70 Pratique - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mardi 19 mars 2024

Printemps précoce


Mes Corètes du Japon sont toujours les premières à sortir à l'approche du printemps, mais cette année elles sont particulièrement précoces et bien portantes. Celles-ci appartiennent à la variété à fleurs doubles Kerria japonica Pleniflora ressemblant à des pompons. À mon entrée dans les lieux il y a vingt-cinq ans, Didier m'en avait offert une bouture lorsqu'il habitait Saint-Denis. Les primevères et les cyclamens (les miens sont d'un vermillon profond, quasiment pourpre) ont également déjà fleuri tandis que les hellebores ou roses de Noël nous gratifient toujours de leur présence. On peut dire aussi que ça commence à bourgeonner, et les merles ont repris leur parade matinale. Ils s'y mettent avant cinq heures du matin, mais une demi-heure plus tard ils sont probablement repartis se coucher. Moi aussi, parfois.
Je dors trois heures et demie et j'ai beaucoup de mal à me rendormir. Je descends travailler une heure et je tente ensuite de retrouver le sommeil, mais cela marche de moins en moins bien. Quatre heures quinze me suffisent pour ne pas ressentir de fatigue dans la journée. Sinon je pique du nez en milieu d'après-midi avec une mini sieste à la clef. Il y a des années que je n'ai pas dormi huit heures. Récemment les rêves ont refait surface. C'est bon signe. Comme le printemps. Et toujours cette référence au roman de Christiane Rochefort, encore heureux qu'on va vers l'été.

jeudi 15 février 2024

Médicament miracle


En 2006 j'avais évoqué ici un film russe de Gennadi Kazansky intitulé Grand-père miracle projeté dans mon école communale à la fin des années 50. [Je pense qu'il s'agit du film Le Vieux Khottabytch tourné en 1956 dont il existe une magnifique copie, hélas non sous-titrée, sur YouTube]. Le vieux magicien y est aussi merveilleux que maladroit ; resté trop longtemps enfermé dans une bouteille, il ignore tout de la vie moderne et multiplie les impairs. Il y a toujours un décalage entre les miracles et le temps où nous croyons vivre. Le mystère et la science se courent après. Le futur n'est jamais à la hauteur du passé s'il s'agit de rêver, car les perspectives y sont dramatiquement ramassées.



Pour peu que l'on soit un peu curieux ou fatigué d'être pris pour une bonne poire par l'industrie pharmaceutique et lobotomisé par les prétentions du progrès consumériste, il arrive que l'on redécouvre les remèdes de bonne femme de nos grand-mères comme le savoir ancestral des tribus d'Amérique et d'Afrique. Pas de querelle ici entre allopathie, homéopathie, acuponcture, médecine chinoise, soins par les plantes, chirurgie, etc. À chaque cas correspond une ou plusieurs réponses adéquates, mais il serait dommage de se priver du voyage lorsque les solutions proposées échouent ou que les effets secondaires sont trop pénibles. Je connais certains médecins, et non des moindres, qui prescrivent du coca-cola, mais je crains que cela doive rester secret !

Car en médecine il n'y a que les miracles qui méritent que les patients s'y attachent. Un médicament miracle, c'est un médicament qui marche à tous les coups sans qu'on n'en comprenne la raison ; c'est d'autant plus drôle quand certains médecins vous regardent avec des yeux ahuris lorsque vous leur annoncez que vous avez été guéris sans suivre le protocole imposé par l'Ordre ou, plus étonnamment, en vous fiant scrupuleusement à leur prescription. Si l'effet placébo est invoqué c'est alors tout l'exercice de la médecine qui en jouit, et tant mieux ! Le seul fait d'aller consulter un praticien et les malades sont déjà à moitié sauvés... Mon père jouait les sorciers en fabriquant des boulettes de mie de pain qui faisaient leur effet lorsque ce n'était pas bien grave. Sérieusement, nombreux médicaments de notre pharmacopée font partie de la panoplie du magicien. Mais si le médicament relève de la pharmacopée chinoise, alors la suspicion renvoie les mystères de l'Orient au Moyen-Âge. Comme si nous n'étions pas fait de la même chair, comme si la Chine millénaire n'avait révélé ses secrets depuis que les marins les ont rapportés sur leurs navires marchands...

Madame Ji, originaire de la province de Guangxi, me voyant me tordre sous les crampes intestinales, sort de son sac une petite fiole en articulant avec un immense sourire "médicament miracle", pour le ventre, le rhume, la nausée, la migraine, etc. Le Spasfon n'est pas mal non plus, mais il n'est pas aussi polyvalent. Je verse la potion noirâtre dans une cuillère en porcelaine. Madame Ji me prévient que le liquide a mauvais goût parce qu'elle imagine que je vais froncer le nez en l'avalant, mais en réalité c'est simplement bizarre. Une demi-heure plus tard tous les spasmes ont disparu. Mon ami Sun Sun me traduit les inscriptions en chinois simplifié de la boîte importée du Setchuan. Ce n'est pas facile, car l'approche médicale est très différente des Occidentaux. Il est question d'énergie, de saturation, de fluidité...

Article du 4 mai 2012

lundi 15 janvier 2024

Histoire d'eau, histoire de flamme


Dimanche matin 5h. Plus d'eau aux robinets. J'appelle la nouvelle régie Est Ensemble qui s'occupe de Bagnolet. Entre temps je vois que ça coule à flots depuis le mur de mes voisins d'en face. À 8h la connexion est rétablie. Le technicien avait fermé par mégarde la vanne qui m'alimente. Cela tombe bien, cet après-midi trente personnes viennent assister à la première d'Apéro Labo, concert au studio GRRR avec Antonin-Tri Hoang et Mathias Lévy. Mauvaise pioche. L'eau a envahi le salon de mes voisins en passant sous leur mur. Ils auront passé la nuit et la journée à écoper. Évidemment les ouvriers doivent couper l'eau pour réparer. On frôle la catastrophe, car cela se passe pendant le magnifique concert que nous enregistrons en vue d'un nouvel album. J'ai préparé à boire et à manger pour fêter cela avec nos convives, du beau monde, et il n'y a pas d'eau à la maison. J'ai heureusement rempli des casseroles, des arrosoirs, des seaux. Personne ne s'aperçoit de rien. Mathias, terrassé par une grippe sauvage, a filé aussitôt la fin de notre prestation. Nos invités s'épanchent autour du buffet. Antonin avait conçu un dispositif astucieux : ayant préparé une playlist de cinq heures, il faisait écouter au casque une minute prise au hasard à l'un ou l'une des spectateurs/trices, libre à lui ou elle de raconter ce qu'il a écouté sans employer de termes musicaux ; nos compositions instantanées consistent à interpréter ces descriptions souvent drôles et poétiques...


