dimanche 13 décembre 2009
Les usuriers
Par Jean-Jacques Birgé,
dimanche 13 décembre 2009 à 00:03 :: Humeurs & opinions
L'économie islandaise s'est écroulée depuis "la crise", la dernière avant la prochaine, la Grèce est au bord de la faillite et d'autres pays pourraient suivre, entraînés dans la chute par un effet domino. Des sociétés ferment, des individus sont ruinés, la dette des pays pauvres ne fait que grossir, etc. Face à tout débiteur il y a un créditeur. Tout cet argent emprunté que l'on est incapable de rembourser appartenait à un prêteur. Ce sont en général des banques, parfois des états, même si cela revient au même. Les endettés sont le plus souvent asphyxiés par le taux de l'usure. C'est le cas des pays pauvres qui ne cessent de rembourser les intérêts, n'arrivant jamais à se débarrasser de leurs dettes. Jusqu'à déclarer forfait comme le Mexique en 1982 ou l'Argentine en 2001. La spirale est infernale, il faut emprunter pour payer les intérêts, etc. La seule solution est pour eux de faire fonctionner la planche à billets, on imprime à tour de bras, mais le pays sombre automatiquement dans la crise, dévaluation et récession à la clef.
La gourmandise des usuriers étrangle les endettés dont la gestion budgétaire est dictée par les lois d'un marché imposé par les riches. On pousse à la consommation, on proclame indispensables certaines réformes coûteuses, on fait miroiter des profits, et les puissants de s'en mettre plein les poches pendant que les populations travaillent comme des malades sans ne jamais arriver à sortir de leur condition. On naît riche, on le devient rarement. L'accession à la propriété et par là-même le crédit sont des moyens légaux et démocratiques d'empêcher la révolte des citoyens en colère. Le crédit est surtout une aubaine pour les banques, à condition qu'elles soient remboursées. C'est ce qui leur permet de s'enrichir, ou plus précisément leurs actionnaires, à condition de ne pas miser sur des clients insolvables. C'est ce qui s'est passé aux États-Unis avec des dizaines de milliers de familles jetées à la rue, leurs logements de par ce fait inoccupés se dégradant jusqu'à la ruine, créant de véritables villes fantômes. Pyramide absurde, puisqu'au bout du compte tout le monde en pâtit, les salariés, les maisons inhabitées et les banques. Sauf que l'État vient au secours des banques tandis qu'il laisse la population s'enliser dans la misère. Quand les banques reprennent le dessus elles ne remboursent pas pour autant à la hauteur des secours octroyés ni ne soutiennent à leur tour les usagers.
Pere me raconta la visite qu'il fit à son banquier à Figueras. Celui-ci consentirait à lui octroyer un prêt à une condition étrange. Si mon ami était capable de deviner lequel de ses deux yeux était un œil de verre, il accepterait de l'aider. Pere ne se démonte pas et indique sans hésiter le droit. Le banquier, surpris de sa perspicacité, lui demande comment il a deviné. Et mon ami catalan de répondre : " c'est le seul où il y a un peu d'humanité ! "