Me reconnaissant parfois dans les personnages du film High Fidelity de Stephen Frears adapté du roman de Nick Hornby, mon propos n'est pas ici de classer mes disques par couleur de pochette pour réinitialiser mes choix ou initier de nouvelles pratiques d'écoute, mais je note, pour l'instant sans aucune arrière-pensée, que les deux disques reçus ce matin-là sont de la même couleur que ma boîte aux lettres, elle-même aussi orange que le mur qui l'abrite. La galette noire à paillettes immaculée du nouvel album de Massive Attack marque un avantage sur la banalité de celui de Charles Ives, le groupe de Bristol restant fidèle à ses graphismes épurés. Ce n'est pas le fort des disques de musique classique de sortir de l'ordinaire. Le boîtier du DVD de Massive Attack, Eleven Promos, était déjà transparent et sans motif apparent tandis que le gros coffret de 11 disques The singles collection 90/98, mon préféré parmi leur maigre discographie, est recouvert d'une encre thermosensible qui laisse nos empreintes digitales en blanc sur fond noir le temps que la température ambiante reprenne le dessus. Les notes de pochette de l'intégrale des Psaumes par le SWR Vokalensemble de Stuttgart dirigé par Marcus Creed sont par contre plus parlantes que les dessins intérieurs du disque trip-hop. Je me demande parfois à quoi riment les pages d'un livret si elles ne nous incitent pas à la contemplation ou simplement à l'envie d'y retourner. Les meilleurs livres ne sont-ils pas ceux vers lesquels nous revenons pour y piocher une phrase, un passage, un chapitre, voire les relire entièrement ? J'évalue ainsi une bande dessinée ou un bouquin de photographies à leur potentiel attractif. Retrouver chaque fois le désir de la découverte comme si c'était la première ! Aux extrémités du spectre de mes humeurs, les deux disques semblent posséder le même pouvoir. Les Psaumes me font planer sur un nuage de coton zen. Heligoland me file le peps dont j'ai besoin pour m'activer dans la maison. Rien d'extraordinaire. Un accompagnement. J'alterne plusieurs fois. D'un côté mon compositeur préféré dont l'invention dépasse toute velléité mystique, de l'autre un entrain de bon aloi sans aucune vague. Les 6000 tonnes restent dans la virtualité. Parfaits pour une après-midi de détente.