Il pleuvait. J'ai tout de même traversé le jardin pour regarder si le postier était passé. Un voisin avait glissé son nouveau CD dans la boîte. On se croise de temps en temps dans le quartier, mais nous ne nous connaissons pas. Il y a de plus en plus de musiciens à la Dhuys. Des classiques et des modernes. Olivier Lété a enregistré Tuning seul à la basse électrique, sans pédales d'effets, juste avec deux amplis. Je pourrais ajouter sans fioriture si l'épaisseur du son ne lui donnait son volume, sa sculpture. C'est grave, très grave. On sent l'instrument dans ses moindres détails, le filetage des cordes, le gras des doigts, la densité de la caisse, la membrane des haut-parleurs... On comprend l'amour de la vibration, jusqu'au plus profond de l'être. Comme si le musicien avait retrouvé le pourquoi de son choix instrumental, l'émotion des origines. L'album donne envie de l'écouter sur des haut-parleurs au diamètre le plus large. Aucun des miens ne dépasse 38 centimètres. Le vrombissement des basses fréquences est tellurique. Oubliez les enceintes de l'ordi, c'est nul. Tout se joue dans l'épaisseur. Le timbre fait foi. Au cinquième morceau, Un retour, Lété commence à phraser. Au sixième, Blacktop, il prend l'ascenseur. Et ainsi de suite. La basse continue. Frappe et frotte jusqu'au neuvième, But He Can't Fly, parce que c'est tout en bas.

→ Olivier Lété, Tuning, label Discobole, 10€