Pendant ce temps les équipes de terrassiers se relaient, défonçant le trottoir devant chez nous pour trouver la fuite. L'équipe de nuit s'escrime au marteau-piqueur. Une autre les relève au petit matin. Les tuyaux en fonte qui sont enfouis à 1,10m de la surface ont peut-être une centaine d'années. Le passage des poids lourds dans la rue finit par les fendre et le gel a fait éclater l'un d'eux. Ce n'est pas la première fois. Je me souviens d'un geyser qui avait surgi il y a quelques années devant la porte du garage, à trois mètres du nouveau sinistre. Ce n'est pas simple pour les gars qui creusent, car des canalisations de gaz passent à proximité. Une autre année, un geyser de flamme avait jailli à dix mètres de haut. Très impressionnant et plus angoissant que cette inondation. Tout le quartier est sans eau, et la plupart des riverains n'ont pas été prévenus. C'est étrange qu'il n'y ait pas moyen de le faire. En attendant la remise en eau, je range le studio et les restes de nos agapes. Il reste à tirer les conclusions de cette première, très réussie, pour aborder le prochain Apéro Labo en connaissance de cause. Ce sera le 18 février avec Fanny Meteier au tuba et Maëlle Desbrosses à l'alto. La jauge est limitée, mais on peut m'écrire si l'on souhaite venir (avec certitude), je confirmerai (ou infirmerai) les invitations.

vendredi 22 décembre 2023

Un traditionnel remplace l'infrarouge


Il y a un mois la pluie s'infiltrant par le toit du sauna infrarouge situé au fond du jardin a grillé la centrale électrique. J'ai eu beau cherché partout, il me fut impossible de la remplacer. Alors, plutôt qu'un bricolage hasardeux ou un remplacement de l'ensemble, j'ai choisi de le transformer en sauna traditionnel avec un poêle électrique chauffant des pierres de lave. Conservant la cabine, il suffisait apparemment de le brancher. Le couvreur interviendra bientôt au-dessus et je donnerai les dix lampes infrarouges à Nicolas qui souhaite en installer un sur sa péniche.
J'ai donc choisi ce qui se fait mieux dans le genre, un Tylö, mais ce n'était pas aussi simple que cela. Nordique France, qui importe ces poêles de Suède, impose des conditions techniques réglementaires pour valider la garantie. Or ma cabine a une hauteur de moins d'1,90m, mon câble électrique n'est pas rouge bien que sa section soit de 6mm² ; quant à la ventilation j'en ai découvert les spécifications qu'après avoir été chercher l'objet à Épône (pour m'éviter 250€ de livraison, 17kg plus 20kg de pierres). Éric a fait un trou avec une scie cloche pour l'aération, Frédéric a changé le disjoncteur de 20A pour un 32A, et hop, je peux cuire !
Je dis cuire parce que cela ne produit pas du tout le même effet qu'avec les lampes infrarouges qui donnaient l'impression de bronzer au soleil. Ses 66° chauffaient le corps en surface tandis que le traditionnel monte à plus de 80° et agit en profondeur. L'infrarouge est recommandé pour les cardiaques, ce qui n'est pas mon cas. Dans le nouveau on reste beaucoup moins longtemps. Je me douche à l'eau froide toutes les cinq minutes et je ne dépasse pas trois passages. En Finlande des mabouls font des compétitions à 110°, quitte à y rester ! Le record à cette température est de 3 minutes 46 secondes. C'est tellement débile qu'on dirait un jeu de la télévision japonaise. À 80° on sue quasiment tout de suite. Éric et Juliette m'ont offert seau, louche, sablier, thermomètre, hygromètre, et de mon côté j'ai commandé des produits d'entretien, diverses huiles essentielles aux parfums de montagne et une lampe USB aux couleurs programmables. Nous voilà parés pour l'hiver qui a commencé hier !

jeudi 23 novembre 2023

Les aventures glaçantes d'un sauna


J'ai la douloureuse impression de m'être fait arnaquer, et ce à plus d'un titre. Il y a sept ans j'ai acheté un sauna infrarouge extérieur à la société Atrium Concept. Or récemment un problème électrique a fait griller une partie de la centrale qui alimente les onze lampes, la lumière et l'auto-radio. La société en question, qui s'était bien gardée de préciser que la cabane de jardin était construite en Chine, a arrêté de commercialiser ses saunas pour se focaliser sur les pergolas. Elle m'assure n'avoir aucun contact avec son ancien fournisseur dont elle se dit incapable de me donner ses coordonnées. À l'époque de l'acquisition de mon Andromède 6, j'avais découvert le bol aux roses en recevant une lampe défectueuse depuis Hong Kong. Aucune marque ne figurait sur la cabane en kit, 500 kilos à monter soi-même. Depuis, j'ai profité quotidiennement de la douce chaleur et résolu ainsi partiellement mes problèmes vertébraux.
Hélas, il y a quelques jours, alors que j'étais allongé sur l'une des banquettes, j'ai entendu un krrrrrr inquiétant suivi d'une coupure de courant et d'une petite odeur de brûlé. J'ai eu du mal à trouver un réparateur, mais la société SMIPE m'a donné un rendez-vous rapide. Petit hic, le diagnostic est facturé 195€. J'aurais dû me méfier, surtout après avoir lu les commentaires sur le net, mais je n'avais pas vraiment le choix. Un pisciniste (!) a donc ouvert la centrale électrique, pris quelques photos et m'a assuré qu'il allait remédier à la panne en changeant les composants. Quelques jours plus tard, je recevais un mail m'expliquant que "suite à notre visite technique, nous sommes au regret de vous annoncer que les pièces de votre sauna ne sont plus disponibles. Après recherche nous avons pu trouver un matériel qui pourrait éventuellement correspondre. Nous pouvons tenter d'adapter ce matériel mais cela entraînera des modifications au niveau du sauna et son fonctionnement." Comme je demandai des précisions, on me répondit que "certains éléments du sauna ne seront peut-être pas adaptables tels que la lumière ou la musique. Il faudra aussi changer le panneau de commande qui n'a pas la même forme que l'ancien et laissera sûrement un trou apparent. Cette solution aurait un coût d'environ 2000 euros pièces et main d'œuvre comprises. Nous pouvons par ailleurs vous proposer un devis pour l'installation d'un nouveau sauna ce qui sera pour vous une solution peut-être plus avantageuse financièrement. Dans ce cadre, le prix des saunas varient entre 4000 et 6000 euros. Nous pouvons également nous débarrasser de l'ancien moyennant un supplément de main d'œuvre." Je demandais donc encore une fois des précisions, en particulier en quoi la seconde proposition était "peut-être plus avantageuse financièrement" (!), mais ne reçus plus aucune réponse.
Voilà où j'en suis. J'hésite à chercher un autre réparateur (mais y en a-t-il de réellement compétent ?), à détruire la baraque pour en remonter une autre (aïe, la douloureuse), à transformer le bâti en sauna traditionnel en acquérant simplement un poêle électrique avec des pierres qu'on arrose de temps en temps (peut-être pas si bête, mais où m'adresser ?) ou à transformer mon ancien sauna en abri de jardin ! En attendant je sue sur mon vélo d'appartement en sillonnant les paysages du Bhoutan ou du Costa Rica.

mercredi 15 novembre 2023

Retour sur une extinction de voix


En relisant mon blog qui me tient lieu de mémoire, dans cet article du 10 novembre 2011 je découvre avec stupeur que mon extinction de voix du début de cette année n'était pas la première.

Lao Tseu l'a dit : il faut trouver la voix ! Hésitant à me laisser couper la tête pour connaître la vérité sur l'éclipse totale qui m'a rendu aphone, et préférant éviter les corticoïdes, j'ai opté pour la pharmacopée chinoise des Fils du Dragon, tisane Ganma Ocha et sirop de plantes naturelles Nin Jiom Pei Pa Koa puisque ni l'homéopathie, ni le Maxilase, ni le grog, ni le citron ne faisaient effet. Pas de remède miracle, mais une bonne dose de patience après cinq jours d'extinction vocale. J'avais seulement parlé toute une soirée chez des amis alors que je sortais d'un mal de gorge. Des qualités de l'Allemagne avec Patrick Beurard-Valdoye, des sortilèges de l'adolescence avec une mère désespérée, des cornichons sur la raclette... L'inflammation du larynx empêche mes cordes vocales de vibrer, du moins l'une d'entre elles. On aura tout entendu, je ne dis plus un mot pour ne pas les irriter, ni elles ni personne. Pas de provocation ! Si c'est absolument nécessaire je chuchote, mais les lieux publics occultent mes émissions. Je me terre.

