samedi 3 mai 2008
Question de culture
Par Jean-Jacques Birgé,
samedi 3 mai 2008 à 00:17 :: Humeurs & opinions
Mathilde me signale ce petit film sur les pousseurs patentés du métro de Tokyo qu'elle a découvert sur l'excellent blog de Marieaunet qui l'avait elle-même trouvé sur YouTube... Ainsi les pépites du Net, drames ou fantaisies, circulent, reproduits à l'infini, de blog en blog, de courriel en courriel, de site en site, etc., etc.
J'avais vu les pousseurs à l'œuvre pour avoir travaillé au Japon il y a dix ans. Il serait dangereux d'en tirer des conclusions hâtives même si ces coutumes ou ces usages peuvent nous choquer. L'Asie obéit à d'autres lois que les nôtres. La différence de cultures suivant les continents exige que nous soyons prudents sur la façon que nous avons de voir les choses. La vie n'a pas la même valeur d'un pays à un autre. Les coutumes féodales de l'Asie nous paraissent souvent absurdes. Elles le sont forcément à nos yeux d'Occidentaux pétris de culture judéo-chrétienne. J'évoque ce point de vue distancié suite à l'emportement que suscite par exemple la Chine. J'y reviendrai encore.
Autre exemple, je me souviens de mes a priori lorsque je suis allé travailler en Afrique du Sud avant (pour mon film avec Idir et Johnny Clegg) et après Mandela (pour une tournée de ciné-concerts lors du centenaire du cinématographe). La première fois, je pensais qu'il y avait les bons noirs avec l'A.N.C. et les vilains blancs de l'apartheid. Je fus bouleversé de constater la brutalité de l'empire zoulou et la protection de la nature par les Boers. Je schématise vite fait. On retrouvait évidemment plus d'Afrikaners dans les rangs de l'A.N.C. que d'Anglais, les premiers (d'origine hollandaise) s'impliquant réellement dans leur pays, qu'ils soient tortionnaires ou révolutionnaires, tandis que les seconds vivaient dans un monde clos représenté par l'Empire Britannique. Les colonialistes aussi diffèrent par leurs cultures. La seconde fois, je ne comprenais pas pourquoi les Africains ne se révoltaient pas contre ceux qui les avaient opprimés, inculte que j'étais au pardon de toute cette population qui avait été évangélisée.
À Tokyo, les usagers du métro font la queue en file indienne derrière un petit trait marqué au sol et la rame s'arrête impeccablement devant eux, face aux portes coulissantes. La discipline me terrifie. Je comprends mieux les ressemblances avec l'Allemagne. Francis, qui possède une double nationalité, disait que l'on se faisait engueuler par les passants lorsque nous traversions en dehors des clous, mais qu'en Suisse nous aurions été dénoncés à la police. En France, j'ai du mal à comprendre les resquilleurs qui doublent dans la queue. Je suis énervé par notre incivisme. Tout cela s'explique par nos antécédents culturels, les exemples auxquels nous assistons enfants, la manière dont nos parents et, plus important, l'école gravent dans nos cerveaux les usages culturels qui déterminent un peuple. Certains nient ces différences pour ne pas assumer un patrimoine aussi lourd à supporter qu'à s'en enorgueillir. Pour conclure, j'hésite entre deux célèbres classiques, la dernière réplique du film Certains l'aiment chaud de Billy Wilder, "Nobody's perfect !", ou celle de La chienne de Jean Renoir, "Faut de tout pour faire un monde !", qui ont le mérite de se compléter...