70 Musique - décembre 2014 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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mardi 30 décembre 2014

Powerplant : 24 Lies Per Second


Deux ou trois générations de musiciens assument avec brio l'héritage des premiers minimalistes américains, fringants octogénaires toujours en activité, mais dont l'inventivité n'est plus à la hauteur de leurs heures de gloire. Après Terry Riley, Steve Reich et confrères, John Adams ou les fondateurs de Bang On A Can, Julia Wolfe, David Lang et Michael Gordon tournent déjà autour de la soixantaine. Tous ont développé des langages personnels s'échappant de la doxa répétitive, d'où le glissement progressif vers le terme de minimalisme, lui-même très limitatif par rapport à la réalité de leurs œuvres. Certains pourraient même être taxés de maximalistes, ce qui n'est pas fait pour me déplaire ! Je reviendrai ultérieurement sur Bang On A Can pour avoir récemment écouté une trentaine d'albums, majoritairement parus sur le label Cantaloupe Music, mais j'ai besoin de temps pour débroussailler le style des uns et des autres, d'autant qu'apparaissent à côté du trio fondateur quantité de voix originales tels Arnold Dreyblatt, Glenn Kotche, Ken Thomson, Bobby Previte, Florent Ghys, Michael Harrison, Evan Zyporin et des ensembles comme Icebreaker ou So Percussion.
Le percussionniste Joby Burgess associé au sound designer Matthew Fairclough et à la vidéaste Kathy Hinde forment le groupe anglais Powerplant. Leur dernier album, 24 Lies Per Second, rassemble des pièces très diverses, mais qui ont en commun l'héritage de leurs aînés. D'autant que l'on y découvrira une version pour percussion de Piece For Tape de Conlon Nancarrow et une œuvre de jeunesse inédite de Steve Reich, My Name Is, à une époque où le compositeur ne craignait pas la surchauffe des méninges de l'auditeur ! Dans l'extrait vidéo joint on découvrira un instrument de prédilection de Joby Burgess, le xylosynth fabriqué par William Wernick. Il s'agit d'un xylophone midi dont le prix comparativement devrait intéressé plus d'un percussionniste. Pour Chain of Command Graham Fitkin a échantillonné les voix de George Bush Jr et Donald Rumsfeld évoquant Guantanamo, l'Irak et Abu Ghraib. L'effet répétitif et de reconstruction des phrases renvoie à la torture endurée 24 heures sur 24 par les prisonniers.


Powerplant mélange les percussions avec les traitements électroniques dans une optique toujours rythmique. Dominic Murcott répond à la pièce de Nancarrow qu'il a arrangée en y adjoignant de l'électronique live tandis que Max de Wardener s'inspire de films de Michael Haneke. Ci-dessous un extrait de Im Dorfe inspiré La pianiste. Sur le site de Powerplant on trouvera d'autres vidéos dont une déconstruction de Chain of Command.


Rien d'étonnant à ce que le premier album de Powerplant ait été Electric Counterpoint autour de Steve Reich et Kraftwerk, car s'il porte le titre de la pièce arrangée de l'Américain le nom du groupe est la traduction de celui des Allemands. Les singles qui l'avaient précédé étaient nettement plus technoïdes. On retrouve également Joby Burgess au sein de l'Ensemble Bash (A Doll's House) ou avec le compositeur Gabriel Prokofiev dont il est le soliste pour le Concerto for Bass Drum. NonClassical, le label de Gabriel Prokofiev (petit-fils de Sergueï), a l'intéressante particularité de proposer des remix dont tous les sons sont issus des disques originaux sans apport extérieur, tel The Art of Remix.

