70 Humeurs & opinions - janvier 2009 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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vendredi 30 janvier 2009

Un poing c'est tout


Johannesburg, avril 1993. Les lois de l'apartheid ont été abolies, mais les élections ne porteront Mandela et l'ANC au pouvoir que dans un an. L'extrême-droite est toujours à l'œuvre. Des snipers sont embusqués dans les townships. Le secrétaire général du Parti communiste sud-africain (SACP), Chris Hani, vient d'être assassiné. Le lendemain, une marée humaine danse en formant des vagues comme un dragon chinois de la largeur de la rue. Le tapis volant qui s'avance en chantant se hérisse de poings levés. L'image replace l'individu au milieu du groupe. Chacun est seul, debout, avec tous les autres, ensemble, dans l'action. Les poings se lèvent vers le soleil. Il y aura à nouveau de la lumière si on décide de la réinventer.
P.O.L. me fait justement remarquer que mes billets politiques manquent d'humour. Ce serait certainement plus efficace, mais je ne sais pas. Peut-être ai-je peur de devenir cynique, de perdre les illusions de mes jeunes années ou encore de trahir les anciens qui m'ont transmis l'histoire de leurs luttes. À moins que ce ne soit qu'une icône héroïque remontant à l'enfance, le goût de l'ultime rebondissement salvateur, mâtiné d'un complexe culturel, de culture physique cela va de soi ! Non, cela n'allait pas de soi. J'avais l'impression de n'avoir d'aura charismatique que dans la parole du tribun... Les journaux satiriques me font à peine sourire. Dans mon cœur je suis un pleureur, un saule acidifiant ses larmes, un jeu de mots me fournissant mes armes comme de fines lames tranchant dans le vif du sujet. J'envie les humoristes capables à la fois de faire des analyses et des propositions. J'aimerais terminer par une pirouette comique, mais n'accouche chaque fois que d'une envolée lyrique. Rien d'anormal pour un musicien ! La musique est rarement drôle.

Photogramme de mon film Idir et Johnny Clegg a capella (Vis à Vis, Point du Jour)

jeudi 29 janvier 2009

Grève générale

Aujourd'hui c'est dans la rue que ça se passe.

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mercredi 28 janvier 2009

Bonne humeur et mauvaise conscience


Les deux terrains coexistent. Dans la sphère privée, l'hédonisme est de rigueur. Face à la société humaine, l'addition est douloureuse. On a beau apprécier les grimaces de clown et la danse du ventre, comment accepter le plaisir sans le partager avec le plus grand nombre. La partouse épicurienne à l'échelle de la planète est un rêve d'enfant. Que chacun mange à sa faim, ait un toit et la possibilité de choisir son destin peut sembler un vœu pieu, mais quel autre enjeu vaut-il que l'on s'accroche à la vie ? Le droit de régresser n'est pas donné à tout le monde. L'exploitation de l'homme par l'homme, son assujettissement, les crimes dont il est autant victime que complice empêchent la libido de s'épanouir. Elle renvoie toujours à l'enfance, par le vertige du sexe, la faim du sybarite, l'odeur de sa merde ou la précieuse quête d'un Graal aussi naïve que nécessaire. Le cycle inexorable ressemble plus aux cercles d'un derviche qu'à une évolution. La spirale est double, ascendante dans les élévations de l'âme, abyssale dans sa pitoyable impuissance. Le singe n'arrive plus à se redresser. Nous voilà bien ! À mettre en scène ses contradictions, le corps est plus démonstratif que l'esprit. Pas d'enfumage, mais les manifestations physiques du combat que se livrent le désir de vivre et sa propre incapacité à la partager hors du cercle des initiés. C'est dégueulasse. Que l'on ne s'étonne point que cela fasse mal ou rende malade. Le drame est total, la difficulté d'être absolue. Les nantis de la planète, minorité aux commandes, ayant-droits historiques ou citoyens de base, jouissent ou du moins ils le croient, s'étourdissant dans la consommation des objets ou des sensations. C'est de nous tous, sans exception, dont il s'agit, si vous êtes seulement "équipés" pour lire ces lignes. Mais lorsque la mort se présente que reste-t-il à cet infiniment petit, perdu dans le vaste univers du temps, que la satisfaction d'avoir su prendre et donner, de partager ses richesses et ses interrogations, qu'elles fussent matérielles ou spirituelles ? C'est bref. Raison de plus.