Comme le lotus bleu ne me réussissait pas tant que ça, je googlise mon cas, mail et tchat sont un bon moyen de communiquer sans fatiguer mes cordes vocales, je tape, tape, tape jour et nuit. Un site suggère de faire bouillir sept minutes un bâton de cannelle et... On aurait presque envie d'y croire ! Une tasse, deux tasses, trois, je les bois, fais sonner doucement les basses, si mollement que pour l'instant c'est motus et bouche cousue. Respirer par le nez pour éviter les courants d'air, et surtout pas d'effort inutile. C'est comme un torticolis, on l'envenime à vouloir tester ses limites. Ne rien faire. Je suis toujours persuadé que si je tente la sieste le téléphone va sonner et me réveiller dans les cinq minutes. Bingo ! Le seul de l'après-midi alors que je venais de réussir à m'endormir. Je ne sais pourtant jamais si cela fait longtemps ou pas. Mais c'est pour la bonne cause, façon de parler, ce n'est pas son jour, je suis tout seul et Je fais semblant d'être un autre dans son silence. Bonne nouvelle, une facture va nous être réglée ! Plus moyen de me rendormir. Pour m'achever ou me requinquer je concocte un cocktail avec tout ce que l'on m'a conseillé depuis quelques jours. Pas d'imprudence. Je finis les pots puisque je ne suis pas sourd. Muet, je siffle, pratique le langage des signes et en tout cas m'isole. Trop bien ficelée cette affaire. Lorsque je fais mon Houdini en libérant quelques mots on me fait des compliments sur ma voix, chose qui ne m'arrive jamais en temps normal. Ne pas céder à la tentation. Surtout celle du Taoïsme qui sonne sophisme à mes oreilles. Accepter le sort sans perdre le nord. Direction Tourcoing, Lille, Ostende...

Problème inextricable, j'ai l'habitude de me relire à haute voix pour faire rouler les mots tel un tambour. Ce soir, mes phrases restent collées à la page comme des images pieuses.

mardi 26 septembre 2023

Un aventurier hors du temps


Le grand livre, épais et riche en couleurs, ne s'achète pas. Il se donne, se partage, pour peu qu'on le trouve au détour d'un marché cévenol. Mika, son auteur (anonyme dans l'ouvrage ou sous le pseudo d'Écureuil), en avait laissé une pile en dépôt au magasin bio du coin. Pas de publicité. Il faut simplement le demander. Romuald, un aventurier comme lui, qui vit de peu mais s'active comme un fou, nous l'avait montré avec des yeux émerveillés. [J'écris cet article le 4 août 2011. J'apprends seulement aujourd'hui qu'il s'appelle Mickaël Raimbault, qu'il est diplômé de l’ ENSP (école nationale supérieure du paysage) de Versailles, félicité jadis par le jury.] C'est l'histoire d'un jeune homme qui décide de vivre autrement, en construisant ses habitacles, ses véhicules, réinventant perpétuellement sa vie comme un gamin qui traîne les pieds pour grandir à son rythme. Il en existe quantité comme lui dans les Cévennes, enfants de celles et ceux qui ont quitté la ville dans les années 60 pour vivre proches de la nature. On les croise les jours de marché, comme ce matin-là à celui de Florac. À leur tour leurs choix déboussolent leurs parents qui n'avaient pas prévu que le déracinement allait laisser germer leurs graines sur des planètes improbables. Comme leurs aînés ils portent les cheveux longs et la barbe, les filles semblent danser dans la couleur.


Mika ou Écureuil a choisi de raconter son aventure en publiant un livre bourré de photos et de dessins pleine page. Et de l'offrir à celles et ceux qui voudraient partager son rêve. Il raconte librement les siens. Le récit est impudique. Les lettres de ses parents sont étonnantes. Il ne voudrait rien cacher, de ses émotions fragiles, de ses rencontres magiques, de la gestion de son héritage anticipé. Les 6379,20 kg que constitue le tirage de 5000 exemplaires a coûté 41000 euros. Dépensant entre 100 et 200 euros par mois, il lui en reste encore plus de 100000. Qu'ils soient rentiers ou n'aient pas un sou devant eux l'argent n'est pas le moteur de ces jeunes gens. Ils veulent vivre en respirant l'air pur. Si certains sont RSAstes, ils ne chôment pas. Ce sont des castors insatiables, des constructeurs, des bricoleurs imaginatifs. Cela ne les empêche pas de traverser les mêmes tourments sentimentaux ou métaphysiques que n'importe qui, mais ils n'ont de comptes à rendre à personne...


Comme tous les aventuriers l'auteur est égocentrique. La famille ou l'âme sœur tenues à distance il se répand dans un mysticisme de pacotille, plus kitsch tu meures ! On sautera les pages où le Grand Tou lui fait pondre des vers de mirliton pour admirer ses astuces de bâtisseur, sa fantaisie de jouisseur et son kaléidoscope en technicolor.


L'ouvrage est aussi sympathique que son auteur. Il nous fait retomber en enfance, lorsque nous construisions des cabanes dans les arbres, des ponts de cordes au dessus des rivières, des embarcations de fortune. Les siens ont atteint la taille adulte. Ce n'est pas sans risque, mais vivre comme nous le faisons, sur une terre bitumée à 98%, dans les gaz et la poussière, aux ordres des pandores, sous un ciel sans étoiles et au rythme d'un soleil bègue qui a ses heures d'été et d'hiver, c'est franchement moins folichon.

P.S.: Mickaël Raimbault ne s'est pas arrêté là. Il a récemment construit un bateau en trois mois en Haute-Vienne pour traverser l'Atlantique. Et il donne des conférences sur le paysage...

