lundi 10 février 2025
Jack White bousculait les sillons
Par Jean-Jacques Birgé,
lundi 10 février 2025 à 06:58 :: Musique

Le 10 juin 2014 Third Man Records publia un drôle de vinyle qui bousculait le pressage habituel. Ce n'est pas un hasard si les disques furent un temps appelés microsillon, car normalement il n'y en a qu'un seul qui débute au bord, sa spirale se terminant au centre. Or la face A de Lazaretto commence au centre et se termine par une boucle sans fin au bord du disque ! Mais Jack White, son auteur, ne s'est pas contenté de ce renversement facétieux : un morceau fantôme, la voix d'un enfant (Jack petit ?), est gravé sur l'étiquette centrale en 78 tours ! Je n'en ai pas fini avec les points d'exclamation. Sur la cire vierge entre les cinq chansons et le macaron, sous un certain angle et lorsque le disque tourne, on peut apercevoir un hologramme de Tristan Duke ! Ancien chanteur et guitariste des White Stripes, Jack White produit ici une sorte de garage rock excentrique, avec des réminiscences dylanesques ou ledzepesques, à l'époque un succès considérable. Pour l'occasion, il a retravaillé des paroles écrites à l'adolescence, fanfaronnades frimeuses rappelant certains artistes de hip-hop ou la naïveté arrogante de la jeunesse. La face B est gravée dans le "bon sens", mais la première chanson comporte deux introductions différentes selon l'endroit précis où l'on pose le diamant ! Après un dernier sillon fermé, un nouveau morceau fantôme est caché sur l'étiquette mate (l'autre côté est brillant) et il se lit en 45 tours. Toutes les platines ne délivrent pas trois vitesses de lecture !
Ce disque étonnant, acquis sur le conseil de Jean-Brice Godet dont j'ai chroniqué le vinyle et les trois cassettes infinies du quartet WATT vendredi dernier, rejoint d'autres bizarreries de ma collection, comme de You're The Guy I Want To Share My Money With de Laurie Anderson/William Burroughs/John Giorno avec ses trois sillons concentriques, Footsteps le vinyle piétiné de Christian Marclay, Sounds of Silence de Caillet-David-Saladin, chaque exemplaire unique aux dégoulinades noires et blanches d'Avant-Toute de Birgé-Gorgé (!), nombreux disques souples comme celui de Salvador Dali et divers picture-discs dont certains imprimés sur des cartes postales ou l'enveloppe transparente, etc. En 2010, avec Vincent Segal, j'en avais présenté quelques uns à l'exposition Vinyl de la Maison Rouge. Mis à part les pochettes qui peuvent être aussi fameuses, je sais qu'existent des vinyles parfumés (berk, pas qu'à la rose), des disques en chocolat qu'on peut croquer, le RRR500 aux 500 sillons fermés...
→ Jack White, Lazaretto, Ultra LP Third Man Records