008 à 00:28 ::Théâtre
Quand j'étais petit, mon grand-père m'emmenait chaque année assister à la Parade de la Garde Républicaine. Mon passage préféré était l'escadron motocycliste roulant au ralenti et tricotant d'étonnants enchevêtrements en équilibre sur leurs engins. L'ensemble ressemblait à un défilé militaire à travers les âges. Je crois que Grand-Papa aurait aimé continuer l'armée plutôt que faire le représentant en toile de tente. C'est comme cela que je m'en souviens. Il répétait imperturbablement l'histoire de sa jument qui s'appelait Arlette (comme son aînée !) ou nous donnait des cours théoriques de tir au mortier, surtout si mon cousin Alexandre l'y exhortait avant de prendre le large, nous plantant là. Pour mes exposés sur la Guerre de 14, l'officier de réserve, c'est ainsi qu'il aimait se représenter, me prêtait son casque de poilu, sa citation de blessé à Verdun et ses décorations. Il militait à la Protection Civile. Mon père le provoquait politiquement parce qu'il était resté gaulliste après 1945, il l'appelait Papa, lui dont la mère était morte de la tiphoïde lorsqu'il avait trois ans et dont le père était parti en fumée à Buchenwald. Je l'aimais bien, même si les échanges étaient limités. Je me suis fait réformé ! J'entretenais par contre une vraie complicité avec ma grand-mère que nous appelions Grand-Maman. Il se prénommait Roland et elle Madeleine. Ma mère n'aurait jamais supporté que ses petites-filles l'appellent autrement que Geneviève. Le film transmis par Henri Texier m'a rappelé ses nuits de mon enfance que je partageais seul avec mon grand-père. Ah, la précision suisse, le chocolat, la neige, le paradis fiscal, ça grise !
P.S.: le film ayant été retiré de YouTube, j'en ai trouvé un plus récent...
Par Jean-Jacques Birgé,
dimanche 14 décembre 2008 à 01:38 ::Théâtre
Sachant que Sacha Gattino en avait composé la musique et jouait dedans, vendredi soir nous sommes allés voir Le repas de Valère Novarina à la Maison de la Poésie. Position amusante et inhabituelle, avec plusieurs autres spectateurs je fus invité à assister au spectacle depuis un fauteuil à même la scène. Agréable point de vue qui me permettait en outre d'allonger les jambes, mais qui m'empêchait d'admirer toutes les facéties de mon camarade et collègue situé au-dessus au fond du plateau et faisant éclater des ballons de baudruche avec une fléchette pour sonoriser les coups de feu clouant en l'air les acteurs de la pièce ou jouant d'appeaux rigolos. Je le voyais tout de même nous caresser les oreilles avec son jeu mélodique sur des petits gongs accordés ou souffler dans de drôles d'instruments jouets.
Sacha est un des designers sonores que j'apprécie le plus. DJ inventif de tous les défilés du couturier Issey Miyaké, il réalisa longtemps le design sonore de leur site Internet en collaboration avec le graphiste Étienne Mineur, tout en élégance et délicatesse. Pour Le Repas, il a composé des chansons, drôles et farfelues, dont les rythmes enjoués scandent la pièce, des accompagnements bruitistes fort à propos qui montrent que le théâtre serait bien inspiré de faire plus souvent appel à des compositeurs inspirés et des ingénieurs du son zélés apportant un supplément d'âme, des ambiances immergeantes, des interludes suspensifs ou le contre-champ sonore, antidote à l'illustration stérile. La pièce, hélas un peu trop longue, est traitée sur un mode à la Jarry qui jongle avec la prose inouïe de l'auteur (jusqu'au 21 décembre à 21h)...
Décidément théâtrale, ce qui n'est pas mon habitude comme vous avez pu le constater sur ce blog, la fin de semaine nous avait emmenés la veille au Splendid voir Pascal Légitimus et Mathilda May dans Plus si affinités, un titre et une affiche qui ne laissaient présager la qualité de leur duo drôle et échevelé. Les deux comédiens s'y livrent à un tour de force, enchaînant les personnages comme des transformistes. Je connaissais évidemment Pascal avec Les Inconnus et pour ses rôles à l'écran, mais j'ignorais les talents comiques de sa partenaire qui peut s'adonner ici à un naturel auquel le public n'est pas habitué. On rit beaucoup. Pascal, ici léger et alerte comme un Charlie Chaplin, peut développer un jeu physique auquel ses deux anciens comparses ne l'autorisaient pas (jusqu'au 3 janvier, également à 21h).
Ces deux soirées nous ont aussi montré que théâtre privé et théâtre subventionné ne réfléchissent pas des genres si cloisonnés...
--- 20e année ---
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