lundi 4 septembre 2023

La douloureuse


La mauvaise nouvelle de vendredi est arrivée par mail. Six mille euros d'impôts fonciers que je croyais avoir étalés en mensualités, mais qui sont à payer à échéance. Je comprends que plusieurs voisins soient obligés de vendre leur maison pour s'acquitter des charges afférentes. Encore faut-il trouver acquéreurs alors que les banques refusent actuellement quatre prêts sur cinq. L'inflation (due essentiellement à la hausse des bénéfices des entreprises, selon une étude du FMI parue cet été !) est catastrophique. Les prix des denrées de première nécessité ont flambé (ceux des œufs, de l'huile d'olive ou du cacao vont par exemple continuer à grimper). Aucun petit appartement ne se vend plus. Seuls les riches peuvent encore s'offrir de grandes maisons puisqu'ils n'ont pas besoin d'emprunt. Ma chance est d'avoir acheté la mienne en 1999, avec mes droits d'auteur. Une bouchée de pain en comparaison des prix actuels. À cette époque le fuel était à 23 centimes le litre et il y a une dizaine d'années mes taxes foncières ont fait un bond gigantesque suite à une réévaluation. Cela ne s'améliore pas, on ponctionne les classes moyennes quand les pauvres sont exsangues. Mes impôts fonciers ont augmenté de 25% depuis que la taxe d'habitation a disparu. Belle arnaque ! La facture bagnoletaise était déjà très élevée, surtout avec le boulet des emprunts toxiques et la construction de la nouvelle mairie façon Gugenheim Museum d'une précédente mandature. Il faut bien éponger les dettes des mauvaises gestions successives, et la moitié des ménages y ont des revenus si faibles qu'ils ne payent pas d'impôts. La municipalité fait donc casquer les plus riches. Or les vrais riches n'en paient pas, ils ont fait évader leurs bénéfices vers des paradis fiscaux. Le Capital est bien organisé avec le soutien de nos gouvernements. Lorsqu'on a une grande maison comme la mienne, cela revient tout de même à un loyer mensuel de 500 euros auxquels s'ajoutent les frais d'entretien et les dépenses énergétiques. Par exemple cette année j'ai fait isoler le toit et il a fallu réparer les linteaux et traiter le bois contre les termites et capricornes qui avaient fini par s'installer dans la charpente. Des voisins ont le leur qui s'est écroulé. Tant que je peux payer tout va bien, mais j'envisage sérieusement de déménager vers une contrée plus arborée et moins polluée. Or comment concilier mon désir de nature et des liens sociaux de proximité ? C'est le beurre et l'argent du beurre. Salé, bien évidemment. Je ne souhaite pas revenir non plus à la course automobile. J'ai pris goût à la marche à pied et à la bicyclette.
Je ne me plains pas, je témoigne. Comme on dit, tant qu'on a la santé ! Pour la conserver, il est nécessaire d'avoir des activités excitantes. L'abandon de la libido, entendre le désir, c'est la mort assurée. Le renoncement est ce qui m'attriste le plus chez mes congénères. Mûrir c'est s'épanouir. Ressasser "La vieillesse est un naufrage" est d'une rare imbécilité. De Gaulle employa cette phrase à propos de Pétain, cela s'explique. Chaque année qui passe est une bénédiction et une victoire. On apprend à gérer l'adversité, ce que l'on ignorait lorsque nous étions plus jeunes. Quant aux impôts, je repense à ma mère, qui avait traversé bien de grandes difficultés financières, me rappelant que "plaie d'argent n'est pas mortelle". Grâce à la persévérance et à la solidarité, on trouve toujours des solutions. Il faut relever ses manches et ses bas de pantalon. J'enfourche mon vélo, il paraît que trente minutes d'exercice intensif par jour rallongent les télomères !

lundi 7 août 2023

En réparation


Voilà des mois que j'hésite à prendre rendez-vous pour faire changer la batterie de mon MacBookPro sur lequel je travaille toute la journée. Le Mac Mini ne me sert qu'à enregistrer au studio et à télécharger. Voilà des mois que je repousse la réparation à plus tard dans la crainte d'avoir besoin de mon ordinateur pendant la semaine où j'en serai privé. Comme j'espère prendre quelques jours de vacances dans le sud, je me suis lancé. Cela ne pouvait plus durer. Il fallait sans cesse que je surveille que la batterie soit bien rechargée, au risque que la machine s'éteigne en plein boulot. Ces derniers temps, j'apprends à me servir de mon nouveau synthétiseur, le Terra de Soma, une merveille, intuitive à condition de connaître toutes les combinaisons de touches ! J'ai donc moins besoin de mon portable. Continuerai-je à publier des articles pendant la période qui vient ? Lorsque je suis en vadrouille j'ai pris l'habitude de faire une pause du Net. Enfin, pas vraiment, parce que j'envoie parfois des images sur FaceBook ou Instagram.
Pour beaucoup d'entre nous les réseaux sociaux sont devenus une drogue. Le blog est un lien avec l'extérieur, pour quelqu'un comme moi qui travaille à la maison tout en étant un animal social. En vieillissant nous risquons de raréfier nos contacts. Lorsque nous étions étudiants nous croisions beaucoup de monde. En entrant en profession nous avons réduit notre espace de rencontre. Le régime de la retraite est encore plus dangereux. On fait moins appel à vous. Il faut se manifester, occuper le terrain, rencontrer des gens nouveaux, rajeunir sa clientèle et ses collaborateurs.
Je sens souvent que je nage à contre-courant. J'ai toujours nagé à contre-courant. Cela ne change pas grand chose. J'ai de la chance. Il m'a toujours fallu me bagarrer contre les idées reçues. Je fais ce qui me plaît, même si je dois affronter des résistances. Il faut s'armer de patience, prendre le taureau par les cornes, ne pas attendre qu'on vous appelle. Lorsque je regarde en arrière je me rends compte que j'aime tellement créer toutes sortes d'œuvres, y compris et surtout celles où je me sens fragile ou incompétent et qui exigent que je trouve l'issue heureuse qui me convient, que je me réveille chaque matin avec une incroyable envie de vivre. Et de partager cet entrain avec d'autres. Un animal social, je vous disais, qui ne rêve que d'œuvrer collectivement. Une histoire d'amour.

P.S.: réparé en quelques heures par SOSMaster, rue Turbigo !

samedi 5 août 2023

Hygiène et écologie


Je publie cet article uniquement sur cette page, craignant qu'ailleurs (ce blog est habituellement en miroir sur Mediapart, FaceBook, Instagram et redirigé sur X-Twitter) on me confonde avec un représentant déguisé de la marque qui fait déjà beaucoup pour qu'on parle d'elle. Pendant les dix ans où je partageais la rédaction-en-chef du Journal des Allumés du Jazz et que j'écrivais dans Jazz Mag, Muziq, etc., on me prenait pour un journaliste, ce qui avait le don de me contrarier ;-)
En fait, je me suis renseigné, le principe de l'abattant lavant existait déjà, même moins onéreux. La douchette classique est aussi carrément deux fois moins chère, mais moins pratique. Quant aux toilettes japonaises traditionnelles, le must du must, elles coûtent la peau des fesses, parfois jusqu'à trente fois le prix d'un Boku. C'est vrai qu'en plus de laver le postérieur, les plus sophistiquées le sèchent et l'on peut régler la température de l'eau. Ce n'est donc pas l'invention du bidet Boku qui est géniale, mais l'excellence de leur campagne de publicité. En jouant gentiment sur les mots et les images l'équipe commet un humour franchouillard délicat et plein d'esprit, à toutes les étapes de la communication, tutos compris. Regardez la vidéo :


Toutes les questions ayant trouvé réponse avant l'achat, les promesses ont été tenues. La seule surprise à réception de l'engin fut pour moi la nécessité d'acheter deux robinets à 3 voies et un bouchon à vis, accessoires que j'ai trouvés dans un magasin de bricolage. J'ai peut-être mis un peu plus des dix minutes annoncées, car je ne suis pas très doué. La transformation de mes WC en toilettes japonaises était aussi simple au premier qu'au deuxième étage. Au rez-de-chaussée c'est hélas une cuvette suspendue, éloignée de l'arrivée d'eau. Résultat des courses, cela fonctionne merveilleusement bien. La sensation de fraîcheur et de bien-être est confirmée ! Mon récent séjour marocain est certainement pour beaucoup dans mon choix d'acquérir ce jet d'eau orienté. J'avais déjà bien apprécié la casserole d'eau du sud-est asiatique. La quantité de papier engloutie en Occident est un gouffre écologique, et techniquement il certain que c'est beaucoup plus hygiénique. À noter qu'il y a deux jets, un pour les filles à l'avant, un pour tout le monde à l'arrière, et que tout cela, comme l'intensité du jet, se règle simplement avec un gros bouton parfaitement accessible... C'était ma fiche bricolage du week-end.

