Les blogs ont une fin. Le graphiste Paul Cox a tenu le sien à l'occasion de l'exposition Jeu de construction, à la Galerie des enfants du Centre Pompidou, du 16 février au 9 mai 2005. Mais son blog semble n'avoir duré que seulement quelques jours, quelques jours bien remplis.

J'ai déjeuné hier avec Bernard (Vitet) au New Nïoulaville à Belleville. Ça n'a pas trop changé, sauf qu'il n'y a plus un chat, un poisson-chat peut-être, c'est sinistre. Nous avons commandé ce que nous prenions lorsque c'était notre cantine, il y a plus de dix ans maintenant. Bernard a craqué pour sa salade de méduse pimentée, j'ai jeté mon dévolu sur la soupe de poisson cambodgienne au lait de coco et nous avons partagé des tripes aux haricots noirs et des pattes de poulet, le tout cuit à la vapeur. Nous pensions aller nous repaître d'un Phô', mais Dong Huong (14 rue Louis Bonnet, une des meilleures soupes Phô' à Paris) était en congés.
Bernard n'a pas arrêté de me contredire, mais avec tant de gentillesse et de délicatesse que c'en est un plaisir. Si jamais je suis d'accord avec lui, il semble contrarié. Il use très bien du paradoxe et nous ne cessons d'argumenter. La discussion porte sur l'humanisme, sorte de struggle for life originelle, donc sur la mégalanthropie envers les animaux (je ne vous ai pas conté un récent dîner où étaient également conviés Virginie Rochetti et Jacques Rebotier ; Bernard avait enfin trouvé des amis, des bêtes, des amis des bêtes) ou sur les élections pièges à cons ("Votez dur, votez mou, mais votez dans le trou !" Tiens c'est le second en deux jours à me rappeler ce slogan de 69). Il souhaiterait savoir comment j'imagine l'avenir, mais je ne peux qu'esquisser un "Pas différent du passé". Je fais toujours les mêmes rêves auxquels répondent toujours les mêmes cauchemars. Mes rêves me sont propres, mais j'ai la tristesse de partager mes cauchemars avec le reste de l'humanité. Les choses n'ont aucune raison de s'arranger. Il faudra attendre une grosse catastrophe. L'histoire se répète sans que l'on en tire les leçons. Dommage ! J'explique à mon ami que le confort dans lequel nous vivons est resté fragile. Je ne travaille ni plus ni moins qu'avant, c'est beaucoup, certes, certainement trop, mais j'aime ça. Et puis je ne crois pas avoir le choix.
Sur le chemin du retour, j'achète du riz : du thaï, du gluant et du rond japonais. Françoise a amélioré la recette de Donghee et mélange les trois pour trouver la consistance parfaite. Rappel du billet du 10 août 2005 (Paul Cox avait déjà arrêté son blog) : "... On peut mélanger 2/3 de riz rond japonais (Shinode chez Tang par exemple) et 1/3 de riz gluant. Le laver trois ou quatre fois. Rajouter de l'eau jusqu'à un peu moins d'une phalange au-dessus du riz. À feu vif jusqu'à ce que la vapeur s'échappe des bords du couvercle, puis 10 minutes à feu très doux. Laisser reposer. Texture parfaite !"