Paysage sylvestre au lever du soleil (1835) de Caspar David Friedrich

mardi 27 janvier 2009

Libération ouvre ses colonnes à Alain Badiou


Ce matin, le journal Libération, qui jusqu'ici prit le soin le soin de le caricaturer, donne la parole à Alain Badiou, les rares commentaires du philosophe sur l'actualité agissant comme de petits échos à un entretien où le "démocratisme" est clairement mis en question. Badiou insiste sur la nécessité de "se tenir à distance et de la forme-parti et de l'État, et aussi savoir résister au fétichisme du "mouvement", lequel est toujours l'antichambre du désespoir."
Dans une discussion entre amis hier soir, j'ai pu constater moi-même comme il leur était difficilement acceptable d'assimiler à des pansements les propositions pleines de bons sentiments des uns ou des autres alors que tous les fondements du capitalisme libéral ont perverti en amont le système de repères utilisé. Émettant des doutes sur la rigueur des techniques de la psychologie sociale, même émises par la passionnante Ester Duflo devant le Collège de France, j'apparaissais isolé, "sur un rocher", alors que je soulignais simplement que les termes des enquêtes faussaient les protocoles dès lors qu'ils se réclamaient d'une vérité objective sans approfondir les raisons de l'état des choses et des êtres impliqués. La réduction de l'oppression des peuples à des équations dont les termes sont isolés du contexte m'a toujours révolté. Appliquant au public les techniques de marketing du privé, on ne cherche qu'à guérir des symptômes sans remonter aux causes primordiales. Pour en revenir au désespoir, il faut une bonne dose de volontarisme pour ne pas y sombrer tant l'éducation ne nous prépare qu'à nous conformer, voire dans le meilleur des cas réagir, lorsqu'il n'est de solution que dans l'action.
Plus loin, Alain Badiou (photographié ici lors d'une conférence de Slavoj Žižek à l'E.N.S. en mai 2008 qu'il présentait) rend hommage au "trio exemplaire de la fin du XIXe siècle et du début du XXe : Darwin, Marx, Freud... Trois savants (biologie, économie politique, psychologie clinique)... Qui sont aussi des philosophes (théorie de la vie, de l'histoire, du sujet)... Et des révolutionnaires : contre la théologie créationniste, contre la société de classe, contre la vieille morale sexuelle... Donnant sens à des notions à la fois neuves et fondamentales : l'évolution, la sélection, le capitalisme, le communisme, l'inconscient... Ils ont produit des effets immenses, dans tous les domaines du savoir et de l'action. Ils sont inclassables, inépuisables..."
En ce qui concerne l'actualité française, le message est on ne peut plus simple puisqu'il suggère que la rue appelle (jeudi ?!) à la démission de l'orléaniste Sarkozy tant les fronts se multiplient contre sa politique de destruction massive tous azimuts. De quoi Alain Badiou est-il le nom ? Par son rejet de "l'asthénie régressive", sorte d'aquoibonisme démobilisateur, il ne confond par son refus de vote avec le cynisme du citoyen français que la politique ennuie ou qu'il réduit à des mesurettes tant qu'il peut jouir de ses privilèges.

mercredi 21 janvier 2009

God bless America... Gott mit uns... God save the Queen... Allah Akbar...