lundi 17 juillet 2023

Un tabac


Les plants exposés au sud font un tabac. Ses fleurs ont pourtant l'air fané au soleil, mais elles s'épanouissent aussitôt que l'ombre du soir envahit le jardin. D'ornement, leurs feuilles ne se fument pas, enfin c'est ce qu'on dit. Je suis obligé de le croire puisque je n'ai jamais fumé, de tabac. Ma mère corrigeait mes devoirs le Disque Bleu Filtre au bec, la fumée me remontant dans les narines. Comme ce ne fut jamais un interdit, écœuré par des années d'inhalation passive, je ne m'y suis jamais mis, contrairement à la plupart de mes camarades de lycée. J'achetais pourtant des Winston ou des Marlboro, espérant m'en servir pour draguer, mais j'étais si timide que le paquet me durait trois mois, pour un résultat catastrophique. Plus tard je mélangeai les brins de Camel à mes joints. Je n'ai jamais véritablement aimé le goût. Seuls les effets m'intéressaient. Expérimentalement ! Je les roulais avec une machine, m'imaginant probablement ainsi encore en amateur, même après quarante ans de cette pratique. J'ai arrêté il y a une dizaine d'années. Cela ne m'apportait plus qu'une fatigue au réveil. L'odeur du tabac des cigarillos auxquels ma mère était passée m'obligeait à me doucher et changer de vêtements lorsque je rentrais chez moi tant son appartement empestait, même lorsque je n'y restais que dix minutes. À sa mort, quand nous avons vendu son appartement, les livres étaient recouverts d'une poussière brune d'un centimètre d'épaisseur. C'est donc la première fois que le tabac me fait un effet positif. À la tombée du soir je reste en pâmoison devant ses fleurs blanches et roses en pensant qu'un jour mes rêves les plus chers se réaliseront. Soupir ! Cyriaque et Alexandre m'ont donné des quantités de semis dispersés dans autant de pots, beaucoup de fleurs, mais aussi des tomates, céleris, choux, etc. Le lendemain matin les tabacs étaient toujours ouverts. Pendant mon voyage au Maroc qui a duré quinze jours, les bambous avaient poussé de deux mètres en hauteur. Je tente de réguler cette petite jungle. Posséder un jardin redonne un sens aux saisons, aux variations climatiques, à la lutte pour la vie, à notre animalité dénaturée...

vendredi 9 juin 2023

Parade aux moustiques


Les moustiques ont finalement attaqué mercredi soir. Le dispositif de défense et contre-attaque a aussitôt été déployé. J'ai descendu le cadre en bambou du plafond et fixé la moustiquaire pour pouvoir leur tirer la langue toute la nuit. Je dors si peu. Quant à celles qui m'avaient piqué les arpions pendant que je rédigeais mon article, la raquette électrique en a eu raison, quitte à ce que je grimpe sur un escabeau. La lumière bleue attire ces culicidés. Évidemment ça sent un peu le grillé, mais je n'ai rien contre les insectes rôtis. De plus j'adore le petit bruit sec et les étincelles qui l'accompagnent.


Jonathan avait regagné New York la veille, juste à temps. Sa technique est tout autre. Il fait tourner un ventilateur toute la nuit. Cela fait du bruit et consomme inutilement de l'électricité, mais c'est aussi efficace. En Asie du Sud-Est nous ne prenions jamais de chambres avec l'air conditionné, mais celles avec un grand ventilateur au plafond. Cela nous épargnait aussi des rhumes et des maux de gorge. J'ignore s'il y a des moustiques dans le nord du Maroc où nous nous envolerons bientôt, et si oui, quelle technique utiliser ?

vendredi 5 mai 2023

La stratégie du buffet


Une amie qui m'avait invité [...] au 20ème anniversaire de Courrier International au Théâtre de l'Odéon me fit courir un risque insensé en me laissant seul quelques minutes près du buffet. C'est un vieux truc d'enfance, je n'aime pas les bulles, mais j'adore goûter tous les petits fours de manière déraisonnable. J'avais sagement commencé à faire la queue pour le risotto jambon cru et les blinis au gravlax, mais les vieux réflexes ont pris le dessus et je me suis souvenu de la stratégie du buffet, consciencieusement élaborée à une époque où nous ne mangions rien d'autre que des pâtes, du riz ou de la purée mousseline, le tout assaisonné de sauce de soja. Il faut donc repérer où la cuisine a été installée et suivre le trajet emprunté par les serveurs jusqu'au buffet proprement dit. On fera parallèlement une petite étude psychologique du personnel pour identifier si certains joueraient les complices ou si une interception est envisageable sur leur chemin. Sinon il suffit de se planter à proximité de la table, sans s'y coller. On se sert, d'abord deux ou trois pièces à engouffrer successivement, et l'on s'éloigne pour laisser les autres convives en profiter, on passera même galamment une fourchette, et l'on effectue un petit tour avant de reprendre place au second rang. Il serait déplacé d'attendre les plats ; laisser repérer ce petit manège manquerait d'élégance ! Celles et ceux qui bloquent l'accès aux mets vous laisseront heureusement vous glisser. La stratégie consiste à évaluer la fréquence de présentation des plats, car les maîtres d'hôtel ont tous leurs manies, certains préférant tout apporter, d'autres distiller soigneusement les plateaux au fur et à mesure de la soirée, mais la fréquence est toujours régulière, ou du moins elle obéit à une logique. Lorsque nous étions nombreux, je suggérais à mes camarades de se mettre derrière moi en file indienne et je leur passais les canapés par dessus l'épaule sans avoir besoin de me retourner. J'ai le bras long !
Un jour à l'Opéra Garnier j'ai assisté à une démonstration de haute stratégie pour se faire servir au bar lorsqu'il y a foule. Un homme hèle le garçon un gros billet à la main : "Combien je vous dois ?". Le barman est irrésistiblement attiré par la grosse coupure qu'il ne peut pas laisser filer d'autant qu'elle est tendue de loin dans la mêlée. Ne se souvenant plus de ce qu'il a servi, et pour cause, il demande illico pour quoi. Le client annonce alors : "Deux whiskys". Surprise du garçon : "Mais nous n'en avons pas !". Réponse du petit malin : "Cela ne fait rien, donnez-moi deux Cocas !". Un autre breuvage absent de la carte fera aussi bien l'affaire...
Je suis rentré un peu honteux de m'être goinfré, pas tant pour la Holding LMPA (Courrier International, Le Monde, Télérama, etc.), mais pour mon régime qui a déjà subi cinq jours d'épreuves culinaires la semaine dernière dans le sud-ouest !

Article du 10 septembre 2010

mercredi 11 janvier 2023

Les yeux de la tête


Depuis cet article du 13 mai 2010 cela ne s'est pas arrangé. Tout va très vite. Trop vite. Le marché fait s'emballer les produits technologiques. Beaucoup vivent sous perfusion informatique. On s'imagine que chacun/e est joignable à chaque instant. Comme si on emportait son smartphone sous la douche. Dans ma grande maison je ne veux pas l'avoir en permanence dans la poche, alors je rate les appels. Il faut que je sois loin de Paris pour accepter de sortir sans. Me reconnecter à la nature, à l'instant présent est devenu une épreuve que je réussis heureusement aisément, mais pas assez souvent. Ayant choisi des sonneries personnalisées, je réponds tout de même systématiquement à de rares numéros. Pour le reste je tente le silence ou je diffuse la musique à fond, à en faire vibrer les murs et les plafonds. Il y a pire que nos cerveaux anesthésiés, ce sont les dégâts humains et planétaires que la consommation folle leur fait subir, comme les mines de métaux rares dans des pays où la colonisation a pris un nouveau visage, mais cela vous le savez et je rabâche, complice de tout ce gâchis.