vendredi 26 décembre 2014

Défection du rock en période de crise


Déprime des lendemains de fête familiale, déclins et déclinaisons, quelle idée ai-je eu d'écouter les 100 disques considérés comme les meilleurs de l'année 2014 par Les Inrocks ?
Les clips sont sympas, mais la plupart des albums se ressemblent invariablement. La tendance rock british se maintient, revival sans conviction que les rythmes dansants ne peuvent camoufler. Variétés molles, qu'elles soient françaises ou "internationales". Le monomorphisme des Inrocks, qui furent il y a longtemps ouverts à toutes les musiques, se répand dans un flux popisant inconsistant, regroupement déprimant de clones branchés. Mais branchés sur quoi ? Qu'est-ce que cela raconte ? La complicité de la presse spécialisée avec une industrie en bout de course, incapable de se renouveler par manque d'ambition et de prises de risques, s'affiche sur les 10 pages du site Web des Inrocks.
Perdus au milieu de la foule, Scott Walker, Alt-J, Leonard Cohen, Shabazz Palaces, Dick Annegran surnagent, mais aucun de leurs albums de cette année ne sont néanmoins leurs meilleurs. Vagues frémissements avec Ghettoville de Actress ou Asiatisch de Fatima Al Qadiri, mais il n'y a pas de quoi se relever la nuit. Peut-être Wonder Where We Land de SBTRKT suffisamment divers pour me plaire? Les brouillons montages free de Flying Lotus (petit-neveu d'Alice Coltrane et John par alliance !) n'arrivent pas à la cheville de quantité d'inventions assimilées en France au jazz. Il existe forcément sous d'autres latitudes des rappeurs, des technos, des songwriters, des musiciens issus d'autres terroirs qui renouvellent les genres. Encéphalogramme plat. On oscille entre basses pompantes et nostalgies mielleuses. Les Inrocks évoquent par ci par là un mouvement transgenre, s'économisant d'aller voir du côté des musiques innommables, entendre que les vraies trouvailles obligent à fréquenter les sons sans se préoccuper du tiroir dans lequel les ranger. Les listes consanguines épuisent la veine artistique. On finit au marché du disque, un mouvement commercial comme les publicités qui s'affichent sous les 100 clips illustrant la sélection décriée. Les annonceurs font toujours la loi.
J'avais soif de découverte. Ma curiosité n'est pas satisfaite. Je reste sur ma faim. Un comble pour un lendemain de fête. Burp !

jeudi 25 décembre 2014

Audio Technic Catalog de Vincent Epplay


Pratiquant à la ville comme à la scène "le discours de la méthode" depuis 1980, date de la création du spectacle Rideau !, j'ai toujours adoré les œuvres qui se réfèrent à leur support. Le compositeur Vincent Epplay me comble avec ses travaux de reconstruction sonores où il mixe, filtre, enveloppe, amplifie des disques pédagogiques ou scientifiques, de bruitages et d'illustrations musicales pour créer des œuvres électroacoustiques, créations radiophoniques qui s'écoutent affalé dans un bon fauteuil, la lumière tamisée, avec la boisson de votre choix. Après le 33 tours 30cm Sound Effects (Movie in your head Vol1) et le vinyle 25 cm Le disque contre l'insomnie (Hypnose), le label PPT Stembogem publie Audio Technic Catalog (Notices Methodes & Pédagogies), 33T 30cm augmenté d'un DVD où figurent quatre films .....


Six teasers annonçaient la sortie de l'élégant objet, troisième de la série Sound Library. Epplay s'approprie des disques de test et des manuels audio de règlage de votre chaîne hi-fi, mêlant textes et musique.


L'album est incopiable, car la pochette fait partie du concept, double volet mis en page dans le style des objets originaux. S'il est annoncé qu'il a été "réalisé à 99% avec des disques éducatifs et techniques", des glissements progressifs du plaisir viennent pervertir leur uniformité et leur environnement stérile.


Un ton froid et humoristique colore cette somme de conseils que le temps passé décale au point d'en faire une sorte de voyage dans le temps. Notre fauteuil devient celui d'un voyageur de l'espace. Des tubes nous poussent tandis que l'aiguille creuse son sillon sur la platine...


