70 Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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dimanche 15 octobre 2006

Au commissariat avec Kim et Park


La journée a été marquée par une série de petites contrariétés. J'ai d'abord cassé les montures orange de mes nouvelles lunettes qui étaient assorties à ma veste, mes chaussettes et ma ceinture. Ensuite, l'organisation du Festival Dual Reality est loin d'être au point, on y reviendra. Mais surtout, Nicolas a perdu son passeport qu'il avait glissé dans la poche intérieure de sa veste. En réalité tout est lié. Je n'y voyais pas grand chose, alors j'ai demandé à Nicolas de tenir mon sac à dos pendant que je farfouillais à l'intérieur. De son côté, il posa sa veste sur son bras parce qu'il commençait à faire très chaud, et paf ! Constatant que la salle du SeMA (Musée d'Art de Séoul) qui nous est assignée n'était pas prête pour pouvoir y faire quoi que ce soit (murs à peindre en noir, moquette à poser, matériel à livrer...) - mais toute la Biennale est en chantier -, nous décidâmes de fuir jusqu'à dimanche après-midi afin que l'équipe de constructeurs ait le temps de terminer. Le passeport a probablement dû tomber là (je viens d'appeler N pour lui dire que c'est ici qu'il l'a perdu, la photo fait foi, l'inspecteur Duflair a encore frappé).


Les moineaux rigolaient. Nous pas trop. Nous avons refait tout le chemin à l'envers, mais rien. Comme l'Ambassade de France est fermée jusqu'à lundi, Nicolas a couru faire sa déclaration au commissariat de Namdaemun. Les deux flics présents ne parlent que le coréen, ils nous reçoivent en nous offrant à chacun une bouteille de remontant. Sur leurs vareuses sont cousus leurs noms, parmi les plus usuels en Corée : Kim et Park. Ce sont plutôt Dupond et Dupont, lorsqu'ils recherchent l'adresse de l'Ambassade. L'un d'eux a finalement l'idée d'utiliser Internet... Derrière eux, on voyait un seul écran vidéo avec un plan large du marché de Namdaemun, un marché avec des dizaines de ruelles de même pas un mètre de large, et immense ! Kim et Park devaient tellement s'emmerder qu'ils étaient tout contents d'avoir de la visite. On serait presque repartis avec des casquettes et des porte-clefs.


Nous marchons encore et toujours, ça commence à faire long pour moi depuis New York. Nicolas souhaite revenir sur les lieux où il a vécu. Mais souvent les maisons ont été détruites et remplacées par un immeuble. En tout, il est resté trois ans en Corée. Itinéraire également culinaire et bien relevé ! La ville a changé. On construit à tours de bras, comme ce grand complexe de magasins sur quatre niveaux qui s'est monté en face de la Galerie Gana où j'avais exposé Alphabet il y a deux ans. La nature est intégrée à l'environnement, comme si le bâtiment avait été érigé autour des arbres et des bambous de vingt mètres de haut. Au quatrième, l'herbe pousse entre les planches du parquet, ils font semblant qu'on est au niveau de la rue...


La nuit tombe plus vite qu'à Paris, mais il fait encore une température d'été. Les néons et les écrans géants (Samsung oblige !) ressemblent à ceux de Times Square, il y en a partout, jour et nuit. Je m'écroule de sommeil.

Disparition de la cinéaste Danièle Huillet


Annonce triste que celle de la mort de Danièle Huillet à l'âge de 70 ans. Avec son compagnon Jean-Marie Straub, ils formaient un binôme exemplaire, cosignant tous leurs films. Il était courant de dire abusivement "les Straub" plutôt que Straub et Huillet. Je ne les avais pas revus depuis très longtemps, mais j'aimais bien leur gouaille et leur colère. Deux marxistes qui n'avaient jamais renoncé à leurs utopies. Leur opéra filmé Moïse et Aaron, sous la direction de Michael Gielen, m'a marqué irrémédiablement. L'orchestre avait été enregistré au préalable, mais les chanteurs étaient en direct dans les décors naturels. Dans une création radiophonique de Patrick Roudier, j'avais doublé Aaron tandis que Bernard jouait Moïse, le tout en sprechgesang. À chacun ses références.
Au cimetière, Straub aurait hurlé de douleur...