Enfant, j'admirais l'énorme bande magnétique enfermée dans son boîtier plastique que ma tante Catherine m'avait rapportée d'IBM où elle travaillait. Je la regardais comme une relique parmi les dizaines de souvenirs qui ne servent à rien et que l'on conserve pieusement dans des tiroirs ou des boîtes en carton. Mon père avait fait mumuse avec un ZX Sinclair, j'avais utilisé quelques systèmes dédiés à la musique comme la console Yamaha CX5M, mais mon premier véritable ordinateur fut un Atari ST et ce n'est qu'à l'acquisition de mon premier PowerBook que je fis le grand saut dans l'informatique. Jusque là, n'étant pas un gamer, les jeux d'arcade ne m'avaient jamais passionné, de même que les traitements de texte et tableurs ne me convainquirent que lorsque l'ordinateur devint portable. Un nouveau monde s'ouvrait à moi, répondant aux rêves de l'enfant qui avait été plongé dans les lectures de Jules Verne. À l'arrivée de l'iPhone, j'eus le même sentiment d'un objet qui allait révolutionner les usages. En retrouvant la facture de mon premier Apple qui date de 1992, je me rends compte des sacrifices qu'il avait générés. D'après l'indice de l'INSEE, cela équivaudrait à 6 550 euros d'aujourd'hui ! Le PowerBook 170, haut de la gamme portable d'Apple, embarquait 4 Mo de mémoire vive. Pour les applications gourmandes, nous utilisions de la mémoire virtuelle amputant celle du disque dur de 40 Mo. Vous avez bien lu, ce sont des mégas ! Évidemment, tout cela se passant bien après le cahier de brouillon, le stylo plume, la machine à écrire, la règle à calcul, la table de trigonométrie et la calculette de poche, j'ai gardé le goût pour le calcul mental et la réflexion équilibriste sans autre accessoire que les cinq sens qui me furent légués à ma naissance. Si je mets en ligne cet article en cliquant sur l'image appelée bouton en langage informatique, cela ne m'empêche pas de pédaler sur mon [vélo] ou de prendre mes jambes à mon cou jusqu'au prochain whisky bar, oh don't ask why, oh don't ask why !

lundi 26 décembre 2022

En selle !


Après l'horrible grippe qui m'a assailli, comme beaucoup de camarades, dix jours d'affilée, j'ai surtout une extinction de voix tenace. Autour de moi, il y en a que cela repose. J'avais repris l'habitude de parler seul, des commentaires entre moi et moi, histoire de valider que j'étais bien là, bien à ce que je faisais, et pas ailleurs, dans mes rêves, avec cette manie de toujours faire plusieurs choses à la fois. Ne pas pouvoir l'ouvrir me met dans une situation univoque, ne pensant que dans l'unicité, sans possibilité de dialectique, interne évidemment, mais externe également puisque ne pouvant rien émettre on ne me rétorquera rien. Mon goût du partage s'en trouve fortement lésé. Je peux toujours écrire, mais le délai de réponse est à l'échelle de celui de l'émission. J'ai remplacé mon vieil iPhone par un aPhone de dernière génération. Il paraît que murmurer retarderait la guérison. Je trouvais plutôt amusant de prononcer lentement les syllabes sur un souffle, mais, bon, je n'en ferai rien. Sauf urgence.
D'urgence il n'y en a plus. La semaine qui se profile devrait être calme. Le toit de la maison a été isolé, traité, consolidé. Il était temps. C'est réglé. On dit "comme sur du papier à musique", mais on sait bien ce que je fais des lignes à longues portées. Les usines fonctionnent au ralenti. Il aura d'ailleurs fallu treize mois pour qu'un pressage en sorte. Le vinyle allemand Toxic Rice avec la pièce Très toxique d'Un Drame Musical Instantané sur la face A et Es Gibt Reis ! de Kommissar Hjuler und Frau sur la B traversera bientôt la frontière. Je possède quatre exemplaires de la version de luxe avec vitrine 30x30 cm, quatre sculptures uniques produites par le label Psych.org. J'ignore qui cela peut intéresser par ici. Je ne suis pas marchand d'art. Par contre il est très probable que nous mettions en vente quelques exemplaires d'une version réduite à la Face A, celle du Drame, sous label GRRR. De l'autre côté un noir immaculé, comme un "mirnoir". Trois éditions différentes du même vinyle à une époque de ralentissement du marché, c'est étrange. Il y en aura pour toutes les bourses. Notre enregistrement a été réalisé le 21 décembre 1976, juste avant Trop d'adrénaline nuit. Ce sont les premiers balbutiements d'un nouveau bébé. Quelle énergie ! Dix-neuf minutes où je joue de l'ARP 2600 et des cassettes, du sax alto, de la flûte et des trompes, de la guitare, de la mandoline et du frein, de la percussion... Avec Francis Gorgé à la guitare électrique et Bernard Vitet aux percussions, appeaux, sax alto, trompette à anche, violon et frein. Le frein est un instrument électrique qu'il avait inventé, une sorte de contrebasse à tension variable, comme un immense gopitchang. La trompette à anche était aussi une idée à lui. J'avais remasterisé la pièce l'année dernière.
Je digresse, par impatience, alors qu'on a tout le temps. Rentré à la maison je me suis remis en selle. Avec la crève cela faisait quatorze jours que je ne l'avais pas enfourchée. Cela fait un bien fou. Comme le Phó que j'ai commandé chez Dong Huong. Cela vous remet son bonhomme d'aplomb. À midi, en gare de Nantes, j'avais été obligé de mettre mon déjeuner de Prêt à manger à la boîte à ordures. Ce que j'avais avalé est passé en rentrant, grâce au Gaviscon. Tous les commerces viables étaient fermés. Pour les commentaires réclamés par la SNCF je n'ai pas manqué le couplet sur l'accueil des contrebasses dans les rames. Quelle honte ! Je passe du coq à l'âne, mais quand on n'a rien de particulier à faire on se disperse sur mille petites choses en ayant l'impression d'avoir perdu son temps. C'est que je compte faire cette semaine, perdre mon temps. J'avais bien commence il y a deux semaines avec la grippe. Il faut que je profite de ma lancée, à commencer par dormir. Il semble que la mélatonine fonctionne. Je tiens au moins cinq heures. Quel progrès ! On verra si je suis à la hauteur de ma paresse revendiquée et d'une procrastination aussi peu prouvée. L'idée des prochains jours est donc essentiellement de me requinquer.
Pourtant, me relisant, mieux, tentant de numéroter mes abattis, je ne suis pas certain que ma grippe soit totalement passée. On dirait que son virus s'est inspiré de celui de sa cousine, la Covid. Chacun, chacune, y fait face à sa manière, en fonction de ses propres ressources, mais je note que plusieurs fois il m'a semblé que c'était terminé, et cela repartait le lendemain, de plus belle ou sous une nouvelle forme. En tout cas, ça vous déglingue et ce n'est pas un petit épisode.

mercredi 21 décembre 2022

Ascenseur !


