Une nuit à Séoul, j'allume la télévision dans ma chambre d'hôtel et je prends en cours un drôle de film sur TV5 Monde. Je m'endors dessus parce qu'il est très tard, mais le lendemain matin au petit-déjeuner, devant des huîtres pimentées, Nicolas me raconte la suite parce qu'il lui est arrivé la même chose dans sa chambre à lui et qu'il a tenu jusqu'au bout.
En zappant, nous étions tous deux tombés sur L'iceberg, étrange film rappelant Jacques Tati, mais révélant surtout un trio d'auteurs-acteurs burlesques, issus des traditions du muet et de la bande dessinée belge. Les cadres fixes, très présents, font penser à des cases ponctuées de rares phylactères, et les effets spéciaux à la machinerie de théâtre. Tout est simple, direct, et complètement farfelu.
Une femme se fait accidentellement enfermer dans la chambre froide du fast-food où elle travaille, et développe une passion pour le froid jusqu'à décider d'aller voir un iceberg. Nos trois clowns tristes viennent du théâtre ou du cirque comme traditionnellement presque tous les acteurs du burlesque d'antan, sauf qu'ici le son souligne le comique des situations et que la sobriété du jeu laisse imaginer les sentiments des personnages en donnant suffisamment d'espace aux nôtres. Sur leur petit voilier, Dominique Abel, Fiona Gordon et Bruno Romy font équip(ag)e. Les trois mousses que taire se sont adjoints le géant Philippe Mars et une comédienne inuït d'Atanarjuat, Lucy Tulugarjuk, dont le sourire ouvre et clôt cette croisière au Pays du Tendre et à l'esprit grand ouvert. Chaque scène est un petit castelet où les acteurs entrent et sortent du cadre en se jetant à l'eau, qui est monstrueusement froide, pour de vrai ! Heureusement, la chaleur qu'ils dégagent n'a d'égal que leur enthousiasme à nous faire partager leur imaginaire débridé.
Le dvd édité par mk2, agrémenté du court-métrage Merci Cupidon et d'une auto-interview, donne envie d'aller voir ce qu'il y a d'autre dans la collection Cinéma Découverte. Cette fois je garde les yeux et les oreilles grands ouverts, de but(te) en blanc !