Allumant l'auto-radio en revenant des courses, je tombe sur la fin du discours d'investiture de Barak Obama se terminant évidemment par "God bless America!". Ici, et dans une majorité de films américains jouant le rôle de service de communication du pays mieux que tous les plénipotentiaires, Dieu s'invite régulièrement sans qu'on l'y ait invité. L'institution l'impose, un point c'est tout.
Au XXIe siècle, comment peut-on continuer à diffuser de telles histoires à dormir debout et les donner pour véridiques ? Comment peut-on jurer sur la Bible de dire toute la vérité, rien que la vérité ? Les agnostiques apprécieront le paradoxe, s'il leur arrivait un jour de devoir se prêter à l'exercice ! L'exemple symbolique de l'État dicte sa loi à la population.
Chaque fois que Dieu est invoqué légalement nous avons du mouron à nous faire. On voit aujourd'hui les dégâts que génère la collusion de l'État et de la religion dans les pays obscurantistes et ségrégationnistes qui la brandisse, de l'Iran à Israël, des États-Unis au Pakistan.
Dans Le Mépris de Jean-Luc Godard, après avoir évoqué le combat d'Ulysse contre les dieux, le réalisateur Fritz Lang dans son propre rôle tente d'expliquer au producteur joué par Jack Palance que les dieux n'ont pas créé les hommes, mais que ce sont les hommes qui ont créé les dieux. Prokosh est une caricature des États-Unis, un enfant capricieux qui veut faire la loi et qui aime les dieux pour s'y identifier comme à des super-héros. Lang qui incarne toute la culture européenne commente ensuite un poème d'Hölderlin, insistant sur le fait "étrange, mais vrai" que ce n'est plus la présence de Dieu, mais son absence qui rassure l'homme.
Nous voilà bien rassurés !

mardi 20 janvier 2009

Où est la maison de mon ami ?


Déjà pas très en forme, je n'aurais pas dû regarder le film d'Abbas Kiarostami. Pourquoi les films où la pression sociale est forte et paraît immuable me dépriment-ils ? Pourtant, par ses initiatives, Ahmad, le gamin de huit ans, se révolte à sa façon contre l'absence d'écoute des adultes qui l'entourent. Pour les mêmes raisons, je ne supporte pas mieux les films où un personnage s'impose sans que personne n'ose l'éjecter, comme dans "Harry, un ami qui vous veut du bien" de Dominik Moll. La révolte qui gronde en soi sans pouvoir s'exprimer m'est pénible. Je ne suis pas non plus un fan du réalisme qui prétend calquer la vérité. Bien que Où est la maison de mon ami ? soit un beau film, je me suis ennuyé jusqu'à broyer du noir.
Le terrain était propice. Les nouvelles de début d'année ne sont pas des plus réjouissantes et je sais qu'il me faudra attendre quelque temps avant l'arc-en-ciel annonciateur du printemps. Bernard nous fait des frayeurs avec sa santé, mon camarade d'enfance Paul se tue en tombant dans son escalier le jour des 18 ans de sa fille, Maman met sa société en faillite, je n'arrive pas à réparer la dynamo de mon vélo, mon rhume sec m'empêche de dormir, etc. Tout peut devenir élément de contrariété, des choses graves à des futilités.
Comme je sais que l'on ne peut pas éviter les mauvaises nouvelles et que la vie est marquée par l'alternance entre bonnes et mauvaises, j'ai trouvé la solution la moins douloureuse : je réduis le temps pénible à son strict minimum. Ne pouvant influer sur l'intensité de l'oscillation, je travaille sur sa fréquence, entretenant de larges crêtes et rendant les creux aussi étroits que possible.
Je me replonge dans le travail pour ne pas virer à la dépression. Ne me dites pas que c'est une fuite en avant, cela a le don de m'énerver. Du volontarisme, d'accord. À quoi sert-il de se lamenter ? L'actualité suffit à m'abattre. Israël, admiré sur son flanc nord pour ses frappes chirurgicales, se flatte de ses succès criminels dans sa région sud, détruisant la culture juive dont je me targuais enfant. De son côté, notre capricieux président détruit la culture française dont j'étais si fier à l'adolescence. J'ai mal à l'homme. Partout, on tue de plus belle, on saccage, on méprise, on exploite, mais la révolte se fait attendre. L'anesthésie est efficace. Il est des matins où elle ne fait plus aucun effet.