Ma nièce devait avoir trois ans lorsque sa maman lui demanda d'appeler l'ascenseur. Prenant la chose à cœur elle cria de toutes ses forces : "Ascenseur !".
[L'aînée avait grandi et n'était déjà plus l'as en sœur ;-)]
Quelques années plus tard, elle fera comme tout le monde, elle appuiera sur le bouton. J'avais douze ans à mon premier voyage aux États Unis quand je découvris qu'il n'y avait pas de treizième étage. On passait directement du douzième au quatorzième. Trois ans plus tard, le liftier nous emportait directement jusqu'à l'appartement improbable que l'on nous avait prêté sur un toit de Manhattan, encombré de Moore, Arp et de Calder ! Dans l'ancien hôtel de chasse de Richelieu de la rue Vivienne j'empruntais le vieil ascenseur en bois verni pour monter au troisième où mes parents louaient une partie d'un meublé au-dessus d'un cercle de jeu. Rue Léon Morane notre rez-de-chaussée en gravier aggloméré escamota la cabine. Rue des Peupliers je préférais l'escalier qui allait toujours plus vite à un âge où l'on monte quatre à quatre et où l'on saute des demi-étages. Route de la Reine notre neuvième nous épargnait la grimpette sauf les jours de panne. Rue du Château notre jeunesse nous rendait forcément paresseux. Rue de l'Espérance j'avais pignon sur rue. L'ascenseur du boulevard de Ménilmontant était beaucoup trop capricieux pour être pris autrement que lorsque nous étions chargés... Anh-Van s'est d'ailleurs retrouvé coincé dedans au mois d'août avec personne dans l'immeuble. Il avait calculé combien de jours il pourrait tenir en buvant son urine. Les ascenseurs m'ont toujours fait penser à des cercueils en route pour les étoiles ou les ténèbres, un sous-marin renversé, une cellule pas si moderne. Le mari de Claudette avait eu le temps de sauter avec sa môme avant qu'il ne s'écrase en bas...
Ces pensées se télescopaient tandis que je quittais le magnétiseur. En général, je grimpe avec et redescends sans [...]. Habitant une maison à quatre niveaux, j'ai l'impression de vivre en abscisse et ordonnée pour entretenir ma santé. Si un jour je construisais quelque part un ascenseur je voudrais qu'il soit suffisamment grand pour en faire une pièce à part entière, chambre ou petit salon avec vue sur la nature ! Mais rien de tout cela ne vaudra jamais le garçon d'ascenseur des Galeries Lafayette de mon enfance, annonçant les rayons à chaque étage, dont celui des jouets... Et Bourvil de chanter en 78 tours, sa mélodie suivant aller et retours : "Ça monte toujours en l'air, puis ça redescend en bas !"

Article du 15 avril 2010

lundi 19 décembre 2022

Grippe et sommeil



Cela semblera évident pour certain/e/s, mais il faut parfois se coltiner l'expérience pour comprendre ce qui est en jeu, en l'occurrence le sommeil et le rhume, a fortiori la grippe. J'ai beau tourner cela dans tous les sens, et suivre le mouvement dans mon lit, changer souvent de position ne produit pas d'effet positif, bien au contraire. Il n'existe aucune bonne solution. L'obturation des fosses nasales altère les facultés de bouger à tel point que je le vis de manière claustrophobe. Le principe des vases communicants appliqué aux narines permet d'aborder le sujet de manière objective. De même, l'impression de suffocation empêche de traiter la question de l'insomnie potentielle. C'est fichu, quelle que soit la médicalisation adoptée.
À noter que les conseils amicaux reproduisant sa propre ordonnance tiennent du matérialisme mécaniste en négligeant le travail des professionnels qui ont peaufiné une recette appropriée à un individu bien précis. Exemple : le fait que je sois potentiellement asthmatique m'empêche d'utiliser certaines huiles essentielles qui ont fait leurs preuves pour d'autres. Il n'empêche qu'il existe des produits magiques, en allopathie comme en homéopathie, là tout le monde n'est pas d'accord et ses adeptes sont pris pour des gogos bénéficiant de l'effet placebo, mais je ne cherche nullement la polémique, allez en parler à mon cheval ! D'un continent à l'autre certaines pratiques peuvent sembler contradictoires tout en ayant prouvé leur efficacité depuis parfois plusieurs millénaires. Enfin malgré mes sérieux doutes sur la qualité des vaccins promus et la probité des laboratoires pharmaceutiques, il est hors de question que je me coltine un Covid ou une grippe carabinée dans les années qui viennent, je me ferai donc piquer, n'ayant pas grand chose à en craindre à mon âge !
Je cherchais donc à bien dormir alors que j'avais le nez pris. C'était forcément un vœu pieu. La première chose à régler était de m'éviter de consommer deux boîtes de Kleenex en une seule nuit ou d'être victime de quintes de toux toutes les deux minutes. Passé ces périodes critiques on peut retrouver une fluidité de positions de sommeil propre à chacun/e. Ce n'est pas tout ça, je me suis levé au milieu de la nuit pour me débarrasser de ces réflexions qui me trottaient dans la tête, mais j'y retourne, évidemment perturbé par quelques éternuements, toux, irritations de la gorge et obstructions nasales très contrariantes. Quant à la pharmacopée ordonnée elle fut tout simplement en rupture de stock, aussi le commerçant crut bon de me refiler un sirop aux plantes totalement inefficace. M'étant couché très tôt en espérant rattraper mes cinq nuits blanches, à trois heures du matin j'étais donc debout à taper ces mots au coin du feu que j'avais heureusement préparé. Plus tard un voisine m'apportera du Néo-codion en espérant que cela atténuera les quintes de toux qui m'empêchent de dormir et m'épuisent, dos au sol. D'ailleurs je n'ai plus de voix, ce qui pourrait plaire à certains de mes proches !


En y repensant je me demande comment samedi j'ai réussi à enregistrer la musique de Pierre-Oscar, bégayant Ah vous dirais-je maman et un leitmotiv de quelques notes sur divers instruments d'époque. Sur sa photo je me trouve bien fatigué et pâlichon. Ce n'est pas qu'une impression en ce septième jour d'absences !

mardi 13 décembre 2022

Circonflexe


Il fait froid. Tout le monde le sait par ici. Je brûle quelques bûches dans l'âtre. Trois accents circonflexes dans une phrase indépendante. Étonnant pour un diacritique exprimant une suppression. Sur un autre plan on en rajoute tout en haut. Les couvreurs vont insérer de la laine de verre entre les tuiles et le placo. Le toit aussi est circonflexe. J'y grimpe rarement, mais c'est toujours magnifique et surprenant de regarder le quartier sous un nouvel angle. Le 14 juillet nous nous asseyons sur les tuiles faîtières lorsque tombe la nuit. Sur le toit on trouve souvent des coquilles de noix ou des os que les corneilles ont lâché pour les briser et s'en repaître. Il fait froid. C'est rassurant en cette saison.
J'avais une autre idée en commençant cet article, mais je l'ai perdue en route. Peut-être pensais-je évoquer les films que j'ai regardés calfeutré ? Desquels me souviendrai-je ? She said de Maria Schrader est de facture plus classique que ses précédents, façon enquête journalistique d'inquisition à l'américaine, mais le sujet est d'actualité, l'affaire Weinstein ayant généré toute la vague MeToo & Co; il y aura un avant et un après. Les Nuits de Mashhad (Holy Spider), excellent thriller sur le machisme, aurait-il pu être réalisé si Ali Abbasi avait été iranien au lieu de danois d'origine iranienne ? La nuit du 12 de Dominik Moll est un bon polar français qui annonce la couleur en intro, énigme non résolue, c'est triste. Amsterdam est un film loufoque de David O. Russell avec des comédiens qui ont dû bien s'amuser, j'aime bien les films loufoques, mais ce n'est pas du niveau des Rois du désert ou de Happiness Therapy du même réalisateur. Armaggedon Time de James Gray est très fin, comme d'habitude. Ce n'est pas le cas de As Bestas de Rodrigo Sorogoyen, insupportable, trop de violence imbécile et de racisme ordinaire même si c'est le sujet. Ce ne sont pas des critiques, juste un pense-bête. J'ai trouvé intéressant Moonage Daydream sur David Bowie, bonne utilisation du 5.1. Par contre Tár de Tood Field est caricatural de l'autorité abusive d'une cheffe d'orchestre. J'en ai vu beaucoup d'autres. Trop. J'en oublie beaucoup. Circonflexe et circonspect. Il faisait trop froid pour que je grimpe plus haut photographier les deux pentes !
C'était peut-être une autre idée. Je ne me souviens plus de rien. Semaine rock déglingué. Essais techniques avec ma nouvelle pédale d'effets Eventide, la H90. Week-end grand-père de garde. Musique de film à enregistrer aujourd'hui mardi. L'emploi du temps pourrait ressembler à une période de fêtes dès demain. Sauf qu'en fin de journée je découvre, un, qu'Eliott ou son père m'ont refilé leur crève, deux, que la chaudière est tombée en panne ! J'ai beau anticiper, préparer, rêver, rien ne se passe jamais comme prévu. Cela fait partie du jeu. Trouver des solutions à des problèmes qui n'en sont pas. Qui n'en sont plus. Forcément. L'un après l'autre. Ou bien tous en même temps. La liste des choses à faire est un puits sans fond. C'est vivre, et rêver.
Et me voilà à rajouter un nouvel addendum au moment de publier. Le dépanneur est resté de 21h30 à minuit. Conscience professionnelle. Cela remonte la moral de rencontrer des personnes qui aiment se sentir utiles, comme dans la chanson écrite par Roda-Gil que j'ai fait écouter à Stéphane cet après-midi-même...