Les quatre films du DVD qui accompagne le vinyle évoquent le rapport espace-temps. Les courts métrages Rotation, Luxation, Station, Ondulation se réfèrent à la perspective spatiale comme remède universel, à la prévention des accidents du travail, à l'union de l'audiovisuel avec le cosmos et de la fidélité des oscilloscopes. Vincent Epplay effectue là un travail électroacoustique plus flagrant qu'en audio. Il recompose les bandes son comme il le fit avec Moby Dick de Huston, Nanook de Flaherty ou les films de Pierre Clémenti. Pour celles et ceux qui ne possèdent pas de tourne-disques les deux faces du vinyle sont également reproduites sur la petite galette argentée.


Je possède moi-même une collection de vinyles 45T et 33T, disques de démonstration comme ceux utilisés par Vincent Epplay, disques souples promotionnels, cartes postales avec gravure phonographique incorporée à l'image, évocations romanesques, etc. que j'utilisai en scène dès 1970, dont un mémorable concert avec le groupe Dagon à la Fac Dauphine où je trafiquais des publicités en temps réel. J'optai ensuite pour des radiophonies, montages cut joués au bouton de pause d'un cassettophone, sans retraitement ni collage ultérieurs, faisant apparaître l'environnement social sous les paysages sonores extrêmement courts. Ma dernière intervention dans ce domaine est la Mascarade Machine conçue et réalisée avec Antoine Schmitt, avec qui Epplay cosigna son premier enregistrement discographique, un disque infini. Mascarade est une application numérique me permettant par exemple de transformer le flux radiophonique en mélodie en contrôlant l'ordinateur sans le toucher, par des gestes de marionnettiste captée par la webcam intégrée. Mais ce qui compte avant tout est le propos que l'on entend divulguer au public... En 1998, Machiavel était un scratch interactif de 111 boucles vidéo réalisé avec Antoine Schmitt, objet comportemental réagissant au plaisir et à l'ennui, zapping symphonique de bruits et de musiques, mais surtout regard critique et sensible sur la planète...


Digne héritier des expériences de plusieurs générations, Vincent Epplay se retrouve à la croisée de la musique électroacoustique telle que pratiquée au GRM depuis les années 50, des dérivés technoïdes de sa jeunesse et des élucubrations humoristiques des bidouilleurs provocateurs qui savent se moquer de leurs lubies obsessionnelles. En s'étoffant son œuvre se précise, fractale sémiologique où la théorie devient l'enjeu d'une pratique.

mercredi 24 décembre 2014

Notre cadeau de Noël


Les cadeaux que l'on fait aux autres ne les choisit-on pas d'abord pour soi ? Si celui-ci est à l'intention de mes lecteurs ce concert enregistré à Radio France pour l'émission À l'improviste est d'abord celui qu'Anne Montaron et France Musique nous offrent pour Noël. Quarante-cinq minutes en neuf courtes pièces inspirées par le jeu de cartes de Brian Eno et Peter Schmidt marquent le premier concert de la série Un coup de dés jamais n'abolira le hasard : Servez-vous d'une couleur inacceptable (5'00) / Coupez une connexion vitale (4'30) / Acceptez un conseil (4'30), Résistez au changement ouvertement (4'00) / Plus sensuel (6'30) / Faites une liste exhaustive de tout ce que vous aimeriez réaliser et faites la dernière (3'30) / À quoi pensez-vous réellement là maintenant, intégrez (4'00), N'ayez pas peur des clichés (3'30) / Oubliez tout ce qui a été joué précédemment (4'30).


Quelques jours plus tard la chanteuse danoise Birgitte Lyregaard, la percussionniste suédoise Linda Edsjö et moi-même joueront onze autres pièces sur le même principe à l'Atelier du Plateau (extrait vidéo). Deux semaines encore et ce fut au tour du trompettiste-chanteur Médéric Collignon et du guitariste Julien Desprez de se prêter au jeu... Des films de tous ces spectacles suivront dans les semaines à venir, y compris la reformation d'Un Drame Musical Instantané qui se tint à Montreuil le 12 décembre dernier...

