vendredi 2 novembre 2007
Destricted, 7 pornos comptant popo ou proue
Par Jean-Jacques Birgé,
vendredi 2 novembre 2007 à 00:04 :: Cinéma & DVD
Destricted (édité en dvd par blaq out) réunit sept court-métrages commandés à sept artistes sur le thème du sexe et de la pornographie. Fin 1975, lorsqu'en France fut institué le label X, Jean-Luc Godard annonça que désormais il n'y aurait plus que des films au-dessus ou au-dessous de la ceinture. Au risque d'être taxé lourdement, le X empêchait les cinéastes de filmer crûment, les films pornographiques perdant tout espoir de créativité. Ténu, le pari de ''Destricted'' est tenu, même si les films posent souvent plus la question qu'ils n'y répondent, à savoir qu'ils ne seront probablement pas très excitants pour les (a)mateurs du genre.
La commande sied forcément bien à Matthew Barney qui a l'habitude de camoufler le véritable sujet de ses élucubrations sous une abondance pâtissière de plans plastiquement fignolés aux petits oignons. Le dispositif de Hoist est intriguant, la poupée gonflable étant remplacée par un tracteur de cinquante tonnes et l'homme vert fondamentalement érotique avec son tour de potier pour poignet et son navet bien planté. Au moins cette fois tout est clair dans les intentions de l'artiste, expert en branlette aux gros moyens.
Le Balkan Erotic Epic de Marina Abramović est amusant, mais reste très anecdotique. Il a le mérite de jouer sur trois plans, la performeuse présentant doctement les rites balkaniques face à des séquences de dessin chastement animé et une figuration nombreuse et virevoltante rappelant un Jancso coquin. Avec le long Impaled, Larry Clark pose une vraie question contemporaine : de quelle sexualité rêvent les jeunes hommes qui ont été initiés très tôt par les films pornos à la télé ? Le réalisateur les confronte aux fantasmes qu'elle a suscités. Plus convenus sont Sync de Marco Brambilla avec sa minute composée de centaines de citations rythmée sur un solo de batterie et House Call où Richard Prince prétend désintégrer la vidéo en la filmant et refilmant pour retrouver l'essence même du genre. Rien d'étonnant à ce que la réalisatrice Sam Taylor-Wood projette dans Death Valley sa propre difficulté à assumer l'acte sexuel en filmant la masturbation d'un homme perdu au milieu du désert, le regard des femmes étant peu sollicité dans le tournage d'un X qui porte la croix de la culpabilité chrétienne plus en évidence que la majorité des autres films. We Fuck Alone n'est pas différent des autres provocations de Gaspar Noé. Les effets stroboscopiques prétendent nous hypnotiser face à la brutalité de ses fantasmes machistes et masturbatoires. On peut toujours rêver. On peut toujours rêver, car même si la tentative du projet est louable, même si les films pornos répondent au besoin pressant d'une sexualité masculine en berne, face à la question du sexe rien ne vaudra évidemment jamais la réalité du geste ou l'excitation de sa propre imagination. Le making of de Hoist, les scènes coupées de We Fuck Alone, l'interview de Sam Taylor-Wood confirment et soulignent les notes qui précèdent, tandis que le long bonus caché, Haruki Yukimura et Nana-Chan de Xavier Brillat, suivi d'un entretien entre le réalisateur et Agnès Giard, révèle l'art du shibari, le bondage japonais.