jeudi 8 décembre 2022

Surtout pas Fedex


Les entreprises dans leur routine font parfois preuve d'une telle mécanorigidité qu'elles sombrent dans une incompétence incommensurable qu'aucun humain, fut-il le pire imbécile, ne saura jamais égaler. On nage alors dans le vaudeville kafkaïen qui mérite qu'on en rit plutôt qu'on en pleure. On raconte d'ailleurs que Franz, juché sur un tabouret, avait du mal à lire à haute voix son Château tant son roman le faisait se bidonner. La mésaventure dont sont aujourd'hui victimes certains clients de Fedex explique ainsi pourquoi je n'ai jamais reçu un instrument de musique envoyé d'Allemagne et arrivé en France près de chez moi, malgré mes doléances dûment formulées. L'entreprise américaine spécialisée dans le transport international de fret qui avait égaré mon colis ne s'expliqua ni ne s'excusa jamais. La taxe douanière avait même été réglée, ce qui ne m'empêcha pas de faire le deuil de cet achat réalisé deux ans plus tôt sur KissKissBankBank. Pour avoir subi les affres des transports routiers et aériens lorsque nous tournions avec Nabaz'mob, notre opéra pour 100 lapins connectés, je sais à quel point les chauffeurs sont doués de fantaisie ambulatoire...
Il y a donc une dizaine de jours fut livré à mon domicile un très lourd carton qui ne m'était pas destiné. Je m'en ouvris au livreur qui me montra une étiquette avec mes nom et adresse collée sur le colis. À l'intérieur étaient empaquetés des centaines de tubes stériles destinés à recevoir l'ADN de personnes en quête de leur passé. Ayant répété plusieurs fois la cérémonie consistant à tchater avec une personne prénommée jusqu'à ce que la communication soit interrompue, je décidai de ne pas recommencer à donner mes coordonnées et celles chiffrées du paquet. J'envoyai un mail à l'expéditeur aux États-Unis et au destinataire en Inde, au Bengalore. Vous vous demandez avec justesse comment ces éprouvettes avaient traversé les barrières douanières pour atterrir chez moi, alors que je me fais taxer systématiquement lorsque je reçois des objets hors communauté européenne. Le pompon revient à la réponse de Fedex : "Cher Monsieur Birgé, nous sommes désolés que le traitement de votre commande n’ait pas suscité votre entière satisfaction. Nous avons le regret de vous informer que Fedex France ne peut pas gérer votre situation, votre colis provient de 2 pays dont aucun n'est la France. Veuillez contacter l'un des deux pays concernés par votre colis...". J'ai répondu que ce n'était pas mon colis et tutti quanti, reçu une réponse d'excuse du transporteur et c'est reparti pour un tour. La même lettre idiote automatique resurgit une semaine plus tard. De nouveau des excuses. J'ignore quoi faire, le destinataire et l'expéditeur ne s'étant pas non plus manifestés. Mettre tout cela à la poubelle au lieu de passer des heures à régler un problème auquel je suis totalement étranger ? C'est tentant. Ce qui est sûr, c'est d'éviter consciencieusement un transporteur injoignable, et celui-ci en particulier. Malgré toutes les attentes, Colissimo était jusqu'ici le service le plus fiable, la Poste elle-même n'étant plus à la hauteur de sa réputation passée. Si je me réfère à mes expériences passées, GLS m'en a fait voir aussi de toutes les couleurs. Quant au transport de voyageurs vous avez probablement apprécié le foutoir de la SNCF. Mais là c'est probablement une manœuvre pour dézinguer le service public et le vendre au privé. Privé qui marche sur la tête, on l'aura compris, nous sommes loin de la promptitude et de la probité de ce qu'étaient les PTT. Ce ne sont plus des services, mais des échanges commerciaux. Le monde tourne au vinaigre. Comme la Sécurité Sociale devenue l'Assurance Maladie. Au moins là les mots sont explicites.

jeudi 1 décembre 2022

Adjugé !


Ayant confié quelques objets à une commissaire-priseur, je suis allé pour la première fois de ma vie à Drouot. J'y suis resté trois heures, totalement fasciné par le spectacle. Franchement, cela vaut la visite à la Tour Eiffel ou au Zoo de Vincennes ! Si je suis resté la majorité du temps dans la 6 où officiait Maître Lynda Trouvé, j'ai pris le temps d'aller voir ce qui se passait dans la quinzaine d'autres salles réparties sur deux niveaux de l'Hôtel des ventes de Drouot. Le style de chacune est très varié, compassée ou bon enfant, et certaines salles servaient juste d'exposition. La vente à laquelle j'assistai est dite courante, regroupant livres, tableaux, bijoux et objets de périodes et valeurs différentes sans qu'ils soient décrits dans un catalogue. Je participerai à une seconde vente en mars, mais celle-ci sera cataloguée.
La vente ressemblait à une ruche, nécessitant une douzaine de personnes, la commissaire-priseur, ses clercs, le crieur, les manutentionnaires. À gauche trois jeunes gens, dont certains experts, prennent les ordres sur leurs téléphones portables, à droite cela se passe en "live" sur Internet, certains sont déjà inscrits auprès de la commissaire-priseur et dans la salle on lève le bras pour signifier son enchère. Parfois cela va très vite, d'autres fois ça rame. La salle est pleine, elle se vide, elle se remplit à nouveau, il y a foule, des gens assis, debout, de passage. Des lots qui ne partent pas sont légèrement baissés, d'autres sont regroupés pour devenir plus attrayants. J'ai vu des caisses de livres d'art partir pour trente euros, on les appelle mannettes, et un seul bouquin afficher 1800 euros. Tant que le marteau n'est pas tombé et que la commissaire n'a pas dit "Adjugé !", on tergiverse, on plaisante... Des éditions originales de Verlaine ne trouvent aucun preneur et sont retirées de la vente. Elles seront probablement représentées un autre jour. Des "premiers" acheteurs donnent leur carte bleue au crieur. Les manutentionnaires n'arrêtent pas de se croiser, entre ceux qui apportent et exposent l'objet, ceux qui les remportent et ceux qui les préparent. Ce jour-là ce sont des centaines de lots qui sont mis à prix. Je vois partir les soldats de plomb de mon père avec lesquels je n'ai jamais joué, un Vian illustré par Boullet, Le zoo des vedettes, quelques bijoux fantaisie et des petits tableaux vraiment pas à mon goût, mais qui trouvent preneur. Je suis hélas obligé de partir avant la mise en vente des objets qui m'intéressent le plus... Je reviendrai, d'autant qu'on entre à Drouot comme dans un moulin, sans avoir de compte à rendre à personne. Le spectacle est permanent.