Photo de la balance © S. Noël

mercredi 17 décembre 2014

Erreur de distribution dans la spatialisation sonore


Nous avions rendez-vous au Palais de Tokyo pour fêter la sortie des GRM Tools Spaces, déclinaison de la célèbre application, cette fois dédiée à la spatialisation sonore, mais Françoise se trompant d'entrée s'est retrouvée à la soirée du Crédit Agricole. Elle dégustait des huîtres, du foie gras avec de la gelée de coing, un œuf aux truffes, un feuilleté d'escargot, cocktail des plus raffinés, tandis qu'en dessous, à la cave du Yoyo, nous attendaient des sandwichs bourratifs. Là-haut, un des dirigeants de la banque félicitait ses troupes en se gargarisant du succès de l'année 2014, prévoyant une année 2015 aussi radieuse. La crise est parfaitement ciblée !
En bas, organisée par l'INA en partenariat avec le magazine Trax, la présentation des GRM Tools par l'ingénieur Emmanuel Favreau, responsable des développements au GRM et plus particulièrement de cette application, fut à la hauteur de leur extraordinaire potentiel, malgré une sonorisation épouvantable. Comme souvent le niveau sonore dépassa les limites de l'entendement, habitude absurde qui rendrait aphone quiconque aurait envie d'échanger le moindre propos avec son voisin ou sa voisine. Ainsi le brouhaha du public essayant de parler avant le concert sur la musique enregistrée ne faiblit pas lorsque c'est le tour des musiciens. Quatre petits sets se succédèrent malgré tout, alternant le meilleur et le pire. Edward Perraud ritualisa sa prestation solo à la batterie (photo). Mimetic me laissa de glace. eRikm scratcha en virtuose quantité de matériaux. Arnaud Rebotini écrabouilla au marteau pilon militaire le jeu électroacoustique de Christain Zanési.
Je désertai la fête après que Jean-Michel Jarre, dont la carrière peut se résumer à 80 millions d'albums vendus, eut reçu un prix offert par l'INA dont l'humour est à souligner puisqu'il s'agit d'un iPad avec dessus enregistrées 30 heures de documents télévisés sur le grand homme dont nombreuses remises de prix à l'intéressé. La séquence où l'usurpateur se vante d'être le premier compositeur à pouvoir sculpter le son n'est pas piquée des vers. Il encensa néanmoins son prétendu maître Pierre Schaeffer qui se retournerait dans sa tombe à l'écoute de tant de louanges, incompatibles avec la réalité musicale des uns et des autres. La suite de la soirée se continua sans nous avec deux DJ, probablement plus technos que concrets. Il y a un écueil infranchissable entre les discours et les déclarations d'intention, et de l'autre côté les démonstrations binaires sur le mode "enfoncez-vous bien ça dans la tête". Dommage que l'INA-GRM ne s'adresse pas à des créateurs électros ou autres, dont l'invention est l'égale des générations de chercheurs qui les ont précédés ! Mais peut-être est-ce l'incompétence des techniciens sonores malgré la qualité du système Nexo qui est la principale responsable de la bouillie avec sub-basses incorporées dont le public est victime dans son apathie léthargique ?
Vraiment dommage, parce que les GRM Tools Spaces méritaient franchement mieux, prêts à fragmenter et disperser les sons, les filtrer et les retarder dans l'espace multicanal, sans compter ses déclinaisons antérieures permettant le morphing, le vocodeur évolutif, les décalages de filtres, les glissandi de timbre, le noising, le tout en temps réel...
Dehors les fumeurs de la banque digéraient leurs boni de fin d'année. Lorsque nous sommes arrivés à la maison Bruno Letort diffusait en différé sur France Musique des extraits de la soirée au Yoyo, sans les décibels ni le tonneau de basses...