Illustration : Tombe de 3300 ans avant J-C.

lundi 19 janvier 2009

Du vide


Lorsque l'on est très actif, on a beau savoir que l'on a quatre semaines sans vraiment de rendez-vous, ce n'est pas facile de décider de s'arrêter pour prendre des vacances. Suis-je encore capable de rester contemplatif, devant une toile, un paysage, un livre, devant le vide qui vous happe et laisse enfin de l'espace pour l'inattendu, le renversant, le renversé ? La fatigue évite la bousculade, la cohue des idées. Au lieu de cela se forme un encombrement, un goulet d'étranglement, un vide stérile. Il y aurait donc deux formes de vide, le vide peau de chagrin et le vide appel d'air. Expansion ou trou noir ? L'interrogation sur l'infini me plonge toujours dans une mélancolie métaphysique qui remet à sa place l'infiniment microscopique de notre condition humaine. Le vertige de la mort m'attrape lorsque je pensais l'avoir vaincu. Le magnétiseur m'assure que les petits dormeurs vivent vieux, c'est double bonus. Les anciens nous montrent la voie. Est-ce rassurant ou paniquant de sentir que son tour approche ? Pourtant, dès le début, chaque pas est dirigé vers la sortie. Toute sa vie on oscille entre le mûrissement et la régression. Faire l'amour, rire et fou rire, se saoûler ou rechercher le vertige, ne serait-ce que se souvenir, sont des manifestations régressives. La sénilité permet in extremis de boucler la boucle. Retomber en enfance est une recherche permanente et nécessaire. Le vide est sanitaire, pardon, salutaire.

jeudi 15 janvier 2009

Voleurs de foules, le rap de Denis Robert


Voleurs de foule (D.Robert/B.Delbecq/C.Hartlap)
La vidéo est en ligne depuis plus d'un an. Le journaliste qui révéla l'affaire Clearstream est harcelé comme personne depuis lors (celui du Luxembourg ?). Les frais de justice sont très largement au-dessus de ses moyens. Face à cet acharnement, son comité de soutien ne le laisse pas seul et met en vente, par exemple, un T-shirt amusant qui fait tourner la roue du travail chère à Napoléon IV. Denis Robert jugule ses angoisses en produisant autre chose que les livres qui lui ont valu pas moins de 200 visites d'huissiers à son domicile et 30 procédures judiciaires. À la Galerie W Eric Landau, Denis Robert expose d'immenses tableaux des listings informatiques qu'il a annotés de sa main. Il écrit même une chanson en avril 2007 à l'occasion d'un concert de soutien à La Cigale auxquels participent Didier Super, Cali, Miossec, Tony Truant et toute la bande de Groland. Il l'enregistre avec deux "potes" musiciens, Djengo Hartlap (qui masterise les disques Plush) et le pianiste Benoît Delbecq. Un troisième, Yves Lespagnard, le réalise. Oui, c'est bien Benoît à l'éternel sourire qui s'y colle, celui qui jouait sur notre Machiavel... Il paraîtrait que le titre doit bientôt sortir en téléchargement sur un label canadien. Tout récemment, on a pu apercevoir Denis Robert sur béquilles dans le film de Bruno Delépine et Gustave Kervern, l'abrasif et déjanté Louise Michel.

