En critiquant l'adulé Kusturica, je savais que je risquais d'en froisser plus d'un. Ne désirant pas particulièrement m'étendre sur les qualités usurpées de ce faiseur brutal à l'onirisme saint-sulpicien, je citerai ce matin un de mes commentaires publiés en réponse à quelques réactions d'internautes.
Les œuvres obéissent toutes aux mêmes lois de l'identification, ce qui explique en partie nos goûts et nos dégoûts pour les unes ou les autres. Lorsque je cite Cocteau en disant qu'une œuvre est une morale, j'entends que certains s'amusent hélas sans arrières pensées et que la valeur d'une œuvre dépend des questions qu'elle soulève. Une manière de penser par soi-même, sans référence à la mode, au bon sens, au bon goût ou aux conventions sociales en vigueur. Je ne confonds pas non plus ce que j'aime et ce que j'estime.
J'apprécie donc plus les provocateurs que les démagogues. On peut flatter ses thuriféraires, mais il est plus courageux d'interroger nos certitudes. Je porte ainsi dans la plus haute estime Salo de Pasolini, A Movie de Bruce Conner, L'île aux fleurs de Furtado, La nuit du chasseur de Laughton, La route parallèle de Ferdinand Khittl, les films de Pelechian, Renoir, Visconti, Vigo, Bresson, Powell, Tati, Etaix, Dreyer, Welles, Murnau, Stroheim, Lang, Ray, Rosselini, Cassavetes, Lepage, Snow, Straub et Huillet, Franju, Grémillon, Becker, Rouquier, Brisseau, Kaurismaki, Lynch, Vecchiali, Iosseliani, Moullet, Takahata, Svankmajer, LaBute, Chytilova, Rappaport, Waters, Cronenberg, Cavalier, Buñuel, Marker et évidemment Jean-Luc Godard, qui ne font pas des films pour qu'on les aime, mais parce qu'ils feignent de croire encore pouvoir changer le monde ou qu'ils en expriment sans relâche leur incapacité déceptive. Ces quelques exemples sont loin de refléter mes goûts, mais ils dessinent le vecteur qui m'entraîne vers l'idée d'un homme meilleur.