lundi 15 décembre 2014

Mon Top 5 des années 70 sur Superfly


Pour le Blog de Superfly Records, Jacques Denis ma demandé "mon Top 5 des années 70 autour du jazz, etc. des années 70 en France". Superfly est à la fois un magasin et un label de réédition de vinyles introuvables, plutôt orienté vers le jazz et la soul, l'Afrique et les Amériques. Je me suis donc prêté au jeu pour suggérer 5 disques qui m'ont marqué personnellement et faire écouter un morceau de chacun d'eux. Ayant écrit le texte en anglais comme il était stipulé, je vous en livre ma traduction en vous renvoyant au site de Superfly pour en savourer la musique. Jacques Denis s'est chargé de récupérer les images de leurs pochettes. Je lui ai précisé que les cinq pièces devaient être présentées dans cet ordre.

Michel Magne "Carillon dans l’eau bouillante"
J'avais 7 ans en 1959 lorsque j'ai découvert Musique Tachiste de Michel Magne, compositeur de musiques de films inventif qui avait demandé à Sempé d'illustrer chaque pièce sur le livret inséré dans la pochette. Ce vinyle marque peut-être le début de ma vocation, un mix entre bruits, électronique et orchestre évoquant chaque fois une histoire.
Catherine Ribeiro "Âme debout"
En 1971 Brigitte Fontaine, Colette Magny et Catherine Ribeiro étaient nos mères de l'invention (Mothers of Invention dans le texte). Dans ce disque je suis également touché par la présence de mon ami disparu Claude Thiébaut qui joue du percuphone, un instrument créé par Patrice Moullet. J'ai toujours joué d'instruments auxquels personne d'autre n'avait recours.
Jacques Thollot "Cécile"
Mort récemment, Jacques Thollot n'est pas seulement un grand batteur, c'était aussi un compositeur très original. J'adore la culture encyclopédique qu'il insuffle à son travail. En France le jazz ne veut rien dire parce qu'il ne swingue pas (it don't mean a thing 'cause it ain't got that swing, référence à un morceau de Duke Ellington sur des paroles de Irving Mills), mais quoi que ce soit de vivant et d'inventif, en relation avec l'improvisation et les traditions européennes, peut être appelé du jazz!
Colette Magny "Répression"
Un de mes tubes favoris de 1971. Années d'or pour la révolution, dans tous les sens imaginables. J'ai eu la chance d'enregistrer et jouer avec Colette il y a vingt ans. Son humour était épatant et sur scène elle possédait un naturel que j'essaie d'adopter autant que possible. Ici Beb Guérin et Barre Phillips étaient tous deux à la contrebasse.
Ilhan Mimaroglu "Tract: A Composition Of Agitprop Music For Electromagnetic Tape Part II"
Une longue pièce pour terminer ce Top 5 de mes jeunes débuts. Même année. Partiellement composée et enregistrée à l'American Center, boulevard Raspail à Paris, un endroit où nous avions l'habitude de nous rendre sans savoir ce qui s'y passait. Jazzmen, rockers, poètes faisaient continuellement des performances. Un Drame Musical Instantané y donna son premier concert. Bakounine, Brecht, Marx, etc. figurent dans le miroir parfait de cette époque.