vendredi 9 janvier 2009

Le retour de la délation institutionnelle


Antoine me signale ce site du Ministère de l'Intérieur dont les deux seuls liens sont celui des ministères de la défense et de la justice. Si le site avertit contre les scam, le phishing et nous enfume sur le peer-to-peer, la page d'accueil ne peut que nous faire sauter au plafond. C'est le retour à la délation, d'autant qu'elle peut s'exercer anonymement, du moins tant que le Ministère ne fait pas de recherche sur l'IP expéditrice. Les signalements sont traités par des policiers et gendarmes affectés à la Plateforme d'Harmonisation, d'Analyse, de Recoupement et d'Orientation des Signalements (PHAROS). Cette plateforme est intégrée à l'Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l'Information et de la Communication. Ce service appartient à la Direction Centrale de la Police Judiciaire, composante de la Police nationale. Plus haut, on peut lire les contenus à signaler : Il doit s'agir d'un contenu ou d'un comportement illicite, c'est-à-dire qu'il doit être interdit et puni par une loi française. Les contenus ou comportements que vous jugez simplement immoraux ou nuisibles n'ont pas à nous être signalés. Il doit s'agir d'un contenu public de l'Internet, auquel tout internaute peut se retrouver confronté : site internet, blog, forum, propos sur un « tchat », agissement d'un « rôdeur » anonyme sur une messagerie, etc. Il ne doit pas s'agir d'une affaire privée avec une personne que vous connaissez, même si elle utilise Internet pour vous nuire. Dans ce cas, présentez-vous dans un Commissariat de Police ou une Brigade de Gendarmerie. Il ne doit en aucun cas s'agir d'une urgence nécessitant l'intervention de service de secours (accident, incendie, agression, etc.) Dans ce cas, il faut composer le « 17 » sur votre téléphone. Ça va, vous voilà rassurés ? Bonnes gens, il ne suffit plus de dormir tranquille car la police veille, participez y activement en devenant auxiliaire de police et ne vous arrêtez pas à Internet, dénoncez vos voisins de palier et faites-le dans les règles !

Comment le peuple juif fut inventé


Hier matin, Serge m'envoie un lien vers l'émission de Daniel Mermet "Là-bas si j'y suis". Il s'agit d'un entretien radiophonique passionnant avec Shlomo Sand autour de son livre "Comment le peuple juif fut inventé" (Ed. Fayard). Pour corroborer ce qu'avance le chercheur, j'ajoute que c'est ainsi que l'histoire me fut transmise dans ma famille juive... Prosélytisme, tribus converties dans toute l'Europe et l'Afrique du nord, liens culturels à défaut de religieux, aucune ambiguïté sur l'origine du monde ! Aucune trace de race ni de peuple. L'Histoire fit le reste.


L'extrait YouTube ci-dessus n'est là que comme bande-annonce de l'entretien avec Shlomo Sand dont je suggère fortement l'écoute intégrale sur France Inter...
Comme d'autres, j'avais donné ces informations en commentaires, et puis je me suis dit que cela valait le coup de le faire monter d'un cran dans la hiérarchie bloguienne, parce que nombreux lecteurs ne lisent pas les commentaires, surtout lorsque nos échanges sont longs et interminables.

