mercredi 21 mai 2008
Quelles mutations pour mes chroniques ?
Par Jean-Jacques Birgé,
mercredi 21 mai 2008 à 07:40 :: Cinéma & DVD
Post-Scriptum d'introduction : la réaction est rapide. J'avais trouvé sur DailyMotion une copie piratée de mon film Idir et Johnny Clegg a capella réalisé en 1993 dans le cadre de la série Vis à Vis. Moins de 24 heures après que je l'ai signalée ici, "le contenu a été effacé, cette vidéo n'est plus disponible, car elle a été supprimée". Mon annonce lui aura été fatale. Est-ce à dire que le film sera reprogrammé sur une chaîne de télévision prochainement. C'est à espérer ! Soyez gentils de me faire signe si vous retrouvez sa trace... Lorsque les films sont invisibles, la circulation des œuvres me semble plus importante que leur protection. Dans l'autre cas, c'est du piratage imbécile.
Reprenons comme je pensais commencer... Hier donc, pour la première fois, je plaçais un Gif animé sur un billet après l'avoir récupéré sur un site de la Mairie de Paris. J'aimerais bien savoir en faire moi-même, pour casser l'unicité de l'image fixe présentée jour après jour et sans être obligé de coller un bout de film qu'en général je n'ai pas tourné. Étienne m'a montré comment placer les miens. Film, montage d'images fixes, son, c'est peut-être par là que je pourrais me renouveler.
Raymond me dit que je devrais refaire de la radio. Une chronique régulière ? Je pense à la télévision. Deux minutes en toute liberté, ou cinq, ou dix, ou plus. J'adorerais. Ayant déjà été producteur de créations fleuves à France Musique et d'émissions réalisées en direct à France Culture, les enjeux ne sont plus assez excitants. Mais je n'ai jamais fait de télé, sauf du temps de Patrice Barrat à la tête de Point du Jour, lorsque Jean-Pierre Mabille en était producteur exécutif, avec le Vis à Vis entre Idir et Clegg et bien évidemment la bouleversante série Chaque jour pour Sarajevo dont j'aimerais tant qu'elle soit entièrement éditée en dvd.
Je m'y étais senti si bien, à ma place retrouvée. Le cinéma est la clef de toutes les formes d'expression que j'utiliserai ensuite, musique incluse. À la télé, je pourrais faire jouer mon corps, ma voix, des invités, des images plein cadre, le son, le son, l'envers du décor, et improviser parce que rien ne vaudra jamais le direct, même s'il devient de plus en plus rare, de peur de débordements probablement. La censure s'exerce souvent par un léger délai entre l'émission et la diffusion, lorsque tout n'est pas simplement différé après remontage. Si c'est par souci créatif, pourquoi pas ? C'est à voir...
Radio France a toujours proposé des budgets de misère. Je replongeais tous les dix ans, mais c'était ensuite impossible de continuer dans ces conditions aussi misérables. Je ressors chaque fois le texte de Brecht sur la radio qui n'a hélas pas perdu une ride. La télé aurait l'avantage de présenter un nouvel enjeu, ce serait une manière d'appliquer tout ce que j'ai théorisé et imaginé, en particulier sur le son face aux images. Mais je ne vois pas bien quelle chaîne serait assez gonflée... On ne peut tout de même pas renoncer, abandonner la télévision au populisme démagogique, au pouvoir manipulateur et aux annonceurs. Plus il y a d'argent en jeu dans une production, plus c'est difficile d'y inventer, surtout librement, alors forcément, oui je rêve. Cela ne fait jamais de mal.
Je sais pourtant que c'est en rêvant à haute voix, que les choses les plus irréelles deviennent possibles. Ainsi, un jour, Francis, Bernard et moi évoquâmes le désir de composer pour un orchestre symphonique alors que nous n'avions essentiellement qu'improvisé collectivement. Nous avions tout de même déjà monté l'orchestre de quinze musiciens d'Un Drame Musical Instantané avec un certain succès. Je signalai donc ici et là notre souhait : au mieux on nous souriait aimablement. Au détour d'un couloir, Alain Durel qui était en fonction à Radio France me répondit :" Écris-moi deux lignes, deux lignes, pas plus !" Je pondai ces deux lignes de texte, deux lignes pas plus, et oubliai la chose au fond du tiroir des projets inaboutis. Six mois plus tard, Durel nous rendit visite accompagné d'Yves Prin alors responsable du Nouvel Orchestre Philharmonique de Radio France, et, en 1985, fut créé La Bourse et la vie que nous enregistrâmes sur le disque Carnage. Mais ça, c'est une autre histoire.