samedi 13 décembre 2014

Birgé-Edsjö-Lyregaard sur France Musique à 23h


Ce soir samedi à 23h est diffusé notre concert en trio enregistré en public le 10 novembre dernier à Radio France pour l'émission d’Anne Montaron, « À l’improviste ». Je jouais en trio avec la chanteuse danoise Birgitte Lyregaard et la percussionniste suédoise Linda Edsjö qui était essentiellement au vibraphone et au marimba. Mon instrument principal était cette fois le clavier, mais, comme on peut le voir sur les photos de Christian Taillemite qui en a publié 15 autres sur le site de CitizenJazz, je m'emparai également du Tenori-on et de machines virtuelles faites maison, d'une trompette à anche et d'un harmonica, de flûtes et guimbardes, d'un ballon de baudruche, etc.
Les cartes que nous avons tirées ce soir-là dans le jeu de Brian Eno et Peter Schmidt furent successivement : Servez-vous d'une couleur inacceptable / Coupez une connexion vitale / Acceptez un conseil / Résistez ouvertement au changement / Plus sensuel / Faites une liste exhaustive de tout ce que vous aimeriez réaliser et faites la dernière / À quoi pensez-vous réellement là maintenant, intégrez / N'ayez pas peur des clichés / Oubliez tout ce qui a été joué précédemment.
Quelques jours plus tard nous jouions le même spectacle intitulé Un coup de dés jamais n'abolira le hasard à l'Atelier du Plateau où les spectateurs tirèrent évidemment des cartes complètement différentes.
Si vous êtes dans l'impossibilité de suivre ce soir la retransmission sur France Musique, sachez que le concert est en podcast audio et vidéo pendant un an sur leur site.

Photo © Christian Taillemite

vendredi 12 décembre 2014

Un Drame Musical Instantané ce soir à Montreuil en sextet


Pas trois, mais six ! Nous serons bien six ce soir au Studio Berthelot à Montreuil. Edward Perraud souffrant, le jeune batteur argentin encore peu connu Francisco Cosavella le remplace au pied levé. Pour Un drame musical instantané que rêver de mieux ?
À l'issue de l'Hommage à Bernard Vitet organisé à La Java l'an passé, avec Francis Gorgé nous regrettions de n'avoir pas pris le temps de jouer ensemble. Hélène Sage, retenue à Toulouse, n'avait pu non plus nous rejoindre. Rendez-vous fut pris pour reformer Un Drame Musical Instantané au moins le temps d'un concert.
Lors de sa création en 1976 Bernard, qui avait 18 ans de plus que nous, répétait que les "vieux" de son âge lui flanquaient les moules. Il évoquait les coquillages incrustés sur les flancs des étraves qui les empêchent de fendre les flots. Histoire de perpétuer les traditions familiales, nous avons invité les jeunes Antonin-Tri Hoang, sax alto et clarinette basse, et Francisco Cossavella, batterie et électronique... Autre fidélité, cette fois à la musique française et ses ramifications symphoniques se concrétisant par un appétit inextinguible pour les cordes, nous serons rejoints par la violoncelliste Hélène Bass qui participa à la création de notre grand orchestre en 1981 dans ce même Théâtre Berthelot, là où Méliès tourna certaines de ses illusions cinématographiques.
Comme fil conducteur de la soirée, la discographie du Drame était tout indiquée puisqu'elle marque de manière indélébile notre histoire. Pas question de la figer pour autant dans le passé. Nous sommes trop attachés à ce quotidien qui se renouvelle sans cesse. Les titres et la couleur de chaque album deviennent le thème de nos improvisations, terme que nous avons rejeté depuis nos débuts pour lui préférer le concept de composition instantanée en opposition à composition préalable. Cela n'empêchera pas Hélène Sage de chanter Baudelaire et Duparc, ou Carton, chansons qui nous rappellent l'ami disparu. Francis Gorgé, avec qui je fis mon premier concert au Lycée Claude Bernard début 1971, accompagnera Hélène à la guitare. L'entr'acte marquera la coupure entre la période vinyle et l'ère numérique. Si nous n'avons jamais joué deux fois le même concert, nous prenions chaque fois un an pour soigner nos albums comme de petits joyaux, disques-concepts et objets peaufinés jusqu'en leurs moindres détails.
Pour mes lecteurs voici donc en exclusivité le programme des réjouissances que seuls les titres peuvent laisser imaginer : Trop d'adrénaline nuit, Rideau !, À travail égal salaire égal, Les bons contes font les bons amis, L'homme à la caméra, Carnage / L'hallali, Sous les mers, Qui vive ?, Kind Lieder, Urgent Meeting...