mardi 6 janvier 2009

Neige-Nuit-Sable-Sang


Il neige à Paris. Il tombe des flammes à Gaza. La poudre blanche ravit les enfants. La noire les ravit à la vie. La Shoah ne justifie aucun nouveau crime. Cela n'a jamais été un blanc seing pour pouvoir opprimer et tuer à sa guise. Le nombre de morts de part et d'autre est disproportionné. La communauté internationale s'en émeut, mais l'ONU est toujours paralysée par son système si absurde que l'on peut se demander si ce n'est pas intentionnel ? Les Israéliens ne comprennent pas que nous les condamnions sous prétexte qu'ils vivent dans la terreur des attentats et des roquettes. Ils n'imaginent pas ce que doivent endurer les Palestiniens depuis un demi-siècle d'occupation et de brimades. Le blocus les prive des denrées de première nécessité, de médicaments, parfois d'eau et d'électricité, les empêchant de sortir de leur pays grand comme un mouchoir de poche où ils sont entassés. Les états arabes s'en lavent les mains. Les occidentaux désapprouvent, mais s'enferrent dans leur impuissance. Les Palestiniens sont seuls. Les Israéliens sont soutenus par les Etats-Unis. Ils jouent avec le feu. La crise mondiale qui touche l'Oncle Sam pourrait renverser la donne. L'histoire se répète toujours, seuls les rôles varient. Tsahal agit en toute impunité. Quels crimes honteux perpétuent les soldats d'Israël au point d'interdire aux journalistes l'accès aux territoires ? Cela s'est vu en Irak. Jamais Israël ne trouvera la paix (c'était pourtant l'idée qui guida à sa création !) tant que ce pays préparera la guerre, tant qu'il se repaîtra de son colonialisme et de son expansionnisme. Pendant ce temps-là les Palestiniens se chamaillent, pour des raisons équivalentes. Les religions ont pourri l'espace civil. Partout où elles font cause commune avec l'État règne l'absurdité. Les populations s'y engouffrent sans comprendre de quoi ou de qui elles sont le jouet. Quelles que soient ses origines, il est indispensable de condamner l'Etat d'Israël sans confondre les Juifs avec le gouvernement israélien élu. Nous devons tous nous révolter contre l'abomination dont sont victimes les Palestiniens, même si ce ne sont pas des anges, mais qui le serait après tant d'années d'occupation et du désespoir parfois suicidaire qu'elle a engendré ? Il est de notre devoir de dénoncer le délire paranoïaque d'Israël, et de façon encore plus virulente si l'on est d'origine juive. Aucun antisémitisme ne pourra trouver de justification foireuse si les Juifs de la diaspora ne se font pas complices de l'ignominie d'un Etat devenu la caricature du martyr de ses aïeux. À qui profite l'amalgame ? Les rôles évoluent. Chaque pays s'est un jour retrouvé dans la position d'assassin. L'Allemagne s'est relevée du nazisme, l'Espagne du franquisme, la France de la collaboration, les empires se sont écroulés... Combien de temps faudra-t-il à Israël avant de pouvoir se regarder dans la glace ? Combien d'innocents mourront avant que les peuples comprennent que la mort est la pire des options ? Celle qui nous condamne tous. Combien de temps faudra-t-il pour assimiler qu'à moins de tuer tout le monde, on appelle cela un génocide, il y aura toujours un Palestinien pour crier vengeance, quitte à périr dans le déchirement de son cri ? Arrêtez le massacre, c'est moi que vous assassinez.

samedi 3 janvier 2009

Autoréduction à Monoprix


Une cinquantaine de précaires, chômeurs, intermittents de l’emploi, du spectacle, étudiants... ont bloqué mercredi après-midi les caisses du Monoprix de la rue du faubourg Saint Antoine. Le contenu a été en partie fourni aux sans-papiers de la Bourse du travail de Paris occupée et aux mal logés en lutte du gymnase Saint Merri...
Comme j'ignore comment l'information sera relayée dans la presse et que je m'intéresse à des formes de résistance à la fois populaires et efficaces, je vous renvoie vers ce passionnant article de Rue89 signalé par Hélène Collon sur FaceBook. Il est indispensable d'inventer de nouvelles formes de lutte qui rencontrent l'adhésion et la solidarité des usagers. Pousser les transports en commun à la gratuité (c'est interdit !) serait par exemple plus efficace que l'arrêt des trains... Monoprix a préféré laisser passer les caddies plutôt que continuer à bloquer les caisses avec un gros manque à gagner ou se lancer dans une action antipathique, risquée commercialement, comme l'intervention de la police, se contentant de porter plainte... Pour une fois l'idée de réveillon me sourit.

P.S. : j'ai été mauvaise langue, je n'aurais rien écrit sur le sujet si j'avais été cherché plutôt le journal dans la boîte ; l'affaire fait la une de Libération ce matin.