ENTRÉE LIBRE SUR RÉSERVATION 20h30
Programme complet de la Semaine du Bizarre
Théâtre Municipal Berthelot, 6 rue Marcellin Berthelot, 93100 Montreuil - Métro : Croix de Chavaux - Tel. : 01 41 72 10 35

vendredi 5 décembre 2014

Un Drame Musical Instantané, le grand retour !


Pour sa résurrection inespérée, UN DRAME MUSICAL INSTANTANÉ (1976-2008) a choisi le Théâtre Berthelot où notre grand orchestre était né il y a 33 ans ! Avec Francis Gorgé et Hélène Sage nous commémorerons une fois de plus la disparition de Bernard Vitet, en invitant des musiciens avec qui nous partageons le goût de l'invention et de l'inattendu. Il y aura des chansons et des compositions instantanées, des instruments étranges et comme toujours une mise en ondes théâtrale dansant d'un pied sur l'autre, entre réel et imaginaire, mélange d'acoustique et d'électronique, un espace de création où sont conviés tous les possibles. Une rencontre historique. De quoi en voir de toutes les couleurs !

Jean-Jacques Birgé - clavier, électronique
Francis Gorgé - guitares, électronique
Hélène Sage - flûtes, voix, idiophones
Antonin-Tri Hoang - sax alto, clarinette basse
Hélène Bass - violoncelle
Francisco Cosavella - batterie, électronique

Vendredi 12 décembre à 20h30
ENTRÉE LIBRE SUR RÉSERVATION
Programme complet de la Semaine du Bizarre
Théâtre Municipal Berthelot, 6 rue Marcellin Berthelot, 93100 Montreuil - Métro : Croix de Chavaux - Tel. : 01 41 72 10 35

mercredi 3 décembre 2014

Chants de la résistance actuelle en Bretagne


La résistance est une constante bretonne. Face à la centralisation ségrégationniste, aux catastrophiques politiques agricoles successives, au désarmement de la flotte de pêche, à la pollution de leurs côtes, à l'implantation nucléaire, à l'interdiction de leur langue, les Bretons ont une longue pratique de la révolte. Loin d'un folklore pétrifié, sa culture s'est renouvelée au gré de leurs insurrections. Lorsqu'elles évoquent le quotidien les paroles des chansons sont souvent critiques. Et la musique est celle de la fête, les fest-noz rassemblant toutes les générations dans une ambiance étonnante pour qui vient d'ailleurs.
Pour son cinquième album, Les vies que l'on mène, le Hamon Martin Quintet montre que les meilleures danses ont tout à gagner à porter des idées fortes et généreuses. À chanter les vers de Sylvain Girault (Katé-Mé, La Dame blanche) ils se sont radicalisés en écho du combat de Notre Dame des Landes (Zim Zoum Zad). L'auteur des Flamboyants et d'Addi Bâ dans les Chroniques de résistance du label nato signe presque toutes les paroles à côté de Marthe Vassalo, Boris Vian et Victor Hugo. Plus la société se désagrège sous les coups portés par une caste immorale et incompétente qui a confisqué le pouvoir et vendu l'État aux financiers, plus il devient nécessaire de s'en moquer et de retrouver le sens, du bon sens et du sens bon. Le Hamon Martin Quintet relève le défi avec humour et entrain.


Sur un rond de Loudéac, un contre-rond, une scottish ou une ridée traditionnels, Mathieu Hamon porte le chant gallo à pleine voix. Quand il n'adopte pas le kan ha diskan,son frère Erwan Hamon lui répond à la bombarde ou à la flûte dans une articulation parfaitement détachée. Ronan Pellen, neveu du guitariste Jacques Pellen, joue du cistre, sorte de grosse mandoline, et le Bigouden Erwan Volant est à la basse électrique. On connaissait déjà l'accordéon diatonique de Janick Martin par le formidable quartet de Jacky Molard. Ils sont parfois rejoints par le tabliste franco-indien Prabhu Edouard ou Girault qui a l'habitude de chanter. Tous galvanisent les énergies en colorant de rouge et de noir la blanche hermine. (Coop Breizh)